Des épées, des manches de hache, des brochettes et même un modèle de voilier ancien: les fidèles se transperçaient les joues à l’aide d’objets étranges dimanche au festival végétarien de Phuket, en Thaïlande, rite religieux taoïste fondé sur des mutilations expiatoires.
A travers l’Asie du Sud-Est, de nombreuses communautés chinoises adoptent cette semaine un régime végétarien à l’occasion de la fête taoïste «des neuf dieux empereurs», mais peu vont aussi loin que dans l’île de Phuket, dans le sud de la Thaïlande. Pendant toute la semaine, les fidèles témoignent de leur ferveur au travers de la douleur et de la mutilation. Ils courent sur des charbons ardents et se percent le corps à l’aide d’une grande variété d’objets lors de scènes parfois difficiles à regarder.
Vêtus de robes, les festivaliers entrent dans une sorte de transe au son lancinant de tambours, ce qui, expliquent-ils, leur permet de ne pas avoir mal. Un homme s’est ainsi fait transpercer la joue avec une pique en argent avant que la proue d’un modèle de voilier ancien n’y soit insérée. Puis, il a pris sa place dans un défilé à travers la ville. «C’est une expérience inoubliable», dit Barry Rafftery, un touriste canadien de 55 ans. «Je suis surpris par le manque de sang».
Julie Bedford, une autre touriste canadienne de 33 ans, est étonnée de l’ampleur du festival. «Je pensais qu’il y en aurait une poignée mais où que l’on regarde, il y a des gens qui se font percer le visage». Ces rituels orchestrés par la communauté chinoise locale se répètent depuis 1825 dans cette île qui est un aimant à touristes. Selon la légende, tout a commencé avec une troupe d’opéra chinois miraculeusement guérie du paludisme en adoptant un régime végétarien strict.
Pendant les rituels complexes de purification, les adeptes se privent de viande, d’alcool, de rapports sexuels et se mortifient dans leurs chairs. La plupart des adeptes sont des hommes, mais quelques femmes franchissent aussi le pas. Un chauffeur de taxi, qui se présente sous son seul surnom de Chang (éléphant), explique qu’il n’a aucunement l’intention de se percer le corps mais qu’il respecte les règles d’abstinence.
«Cela m’a déjà porté chance. La semaine dernière, je n’ai pas eu de travail mais hier, j’ai eu beaucoup de clients après avoir prié le seigneur Bouddha». Selon l’Autorité du tourisme de Thaïlande, le festival attire des centaines de milliers de visiteurs supplémentaires à Phuket. La plupart sont des touristes asiatiques, des Malaisiens d’origine chinoise, mais aussi des Chinois ou des habitants de Singapour et Taïwan.
Le Quotidien/afp