Des stars comme Kristen Stewart ou Jesse Eisenberg ne manqueront pas le festival de Sundance en janvier. Mais c’est l’intelligence artificielle qui sera au centre de l’attention lors du rendez-vous annuel du cinéma indépendant américain.
Dévoilé mercredi dernier, le programme de Sundance, traditionnel rendez-vous du cinéma indépendant américain, prévoit de mettre l’accent sur l’intelligence artificielle (IA). Déjà bien présente dans l’industrie du cinéma, cette technologie et ses conséquences étaient au cœur des revendications des syndicats des scénaristes et des acteurs pendant leurs grèves respectives, qui ont grippé la machine hollywoodienne durant plusieurs mois cette année. «L’IA va être une partie intéressante du festival cette année», a assuré sa directrice de programmation, Kim Yutani. «En préparant le festival, il était frappant de constater qu’elle revenait constamment dans les films et nos discussions.»
Parmi les films qui seront projetés à Park City, dans les montagnes de l’Utah, Eno, de Gary Hustwit, explore la carrière du musicien Brian Eno grâce à un «moteur génératif» qui propose un nombre de versions quasiment infinies du film en faisant des assemblages à partir de centaines de scènes possibles, tirées d’interviews réalisées pour le film ou des rares archives vidéo et musicales de Brian Eno. «Un film qui n’est jamais deux fois le même… C’est quelque chose de nouveau», a souligné le nouveau directeur du festival, Eugene Hernandez. Pour ce faire, Gary Hustwit a développé un logiciel génératif dont l’usage «résonne poétiquement avec la pratique créative du musicien», lui-même à l’avant-garde des techniques de composition depuis cinquante ans.
90 programmes sélectionnés
Toujours dans la veine de l’IA, le documentaire Love Machina, de Peter Sillen, suit les efforts d’un couple pour perpétuer au-delà de leur mort l’amour qui les lie, en transférant leur conscience à un humanoïde baptisé Bina48, tandis qu’Eternal You, des documentaristes allemands Hans Block et Moritz Riesewieck, suit des start-up qui veulent créer des avatars que des gens utiliseraient, contre paiement, pour rester en contact avec leurs proches après la mort de ces derniers. Côté fiction, l’artiste Jack Beggert – réalisateur de clips pour Kendrick Lamar, Doja Cat ou SZA – s’empare de l’IA pour certaines séquences de son premier long métrage, Little Death, qui met en scène David Schwimmer dans le rôle d’un cinéaste en pleine crise d’identité.
Quelque 90 programmes ont été sélectionnés pour cette édition 2024, du 18 au 28 janvier, du festival cofondé par Robert Redford, dont 85 en première mondiale. Parmi eux, deux longs métrages avec Kristen Stewart, dont Kim Yutani prédit qu’ils seront «deux des films qui feront le plus parler durant le festival». Dans Love Lies Bleeding, l’ancienne star de la saga Twilight interprète une responsable de salle de sport dont la relation avec une culturiste bisexuelle tourne mal; le film est signé Rose Glass, nouvelle sensation du cinéma de genre britannique. Kristen Stewart sera aussi à l’affiche de Love Me, film mystérieusement présenté comme une histoire d’amour «entre une bouée et un satellite» dans un monde post-humain. «Je n’en dirai pas plus», a ironisé la directrice de la programmation. «C’est tout ce que nous savions de ce film avant d’appuyer sur « play ».»
Un film qui n’est jamais deux fois le même… C’est quelque chose de nouveau
Jesse Eisenberg est également deux fois à l’affiche : en tant que réalisateur et acteur avec A Real Pain, et comme acteur dans Sasquatch Sunset, des frères David et Nathan Zellner, deux films ayant les liens familiaux en toile de fond. Dans The Outrun, l’actrice américano-irlandaise Saoirse Ronan interprète une alcoolique qui quitte Londres pour la beauté sauvage de l’archipel écossais des Orcades. Le réalisateur Richard Linklater, pilier du cinéma indépendant américain, présentera Hit Man, l’histoire d’un professeur un peu guindé qui se transforme en faux assassin, et la série documentaire God Save Texas, portrait de sa ville natale, Huntsville, où se trouve un immense pénitencier.
À quelques mois de l’élection présidentielle aux États-Unis, et quelques jours après les premières primaires républicaines dans l’Iowa, le documentaire War Game portera à l’écran un jeu de rôle non scénarisé impliquant des vrais responsables américains devant réagir à un coup d’État après une élection contestée. «C’est évidemment perturbant de savoir que ces jeux peuvent être très proches de la réalité», a remarqué Eugene Hernandez. «En cette année électorale, ce type de sujet permettra d’avoir des débats plus poussés.»