Après l’acteur français Melvil Poupaud, c’est au réalisateur/écrivain français Samuel Benchetrit que le Festival International du Film d’Amour de Mons a octroyé son second coup de cœur.
C’est à cette occasion que le public a pu découvrir à la fois « J’ai toujours rêvé d’être gangster » et son nouveau film « Asphalte » présenté hors compétition au dernier Festival de Cannes. Rencontre. « Très honnêtement, les hommages que l’on me rend me sont indifférents » nous a-t-il confié, précisant « si je suis venu c’est parce qu’en ce moment j’écris, j’ai un peu de temps et puis, j’aime la Belgique où j’ai vécu à une certaine époque. » Ce qui est bien chez Samuel Benchetrit, c’est qu’il n’utilise pas la langue de bois, préférant parler de ses œuvres et sa passion du cinéma que des artifices qui tournent autour des Festivals.
Ce qui caractérise les œuvres de Samuel Benchetrit, c’est un humour qui lui est propre et pour lequel certains le qualifierait d’humour « belge ». « Mon humour n’a pas de véritable identité, il peut être qualifié d’humour italien, anglais voire juif. Mais c’est surtout un humour d’humilité, de désespoir » faisant référence aux habitants des Cités où la vie n’est pas toujours simple. D’ailleurs, « Asphalte », tiré de son livre « les chroniques d’Asphalte » rend hommage aux personnes vivant dans les banlieues, un lieu où Samuel a grandi.
« J’avais envie de parler des cités HLM d’une autre manière que l’image que nous avons avec les voitures brûlées, la violence etc. qui certes existe mais j’avais envie de donner une autre image. Vous savez, il y a quelques temps, je suis allé à Bruxelles présenter « Asphalte » et j’ai parlé avec des gens qui venaient de Molenbeek. Vous savez depuis les attentats de Paris, lorsque l’on prononce la ville de Molenbeek, les gens haïssent ce nom. Et moi, j’ai des amis qui y vivent et il y a des gens merveilleux qui vivent là. Dans les cités HLM, c’est pareil. Il n’y a pas que des fous furieux qui s’engagent pour aller en Syrie. Il y a aussi des jeunes filles qui veulent devenir Ministre ou autre chose. « Asphalte » sert à raconter d’autres histoires. »
N’ayons pas peur des mots, les films de Samuel Benchetrit ne rencontrent pas toujours le public mérité. Néanmoins, « Asphalte » grâce à sa présence sur la Croisette échappe à la règle et c’est tant mieux car le projet a bien failli ne pas voir le jour « C’est comme « J’ai toujours rêvé d’être gangster », les gens qui n’y ont pas cru et cela a été un succès public et critique. Je le dis avec fierté parce que je n’étais pas seul sur ce projet-là. Quant à « Asphalte », des personnes comme Isabelle Huppert, Gustave Kerven et Michael Pitt sont venus pour pas très cher et en plus avec plein de bonheur. Vendredi, c’est la Nuit des César, le film est nommé, c’est une véritable joie. Ce film rend très heureux. »
Samuel Benchetrit est un véritable touche à tout. Réalisateur, scénariste, acteur, metteur en scène de théâtre, écrivain. On pourrait s’imaginer qu’il est un homme comblé. Pourtant, « j’ai découvert la musique et plus particulièrement la guitare sur le tard et je le regrette vraiment. Si j’avais découvert la guitare à 14 ans, croyez-moi, ma vie aurait été toute autre chose. »
Alors que la promotion d’ « Asphalte » se termine petit à petit, Samuel Benchetrit a déjà un autre projet en cours de production « je vais adapter mon dernier roman intitulé « Chien » qui est une métaphore sur la déshumanisation d’un homme qui va perdre sa femme, sa famille, son travail et qui est sans ambition. Il vit dans le climat actuel au milieu de toutes ces angoisses. Un homme dont le propre mouvement s’arrête au milieu du grand mouvement mondial et qui va faire une rencontre assez troublante avec un dresseur de chiens qui va essayer de le dominer. Le film est angoissant mais en même temps assez drôle et je crois très contemporain. Et, j’ai très hâte de faire ce film. »
Brigitte Lepage