Mad Max revient, près de quarante ans après le premier opus avec Mel Gibson, dans une nouvelle interprétation punk du mythe du loup solitaire.
Depuis vingt ans, George Miller s’était reconverti dans les films pour enfants, avec Babe, l’histoire d’un petit cochon perdu dans la grande ville, et Happy Feet, l’histoire d’un petit pingouin perdu dans l’immensité antarctique. Des films mignons qui ont fait oublier que le réalisateur australien est avant tout l’inventeur d’un mythe : Mad Max, le cow-boy post-apocalyptique.
Et voici justement que Max Lefou renaît de ses cendres, trente ans après l’oubliable Au-delà du dôme du tonnerre, avec Tina Turner et Mel Gibson. Aux commandes, George Miller, toujours lui, 70 ans et plus en colère que jamais. Cela se sent, cela se voit dans un film de deux heures monté aux cordeaux, sans temps morts, et punk en diable.
L’histoire de ce Fury Road ? Des femmes, jeunes, belles et innocentes, vont tenter de sauver l’humanité de la folie d’hommes qui l’ont épuisée, massacrée, pour leur profit. L’anarchiste Miller délivre un discours ô combien symbolique, lui l’Australien du bush, qui dépeint en filigrane l’histoire de son pays, de ces aborigènes presque anéantis.
Quand Charlize Theron prend le manche
Le scénario est simple et sert le grand spectacle, western dystopique tourné entre Namibie et Australie, dans ces déserts magnifiques décors naturels. Face au grand méchant Immortan Joe, détenteur de la seule richesse, le water cola, quelques-uns décident de se rebeller contre le système. S’ensuit une gigantesque poursuite, tous chevaux dehors, faite de bruit et de fureur.
On sentirait presque le pneu brûlé, l’essence et le cambouis tant ce délire visuel hypnotise. Le réalisateur a privilégié les cascades réelles et évité au maximum les images de synthèse. Cela se voit. La 3D, pour une fois, est parfaite, et la bande son, illustrée par un guitariste aveugle jouant de son instrument enflammé sur un poids-lourd lancé à pleine vitesse, colle au propos. Une image déjà culte.
Cette ode punk, anarchiste et féministe (l’héroïne incarnée par Charlize Theron est la seule à refuser le système) fait mouche chaque fois qu’elle frappe. Brillant et déjanté, le film laisse l’impression d’une totale liberté créatrice, catharsis des années passées par George Miller à Hollywood à policer son propos. Tom Hardy, comme d’habitude, tout en présence muette, incarne un Max sans humour, reptilien et nietzschéen.
Sous le blockbuster se cache un vrai film d’auteur, une perception de l’époque rare pour ce genre de produit. On en sort essoufflé, épuisé, avec pour seule idée d’y retourner, de se laisser emporter à nouveau par cette BD monstrueuse, ce tourbillon délicieux.
Christophe Chohin