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Podcasts : quand le plaisir féminin est au centre du jeu


Les initiatives pour défendre une sexualité libre pour les femmes se sont multipliées ces dernières années, mais le sujet est longtemps resté dans l’ombre. (Phto DR)

Où en sont les femmes avec leurs désirs et leur plaisir? Face à la pornographie centrée sur les hommes, les podcasts érotiques trouvent de nombreuses auditrices à travers des contenus toujours «hot» mais plus «éthiques».

Récits sensuels originaux, séances de masturbation ludiques ou pédagogiques… Les podcasts érotiques destinés aux femmes se multiplient ces dernières années en offrant une alternative à la pornographie traditionnelle qui se veut plus en accord avec leurs désirs. «Le porno montre toujours les mêmes pratiques, les mêmes schémas, centrés sur le plaisir de l’homme», déplore ainsi Charlotte, 34 ans.

Depuis un an, cette responsable commerciale parisienne utilise les audios érotiques «comme moyen de stimulation» alternatif. «Les contenus sortent des clichés, sont respectueux et mettent en avant le plaisir de tous», approuve-t-elle.

Le Son du Désir en France, Ferly au Royaume-Uni, Dipsea aux États-Unis… De nombreux acteurs se sont lancés sur ce créneau ces dernières années, notamment encouragés par l’émergence dans la société du sujet de la sexualité féminine, dans le sillage du mouvement #MeToo.

« Un sujet encore très accaparé par les hommes »

«La sexualité est un sujet encore très accaparé par les hommes, c’est important que les femmes soient aussi entendues dessus», estime Constance Parpoil, responsable éditorial Europe de Storytel. Cette plateforme suédoise de livres audio vient ainsi de lancer Steamy, une collection de dix nouvelles érotiques, rédigées par dix autrices.

Histoires tendres ou osées, sons de couples en pleins ébats ou séances de masturbation qui répondent à une problématique (par exemple, «je ne parviens pas à jouir seule») : la plateforme Femtasy propose plus de 300 audios, sur abonnement. «On veut prouver que le porno peut être éthique et féministe», commente Sarah Herbain, responsable France de cette start-up allemande, qui a séduit 60 000 utilisatrices depuis son arrivée dans l’Hexagone l’an dernier. «Dans les histoires, par exemple, le consentement est toujours exprimé ou décrit».

L’importance du consentement

Pour Marie, 35 ans, la présence du consentement dans le récit «est vraiment le premier critère» auquel elle se réfère pour choisir un audio érotique. Autre facteur qui l’a encouragée à se tourner vers ce produit : «Je peux l’écouter en me disant que personne n’a été maltraité en le réalisant», souligne cette Alsacienne.

Le secteur du porno, terni par des affaires de violences sexuelles, a été épinglé dans un récent rapport sénatorial, dénonçant «l’enfer du décor». Pour éviter d’être confrontées à des images violentes, les femmes se tournent souvent vers la littérature érotique, relève Alexia Bacouël, sexothérapeute. Un genre marqué par le succès planétaire de la saga Fifty Shades of Grey.

Les contenus sortent des clichés, sont respectueux et mettent en avant le plaisir de tous

Cette spécialiste de la sexualité féminine voit d’un bon œil l’arrivée sur le marché de ces podcasts érotiques : «Ils ont un côté déculpabilisant» car ils permettent «aux femmes de se dire qu’elles peuvent écouter des choses crues». En outre, «il s’agit d’une manière d’aller chercher de la sensualité, de fantasmer et de devenir actrice de sa sexualité», ce qui est encore loin d’être le cas de toutes les femmes, estime Alexia Bacouël.

Les initiatives pour défendre une sexualité libre pour les femmes se sont multipliées ces dernières années, mais le sujet est longtemps resté dans l’ombre. Ainsi, jusqu’à très récemment, les femmes étaient «moins socialisées à la sexualité», ce qui a un impact sur le désir, décrit Rébecca Lévy-Guillain, doctorante en sociologie à l’Ined et à Sciences Po. «Lorsqu’on interroge des femmes pour des enquêtes, très souvent, elles ne savent pas ce qu’elles aiment», observe-t-elle. Les plus jeunes, qui ont accès facilement à des ressources sur le sujet, notamment sur Internet et les réseaux sociaux, pourraient être moins confrontées au problème.

Des séries pour les plus de 50 ans

Plusieurs sociétés de production d’audios érotiques destinés aux femmes constatent d’ailleurs que la majorité de leurs auditrices ont entre 16 et 35 ans. Face à ce constat, Voxxx, l’un des pionniers français du secteur, a décidé de lancer une série destinée aux plus de 50 ans. «Certaines femmes de cette génération n’ont pas vécu pleinement leur sexualité. On a vraiment eu envie de les aider à se retrouver», explique Lélé O, cocréatrice de Voxxx, qui cumule 230 000 écoutes mensuelles pour ses podcasts, accessibles gratuitement et sur abonnement. Cette nouvelle série est disponible depuis hier, Journée mondiale de l’orgasme.