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« Ocean’s 8 » : une escroquerie au féminin


Sandra Bullock, Cate Blanchett, Anne Hathaway, Mindy Kaling, Sarah Paulson, Awkwafina, Rihanna, Helena Bonham Carter... C'est un véritable casting de rêve que s'est offert Gary Ross pour Ocean's 8. (Photo : DR)

Réalisé par Gary Ross, Ocean’s 8 est, en version 100% féminine, un spin-off de la saga Ocean’s créée par Steven Soderbergh. Malheureusement, ça ne pétille jamais.

« Quand j’ai reçu le scénario, je ne me suis pas dit : « Super, un film de femmes! » Je n’ai jamais pensé ma carrière en ces termes, sauf quand le fait d’être une femme me fermait une porte. Mais en arrivant sur le plateau d’Ocean’s 8, j’ai compris que je n’avais jamais, jusque-là, travaillé dans un film de femmes. Le problème est là, même si ce film a été initié par deux hommes. Ne l’oublions pas…» Ces mots sont ceux de Cate Blanchett; Oscar de la meilleure actrice en 2014 pour sa prestation dans Blue Jasmine de Woody Allen.

Ocean’s 8, c’est une rareté à Hollywood où, le slogan «business is business» y étant la règle d’or, un long métrage avec huit femmes dans les rôles principaux tient du prodige, du miracle – pour mémoire, on rappellera que le réalisateur français François Ozon avait signé Huit Femmes en 2001 avec, entre autres, Catherine Deneuve, Fanny Ardant et Isabelle Huppert…

Avec Gary Ross, on a droit à une variation féminine pour une escroquerie. Outre-Atlantique, certains ont voulu voir en Ocean’s 8 un prolongement, un clin d’œil au mouvement #MeToo né dans la foulée de la chute du producteur nabab Harvey Weinstein. Et voilà un film où les filles font leur numéro, un film qu’on appelle «spin-off» parce qu’il est dérivé d’une saga – en l’occurrence, Ocean’s 11, 12 et 13 de Steven Soderbergh. Mieux : la saga «soderberghienne» emmenée par George Clooney s’était arrêtée voilà dix ans… mais les studios Warner Bros ne voulaient pas en rester là. Problème : Soderbergh ne souhaitait pas tourner un quatrième volet. Qu’importe! à Hollywood, on a toujours des idées surtout quand on pressent un bon score au box-office. Ainsi, est né Ocean’s 8, une histoire d’escroquerie au féminin…

Loin des Soderbergh

Danny Ocean, le célèbre cambrioleur de casinos, est mort en 2018, mais dans la famille Ocean, l’arnaque, on l’a dans le sang! Ainsi, Debbie, la sœur de Danny, est patiente, elle sait que le temps, c’est de l’argent. Alors, pendant cinq ans, huit mois et douze jours, elle a préparé le plus gros braquage de sa vie.

De l’enseignement familial, elle a retenu le principe numéro 1 : pour monter sur un coup, il faut recruter une équipe de choc. Ça commence par une «associée» – en l’occurrence, Lou Miller. Ensemble, les deux rameutent une petite bande d’expertes : Amita la bijoutière, Constance, l’arnaqueuse, Tammy, la receleuse, Nine Ball, la hackeuse, et Rose, la styliste de mode.

Objectif du casse : dérober une rivière de diamants – valeur : 150 millions de dollars! Le bijou ornera le cou de la star Daphne Kluger lors du Met Gala, l’évènement de l’année. Oui, Debbie a un plan super cadenassé – à deux conditions : d’abord, que tout se déroule comme prévu; ensuite, que chacune des huit filles envisage de quitter la soirée avec les diamants sans avoir été inquiétée.

Pour ce «spin-off», la production et le réalisateur ont monté un casting 100 % féminin du meilleur niveau. La bande de filles est emmenée par une Sandra Bullock fidèle à son image – joyeuse, bonne copine, roublarde. Cate Blanchett est impeccable – comme d’habitude, tandis que la pop star Rihanna est convaincante… Mais Gary Ross n’a pas su faire mieux qu’un film certes efficace mais sans la moindre surprise. C’est rythmé et élégant mais, quand même, ça ne fonctionne pas plus que cela, ça ne pétille à aucun moment avec un scénario sans le (la) moindre méchant(e), on est bien loin de l’originalité de la version masculine de Steven Soderbergh. Dommage…

Serge Bressan