Entre peinture et sculpture, abstrait et figuratif, l’artiste luxembourgeois Nicolas Goetzinger, 79 ans, ne choisit pas. Il fait tout, comme «un équilibriste». Son atelier ouvre ses portes au public, ce samedi à Konz, en Allemagne.
Nicolas Goetzinger dessine depuis l’âge de 14 ans, mais c’est seulement après une carrière professionnelle de cinquante années à l’ARBED, à Belval, qu’il s’y met «sérieusement».
Il ne tient pas en place. Après une heure de discussion, l’artiste de 79 ans cache difficilement son envie de quitter la table pour retourner à ses toiles et ses sculptures en cours (six œuvres de chaque art). « Quand je suis dans mon atelier (NDLR : à Konz, en Allemagne) , je pense tout le temps à mes peintures et mes sculptures , explique-t-il. Ici, j’oublie tout, je m’évade dans mon monde. »
Et son «monde» artistique, Nicolas Goetzinger le côtoie depuis l’âge de 14 ans. « J’ai toujours aimé dessiner à l’école ou dans les cahiers de mes deux sœurs Georgette et Annie , dit le Schifflangeois de naissance. En 1950, j’ai participé aux cours de Foni Tissen à Esch-sur-Alzette. On dessinait des clowns, des fleurs, des chats, des chiens… Ma première peinture représentait les hauts-fourneaux. Malheureusement, je ne le trouve plus… C’est normal, parce qu’à l’époque, je peignais pour des membres de ma famille ou des amis. »
Durant quarante ans, l’art venait après son travail au laminoir de Belval. « J’y ai fait beaucoup de choses , se souvient-il. C’était dur, on faisait des gestes répétitifs, voire stupides, mais j’ai aimé ce travail. Même si on n’avait pas trop le choix, on pouvait partir, mais on restait pour l’ambiance, les copains. On était une vraie famille. » Aujourd’hui, encore, Nicolas Goetzinger voit ses « copains », lors des réunions de l’amicale des anciens du train VII. Et ses peintures sont souvent teintées de rouge (pour les Terres rouges), de jaune et d’orange (l’acier qui brûle). Sans oublier qu’il vit toujours à Esch-sur-Alzette : « J’y habite depuis une cinquantaine d’années, c’est ma patrie, elle est dans mon cœur. »
À l’âge de 54 ans, en 1990, Nicolas Goetzinger dit au revoir au laminoir et se lance dans une nouvelle carrière : l’art. « Il fallait bien s’occuper , plaisante-t-il. La peinture a toujours été un plaisir et à ce moment-là, je m’y suis mis sérieusement. » Il suit des cours de peinture à Luxembourg et à Worpswede (Allemagne), et se diversifie en découvrant la sculpture, lors de différentes sessions à l’Académie des beaux-arts de Trèves (Allemagne). « Grâce à ces cours, je me suis perfectionné et j’ai pris confiance en moi », souligne Nicolas Goetzinger.
«Je me laisse porter par mon inspiration»
Très vite, l’artiste enchaîne les expositions et son travail est reconnu de façon certaine. « Il a beaucoup évolué , affirme Tilly Richard-Drui, son assistante depuis une vingtaine d’années. Et surtout, il n’a pas une direction précise, il est ouvert à tout, il a de nombreuses sources d’inspiration. »
Nicolas Goetzinger est tout simplement un artiste touche-à-tout. Entre la peinture et la sculpture, l’abstrait et le figuratif, il refuse de choisir. « Pourquoi devrais-je le faire? , interroge-t-il. J’aime la peinture, j’aime la sculpture, j’aime l’abstrait, j’aime le figuratif, alors je pratique chacune de ces formes artistiques. L’art c’est la liberté. » Dans son atelier, les sculptures en bois côtoient celles en pierre, les peintures à l’huile sont voisines des toiles à l’acrylique, etc. Les genres cohabitent également.
« Quand je commence une toile ou une sculpture, je ne sais pas comment elle va se terminer , explique-t-il. Je me laisse porter par mon inspiration. J’alterne entre mes différents travaux en cours. Je suis une sorte d’équilibriste. » Mais il refuse d’expliquer ses œuvres. «La plupart du temps, je me refuse de donner un nom à mes travaux, confie-t-il. Chacun voit ce qu’il voit et même parfois des choses que je n’ai pas encore vues… Un tableau ou une sculpture doit entraîner une discussion.»
Mais là, le temps de la discussion laisse la place à celui de l’inspiration et Nicolas Goetzinger se remet à son travail.
Guillaume Chassaing
L’atelier ouvre ses portes samedi
Ce samedi 5 septembre, de 15h à 18h, Nicolas Goetzinger ouvrira les portes de son atelier (Irminenstrasse 6 à Konz, Allemagne) au grand public. Les visiteurs pourront admirer (et même acheter) les œuvres de l’artiste luxembourgeois (environ 400 tableaux et une cinquantaine de sculptures), mais également voir le maître des lieux au travail.
Nicolas Goetzinger montrera les bases du modelage et de la peinture. « Ce sera surtout l’occasion de discuter des œuvres avec les visiteurs , souligne l’artiste de 79 ans. J’ai hâte d’entendre leurs avis sur mon travail et leurs interprétations de mes tableaux et sculptures. »
Bio express
29 juin 1936 : naissance à Schifflange. Il vit depuis plus de cinquante ans à Esch-sur-Alzette et travaille depuis quatre ans à Konz (Allemagne).
1950/1951 : premiers cours de dessin, à Esch-sur-Alzette, auprès du professeur Foni Tissen.
De 1950 à 1990 : employé à l’ARBED au laminoir de Belval. Il termine sa carrière professionnelle au poste de contremaître en chef.
1997 : il se perfectionne en dessin, crayon, nu, aquarelle, acrylique, huile… à l’Académie d’été de Luxembourg.
1998/1999 : pendant deux ans, il suit les cours de peinture de Helga Hentschel-Holtendorf à Worpswede (Allemagne).
1998 : il effectue ses premières expositions de tableaux. Il les enchaîne pendant cinq années (deux par an). Et les bénéfices sont toujours reversés à une œuvre caritative.
2001 : il effectue ses premières sculptures à l’Académie des beaux-arts de Trèves (Allemagne). Pendant six années, à raison de trois semaines par an, il apprend la sculpture sur pierre, plâtre et bois.
De 2006 à 2012 : il tient une galerie d’art à Esch-sur-Alzette.
2016 : à l’occasion de son 80e anniversaire, il publiera un livre retraçant sa carrière artistique.