Le duo français Nanokill sera pour la première fois samedi au Grand-Duché, où il se produira à 20h en concert à la Kulturfabrik d’Esch dans le cadre de l’International Animal Rights Conference. Un groupe surprenant !
Une chouette en gros plan au regard fixe trône sur la pochette de True Faith, premier et, pour l’heure, seul album de Nanokill. Sorti en 2015, l’album est, avouons-le, passé sous les radars. Pourtant, il aurait mérité que, telle la chouette de la couverture, les amateurs de musique soient plus à l’affût! Car quelques jolies petites perles se cachent parmi les 13morceaux de l’album.
L’ensemble propose un savant mélange de trip-hop-electro-dark-downtempo-punk-rock-new-wave-metal-symphonique. Un cocktail détonnant pour les amateurs d’ambiances sombres et de rythmes hypnotiques. Il y a du Smashing Pumpkins là-dedans. Du The Cure. Pourquoi pas un peu d’Evanescence. Et dans les textes, que la chanteuse Ève d’Orso a écrits en anglais, en ajoutant çà et là quelques strophes en français et en allemand, il y a aussi du Orwell, du Sidney Lumet, du Noam Chomsky ou encore du Edward Bernays.
«Au départ, ce n’est pas vraiment la musique qui nous a réunis, mais un certain point de vue sur le monde», raconte la chanteuse. La légende du groupe raconte qu’elle et Axel Noon se sont rencontrés en 2009 à Barcelone, lors d’un sommet européen d’exopolitique. Ça vous pose un groupe! Il est musicien, elle a été chanteuse, avec une formation lyrique. Ni riches ni puissants, ils comprennent vite que la musique sera leur seule manière de faire passer les messages. La violence les débecte, la désinformation les révolte, la manipulation les met hors d’eux, les inégalités les insupportent.
Proches des milieux associatifs et des ONG, ils ont envie de «donner la parole aux humains», note Ève, avant d’ajouter très vite, «et aux non-humains, à tous ceux qui d’habitude n’ont pas voix au chapitre». Droits de l’homme, écologie et droits des animaux seront quelques-uns de leurs combats. Il est donc logique de les retrouver à l’International Animal Rights Conference.
Réel engagement pour la cause animale
«Je suis végétarienne depuis 2009, Axel l’était bien avant moi, et véganes depuis au moins quatre ans. C’est quelque chose qui compte beaucoup pour nous, l’antispécisme. On sait que ce sont des mots qui ne plaisent pas forcément au grand public, mais c’est juste qu’on essaye de ne plus participer au grand massacre d’animaux qui a lieu quotidiennement dans la plus grand indifférence. On refuse l’exploitation animale.»
Un message qu’on retrouve dans ce True Faith, sans jamais aller au clash, sans jamais faire la morale mais à travers de belles métaphores. À la première écoute de l’album, elles n’apparaissent d’ailleurs pas nécessairement tellement on se laisse embarquer par ces rythmes changeants et la belle voix de la chanteuse. Mais à la deuxième ou troisième écoute, on tilte. Que font les voix de Bill Clinton, de George W. Bush, de Colin Powell dans Commission Report ? Pourquoi est-il question de l’OTAN dans Demokratur ? Pourquoi est-il question d’«espèce» dans The Last One ? Et pourquoi répète-t-elle à l’envi le mot «Laudamus» dans Laudanum ? Alors on ouvre plus attentivement les oreilles, on plonge dans le livret et on comprend ce deuxième niveau d’écoute. C’est réussi.
Samedi, ils comptent donner un concert «comme un autre», malgré le contexte, tout en reconnaissant avoir prévu deux petits «plus» pour l’occasion. «Un morceau sur un sujet emblématique de la culture végane» d’abord, et une reprise de David Bowie –ils ont prévu tout un album de reprises, mais leur studio a brulé et ils ont perdu tous les enregistrements; un mini-CD 4 titres devrait néanmoins sortir en novembre– avec «une vidéo en hommage au milieu associatif des droits des animaux». Mais le concert est ouvert aux non-véganes, assurent-ils, en précisant : «Nous sommes des musiciens véganes et pas des véganes qui font de la musique.»
Pablo Chimienti