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[Musique] Olivier Rocabois : top of the pop!


En avril 2021, sans prévenir, sortait un bijou «made in Hexagone», aussi surprenant que celui façonné par Maxwell Farrington & Le SuperHomard, sorti seulement quelques jours plus tard (Once).

La France, nouvelle terre promise pour la pop baroque? Apparemment oui, du moins si l’on se fiait aux neuf titres réunis sur Olivier Rocabois Goes Too Far, album aux allures de classique qui lorgnait franchement sur David Bowie, les Beach Boys, les Beatles ou Neil Hannon (The Divine Comedy), figures respectées pour leurs mélodies entêtantes et leurs trouvailles harmoniques. Son auteur? Un inconnu à l’appellation qui fleure bon le Québec et à la tête, sur la pochette, aux airs lointains de José Garcia. Un joyeux luron qui, sur un morceau, disait vouloir réussir sa sortie «avec panache». Même si, avec lui, il serait plutôt question d’affirmation.

Face à ses références aux noms prestigieux, Olivier Rocabois est en effet décidé à imposer le sien. Ou comme il le précise sur le site de crowdfunding Ulule, «à sortir des cavernes de l’underground». Torche en main, c’est vrai qu’il les a arpentées de long en large, vingt années durant. On ne compte plus – et lui sûrement non plus – les groupes qu’il a fondés, de Rennes à Paris (Slove, All If, Kool Bandits pour les plus connus). Il confirme : «J’écris des chansons depuis la fin de l’adolescence. J’ai dû en pondre 200!» Des titres aujourd’hui tombés dans l’oubli, contrairement à ses productions post-covid, incrustées au plus profond de l’oreille, dont notamment cet EP de belle tenue, The Pleasure is Goldmine (2022). Avec The Afternoon of Our Lives, il vise encore plus haut, dans une ambition à la fois «simple et démesurée» : «offrir un disque historique».

Sa cagnotte achevée en décembre 2023 (13 331 euros réunis tout de même), il peut donc s’atteler au challenge, débuté aux mythiques Studios de la Frette dans le Val-d’Oise (fréquentés par les Arctic Monkeys, Marianne Faithfull, Nick Cave…). Six premières chansons y sont mises en boite, et donneront à l’album la teinte en clair-obscur désirée : celle d’un homme qui arrive aux carrefours de sa vie (le fameux «après-midi») et qui fait le point sur son insouciance passée et les affres à venir. Une crise de la cinquantaine qu’Olivier Rocabois aborde de façon «exaltée», et dans une «gaieté de cœur inédite». «Je n’ai jamais été aussi heureux et créatif, lâche-t-il encore sur Ulule. J’ai l’impression de vivre un âge d’or.»

Sans mon équipe, je serais un énième Brian Wilson du dimanche qui joue sur un piano de location

En résultent onze compositions qui jouent avec la lumière et l’ombre, précises et, c’est important, jamais faciles. Dessus, si l’on y parle d’usure et du temps qui passe, il est également question de libération : celle d’un artiste qui ne cache plus sa bedaine, ni son front dégarni, et qui assume pleinement le port de la moustache. Musicalement, Olivier Rocabois reste dans les standards qu’on lui connaît : une structure faite de piano et de guitare, qui s’enrichit de chœurs et de violons. Le tout avec subtilité, à l’image de cette voix (en anglais) qui n’en fait jamais trop, ou de ces arrangements qui évitent la surcharge. Un travail d’une folle élégance qui ne pouvait pas se faire seul, comme il le reconnaît : «Sans mon équipe, je serais un énième Brian Wilson du dimanche qui joue sur un piano de location dans un appartement-témoin!»

Loin de sa Bretagne natale, mais toujours proche de l’Angleterre, terroir qui l’inspire, l’artiste passe ici un nouveau cap avec ses hymnes ciselés et un peu dingues, prouvant toute l’originalité de l’animal malgré ses repères évidents (la pop, le psychédélisme, le glam-rock). Ainsi, gonflé à bloc, il n’hésite pas à glisser au milieu de The Afternoon of Our Lives une belle et audacieuse «opérette» de huit minutes (Prologue / Trippin’ on Memory Lane), qui se joue des formats habituels et des formes routinières. Dans un dernier geste libre, il termine son offrande avec un instrumental au nom qui, paradoxalement, en dit long (Lifetime Achievement Award Speech). Oui, Olivier Rocabois n’a plus rien à ajouter et doit désormais assumer son statut, acquis avec patience et persévérance. Il le sait, mais ne s’en inquiète pas, fidèle à cette conviction que les plus beaux jours sont encore devant lui.

Olivier Rocabois – « The Afternoon of Our Lives »

Sorti le 31 mai

Label December Square

Genre pop