Depuis quatre ans, et à travers deux albums explosifs et entêtants, Mathieu Flasse (guitare) et Rémy Venant (batterie) s’amusent aux sorciers chamans avec un son brut qui s’ouvre à la transe. Deux sauvages aux élans «noise» qui ouvrent les Congés annulés, vendredi. Entretien.
La Jungle, c’est quoi ce nom ?
Mathieu Flasse : On n’a pas trouvé ce nom toute de suite. On cherchait quelque chose qui transpire quelque chose de tribal, de sauvage aussi.
Rémy Venant : D’ailleurs, ça a failli être La Plage, ou mieux, Orang-Outan (il rit). Finalement, le nom La Jungle est venu dans le van, lors d’un de nos tout premiers concerts. La raison ultime de ce choix? Je n’en sais rien. Peut-être un mélange entre rythmes tribaux et sorte de chamanisme. C’est très cliché, finalement!
La Jungle, c’est minimaliste ?
M. F. : Au début, on ne comptait pas seulement être à deux, mais on n’a pas trouvé quelqu’un qui avait notre motivation, notre investissement… Du coup, ce format, pour partir en tournée, c’est quand même plus simple! Il y a moins de compromis à faire… D’un point de vue musical, oui, on s’amuse avec les boucles, répétitives, mais il faut le dire, il y a des groupes aux approches nettement plus minimales que nous.
R. V. : Personnellement, le format du duo m’a toujours plu. Bon, plus Lightning Bolt que White Stripes, quand même! C’est fun, vivant, rentre-dedans et ça reste très créatif. Musicalement parlant, on part en effet de choses très simples, mais c’est aussi pour les rendre plus complexes. D’ailleurs, on ne se coltine pas l’étiquette « math-rock », genre groupe un peu prise de tête, pour rien…
La Jungle, c’est animal, sauvage ?
M. F. : Oui, il y a une certaine sauvagerie dans quelques chansons. Sur scène, aussi, on essaye de se donner à fond. Il suffit de voir l’état de nos tee-shirts à la fin des concerts pour le comprendre…
R. V. : Oui, et c’est aussi pour cela que l’on met un frein quand on nous propose de grandes scènes. La Jungle, ça fonctionne mieux dans un rapport direct au public, dans des contextes plus intimistes, à échelle humaine. Pas besoin d’avoir du gros son et 2 000 personnes en face de vous pour que ça marche. Être 25, un lundi soir, dans un lieu improbable, ça me plaît! Cette proximité permet justement de développer avec le public quelque chose de sauvage. Pas sûr, parallèlement, que lancer un « merci, je vous aime » à 40 000 personnes soit aussi très honnête…
La Jungle, ça tourne en boucle ?
M. F. : Oui, tout à fait. On s’amuse en effet avec une pédale de « loops », des boucles limitées par un certain nombre de secondes d’enregistrement. Sur cette base, on les étire au maximum, on les ralentit, on les accélère… Parfois, on s’y laisse emporter, mais c’est aussi pour mieux briser la transe. D’un claquement de doigts, passer à quelque chose de radicalement différent.
R. V. : Ben oui, ce n’est que ça finalement… D’ailleurs, c’est pas mal comme « punchline »! Mathieu boucle un son, une ligne, à la guitare, et moi, à la batterie, j’appuie celui-ci ou je m’en éloigne. Sur les réseaux sociaux, on a pris quelques critiques, et j’en ai retenues deux : d’abord, qu’on était des mythomanes, et ensuite, qu’on faisait de la musique abrutissante. Eh bien, c’est ça, la boucle : quelque chose d’entêtant qui fait croire aux gens que les musiciens en font des tonnes, alors que non… Oui, La Jungle tournera toujours en boucle : on est condamné à cela (il rit).
Entretien réalisé par Grégory Cimatti
Retrouvez l’intégralité de l’interview dans Le Quotidien papier de ce mercredi