Comme pour rattraper le temps perdu, le réalisateur américain Terrence Malick revient sur les écrans avec Knight of Cups, attaque contre la folie de Hollywood, qu’il a fuit pendant vingt ans avant d’y revenir en roi.
Rick, scénariste à Hollywood, se perd en excès. Entre fêtes, drogues et remise en cause, il cherche un sens à une vie faite de futilités.
De film en film, Terrence Malick remet en cause les modes de narrations classique. Comme s’il avait atteint, avec Le Nouveau monde, en 2005, l’apogée de son art classique. Depuis dix ans, le réalisateur américain s’efforce ainsi de déconstruire ses récits. Avec succès dans The Tree of Life, avec beaucoup moins de réussite dans To the Wonder.
Sans doute conscient des limites de l’exercice, Terrence Malick a choisi, pour ce Knight of Cups, de se concentrer sur un seul destin, celui de Rick, incarné par un Christian Bale des grands soirs. Avec sa caméra en mouvement permanent, au son entêtant de l’Exode de Wojchiech Kilar, Malick suit son héros avec le regard d’un dieu omniscient.
Maîtrise et certitudes
Il frôle alors, comme dans ses plus beaux films, cette perception du sensible, cette alacrité de l’instant. À chaque plan, le divin côtoie le profane, le sublime s’éteint dans le pathétique. À chaque plan, Malick montre qu’il est un cinéaste à nul autre pareil. Il tente de montrer l’immontrable, de suggérer l’impalpable. Toujours au bord de la rupture, aux limites de l’expérimentation, il ne perd pas pour autant le fil de son récit.
On pourra reprocher le maniérisme, le systématisme de la mise en scène. Mais elle n’est que maîtrise et certitudes. À la limite du cinéma expérimental mais sans tomber dans ses travers, ce Knight of Cups est une leçon du savoir-faire du vieux Terrence. Il est un des rares à être capable, aujourd’hui, de montrer la transcendance, de parler, sur pellicule, de métaphysique avec des images simples.
Le montage, la lumière, le rythme, tout n’est que limpidité et le résultat s’inscrit durablement dans l’inconscient du spectateur. Il laisse aussi espérer que le prochain Malick, Voyage of Time, un documentaire sur le big bang, actuellement en post-production, relève de la même expérience. À 72 ans, Terrence Malick semble avoir encore beaucoup à dire.
Christophe Chohin