Ce sera la sortie luxembourgeoise de la réouverture des salles, le 17 juin : ce film de science-fiction familial réalisé en Croatie et coproduit par la société luxembourgeoise Wady Films compte bien déconfiner les petits et les grands dans une aventure interplanétaire.
Les cinémas du Grand-Duché rouvrent mercredi prochain. Avec de nouvelles mesures de sécurité, bien sûr, mais un catalogue plus neuf, varié et qualitatif que le meilleur ami du confinement, Netflix. Et une nouvelle sortie «made with Luxembourg», Mäi Bopa vum Mars, une jolie petite aventure de science-fiction pour enfants, petits et grands, qui porte en elle une valeur symbolique et la certitude qu’en ces temps incertains, le cinéma va et doit continuer d’exister au Luxembourg et dans les petits pays européens où l’art et l’industrie ont encore du mal à trouver leur place à l’international.
«J’ai beaucoup de chance, affirme, soulagé, Adolf El Assal. Le film devait sortir le 6 mai, maintenant il sort le 17 juin. Ce n’est qu’un décalage de six semaines.» Avec sa société Wady Films, basée à Kehlen, le coproducteur luxembourgeois de Mäi Bopa vum Mars se félicite que le long métrage de la Bosnienne Marina Andree Skop et du Croate Drazen Zarkovic puisse être visible dès que les salles du pays accueillent de nouveau leur public.
Un film à hauteur d’enfant
Pour Adolf El Assal, l’implication de Wady Films dans le projet remonte à plus de deux ans, lorsqu’il rencontre ses producteurs croates à Bruxelles, «lors d’un forum de coproduction», alors que lui-même présente le projet de film qui deviendra son deuxième long métrage, Sawah.
«Je me suis très bien entendu avec eux et ils m’ont présenté un projet en disant qu’il pourrait m’intéresser. J’ai lu le scénario, que j’ai tout de suite adoré. Je me suis dit que ce serait chouette de monter à bord d’un tel projet, qui était parfaitement en phase avec ce qu’on pouvait apporter au niveau du financement, du planning, etc. Ensuite, on l’a présenté au Film Fund, qui venait de mettre en place l’aide Cineworld, dont Mäi Bopa vum Mars a été le premier film à profiter.»
La suite? Des festivals – Sarajevo, Thessalonique, Varsovie ou encore le festival Cinekid d’Amsterdam, «le Cannes du cinéma jeune public» – et une sortie en salles l’année dernière pour les plus chanceux.
Avec ce film de science-fiction familial réalisé en Europe de l’Est, Wady Films prouve que les projets cinématographiques dans lesquels s’implique le Luxembourg sont capables de repousser les frontières géographiques, mais aussi celles du genre. Mäi Bopa vum Mars est en effet un très joli objet qui joue du fantastique avec talent sans se complaire dans son appellation «jeune public».
Au lieu de regarder son public de haut, le film se met, comme son héroïne, à hauteur d’enfant, où l’innocence se substitue à l’ignorance. Les plus grands prendront aussi plaisir à y découvrir un hommage ludique et réussi au cinéma familial américain des années 1980, mené par Steven Spielberg et sa société Amblin, dont le logo emprunte la fameuse silhouette d’E. T. sur un vélo avec le jeune garçon qui devient son ami.
Cette image est d’ailleurs elle-même réinventée dans Mäi Bopa vum Mars, qui distille aussi quelques clins d’œil à Back to the Future, The Goonies, The Neverending Story et The Twilight Zone. Une jolie perle pleine d’émotion, aux effets spéciaux élégants, à découvrir dans l’obscurité d’une salle.
Valentin Maniglia
Mäi Bopa vum Mars, de Marina Andree Skop et Drazen Zarkovic. Sortie le 17 juin
«Il y aura moins de coproductions après la crise»
Pour Adolf El Assal, la sortie de Mäi Bopa vum Mars équivaut à voir enfin la lumière au bout d’un long tunnel. «L’arrêt de l’activité nous a fait très, très mal», reconnaît-il. Le réalisateur et producteur, que l’on connaît notamment pour Sawah (disponible depuis peu sur Netflix), se confie sur cette période de brouillard, avec un certain recul qu’il est bon d’entendre.
«Je devais être l’un des réalisateurs principaux sur une très grosse série en Belgique, et le premier jour de tournage se trouvait être… le premier jour du confinement (il rit). C’était frustrant, tout avait été préparé pendant des mois. On espère pouvoir redémarrer en août ou en septembre.»
Le producteur et fondateur de Wady Films en profite aussi pour réfléchir à l’avenir des coproductions, qui définissent pour beaucoup le paysage cinématographique luxembourgeois. Après la crise, pourra-t-on compter sur une coproduction entre sept pays comme Mäi Bopa vum Mars? «Je suis un peu pessimiste, mais il y aura moins de coproductions après ça. Chaque pays vit selon ses propres mesures, et avec une coproduction, il faut vraiment savoir s’adapter. On ne sait pas comment les choses vont se passer, mais je crois que petit à petit et de plus en plus, les pays s’adapteront pour moins dépendre des coproductions. Ce sera dommage, mais en même temps c’est un avantage pour les productions locales, qui soulèveront plus de moyens pour pouvoir financer leurs films dans leur pays d’origine.»
Adolf El Assal ajoute : «Au Luxembourg, on a des techniciens hors normes, des acteurs géniaux, quelques réalisateurs qui commencent à avoir un niveau international. Il ne faut pas qu’on ait peur de se montrer, et j’ai l’impression que petit à petit, on va se tourner plutôt vers ça.»
En attendant de pouvoir reprendre tous les projets arrêtés par la crise, il prépare son «prochain long métrage en tant que réalisateur» dont l’histoire, qu’El Assal assure être «très chouette», est encore tenue secrète. «Si tout va bien, on tournera l’été prochain entre le Luxembourg, le Canada et l’Égypte.»
V. M.