Après des records d’audience sur RTL et un succès inattendu sur Netflix, la série Capitani revient pour une seconde saison, qui prend ses quartiers en ville. Ambiance sur le tournage, qui s’est achevé cette semaine.
On va tourner, on enlève les masques!» Entre la rue Bender et celle du Fort-Wallis, à Luxembourg, le cri résonne et saisit les alentours. Les badauds, sortant mollement des bus, stoppent un temps leur course quotidienne pour observer, l’œil curieux, l’étrange agitation. Des talkies-walkies qui grésillent, une caméra, une perche pour le son et tout autour, des gens excités qui prennent position : pas de doute, on est sur un tournage! Certains reconnaissent le comédien Luc Schiltz, sortant du Shayan Market pour s’embrouiller avec trois mecs. La scène se répète plusieurs fois, dans de mêmes gestes hargneux. La série Capitani arrive en ville et joue déjà des épaules.
C’est qu’elle a de quoi se sentir en confiance : après une très belle réussite sur RTL entre octobre et décembre 2019 (plus de 150 000 spectateurs par épisode), ce thriller policier «made in Luxembourg» en a remis une couche sur Netflix en février dernier, devenant, en un rien de temps, numéro 1 en Argentine, en Uruguay et en Grèce. «Ce n’est pas la cerise, mais le pamplemousse sur le gâteau!», rigole sous son masque Thierry Faber, son «showrunner» (sorte de directeur de série) qui n’en revient toujours pas. «C’est assez fou. Ça nous a même dépassés, car c’est arrivé très vite.» Plus pragmatique, il reconnaît qu’une telle opportunité est toujours «bonne à prendre».
«Aujourd’hui, ça va être rock’n’roll!»
Elle permet en tout cas de prolonger les réjouissances avec une seconde saison dont le tournage s’est fini jeudi après 60 jours d’activité dans le quartier Gare. Au 57e, on trouve toujours Christophe Wagner derrière la caméra, entouré par «une petite armée hiérarchisée», aux tâches bien «précises» : script, maquilleuse, coiffeur, machiniste et assistants à la pelle se croisent dans un courant d’air, «sans se marcher sur les pieds». «Il faut juste faire attention aux bus!», soutient dans un souffle un technicien pressé. L’affaire du matin mobilise en tout cas une vingtaine de personnes sur place, et autant en coulisses pour la logistique.
Sur un petit écran, on découvre que le capitaine Luc transpire à grosses gouttes, semblant fondre dans un pull en laine pas vraiment de saison : «Voyez comme il est habillé, le pauvre!», confirme Thierry Faber avouant, malgré la chaleur, que la série «n’est pas censée se dérouler en été». Au loin, les grondements d’un orage menaçant replacent le décor, et inquiète. «Aujourd’hui, ça va être rock’n’roll!», confie un membre de l’équipe, concentré sur son téléphone et la météo. Alors, on se remue plus que d’habitude pour filmer la scène, soit deux heures et demie de travail pour une minute à l’écran… Mais elle est d’importance, explique le «showrunner» : elle installe la rencontre entre les deux personnages principaux.
Juste deux cas contacts : «Une chance terrible»
Un premier épisode – il y en aura douze au total, comme pour la première saison, d’une durée de 25-30 minutes chacun – où l’on découvre donc une nouvelle figure, un certain Dominique : «On va le voir souvent, mais on n’en dira pas plus!», reprend Thierry Faber. Seule certitude de l’histoire, avec cette implantation en plein cœur de la capitale : Capitani change d’environnement et d’humeur. Fini, en effet, le cadre boisé du village de Manscheid, place à l’apprêté de la ville pour une série qui devient plus «urbaine et cosmopolite». En retrait du plateau – «ici, c’est le royaume du réalisateur, pas du producteur!» –, Claude Waringo confirme l’évolution : «On a voulu moins protéger nos personnages, les confronter à une réalité plus dure.»
Un choix décidé, aussi, après quelques mauvais retours : «On nous avait reproché de n’avoir que des Luxembourgeois dans la première saison. Là, ils vont être servis!», enchaîne l’homme de chez Samsa. Pour preuve, des figurants du Cap-Vert ou d’Afrique du Nord qui attendent, dans un ennui profond, les consignes, comme le Marocain Hicham, retenu au casting après une annonce sur Facebook. «Ça permet de faire un peu d’argent», explique-t-il, avant, lui aussi, d’essuyer la sueur qui perle sur son front. La matinée s’achève alors comme elle a commencé : sur un faux rythme, entre attente et mouvement soudain, entrecoupée par des «nouveau plan», «moteur, s’il vous plaît» et «attention, action!».
Entamé mi-mars, le tournage s’est donc terminé cette semaine, sans trop de problèmes. La plus grosse «crainte» – un covid positif parmi les acteurs – a été évité. Seuls deux cas contacts parmi l’équipe technique ont été enregistrés – «une chance terrible!», clame-t-on sur place. Maintenant, avant la diffusion sur RTL, prévue le 22 février 2022, «il reste huit mois de travail intense», comme le détaille le «showrunner» : le montage (image et son), la musique, le mixage, l’étalonnage, suivis de toutes «ces petites choses» qui font le marketing. Lui qui a déjà vu et revu de nombreuses fois les rushs sent, en tout cas, que l’affaire se présente bien : «On a tous l’impression que ça part dans la bonne direction!»
«Netflix n’a pas encore signé pour la saison 2»
Claude Waringo est de ceux-là : «Je trouve que les dialogues, comme les face-à-face, sont plus dessinés. On a fait un pas en avant en termes d’écriture, de jeu…» Reste à savoir si cette seconde saison saura trouver son public et le même succès que la première. Sur la question, Thierry Faber reste modeste : «Il faut être réaliste : ce qui est arrivé, c’est assez unique! Alors oui, ce serait compliqué, voire audacieux, de dire que l’on va faire aussi bien. Ce qui serait chouette, c’est que les gens qui ont regardé la première saison prennent du plaisir à voir celle-ci.» Une autre victoire, plus personnelle celle-ci, serait que ses amis arrêtent de croire que «la langue luxembourgeoise, c’est juste un patois parlé par des vieux dans le Nord!».
De son côté, Claude Waringo espère que la bonne étoile de Samsa continuera de briller (NDLR : après le succès récent du documentaire Colectiv ou la présence à Cannes, début juillet en compétition officielle, de Where is Anne Frank), et que Netflix diffuse Capitani 2, ce qui «n’est pas encore signé». Car avec le géant du streaming, «ça peut soit être très rapide, soit s’arrêter brutalement», confie le producteur, qui reste toutefois optimiste. Déjà, parce que la plateforme «est la seule qui s’intéresse aux séries locales un peu en marge», comme c’est le cas en Belgique pour La Trêve. Ensuite, parce que cette seconde saison est tout simplement «meilleure», dit-il en tant que «spectateur». Enfin, parce que la première a posé de «bonnes bases», et que le public ne devrait pas bouder la suite. Une idée qui devient concrète quand Luc Schiltz salue, pour la blague, une voiture de police passant par là, qui lui répond alors d’un coup de klaxon. Oui, cela s’annonce bien.
Saison 1
1er octobre 2019 Diffusion sur RTL
158 000 personnes par épisode sur RTL
(soit 1,5 million sur la saison, en comptant les «replays»)
11 février 2021 diffusion sur Netflix
N° 1 en Argentine, en Grèce et en Uruguay
Top 10 dans 46 autres pays
Saison 2
60 jours de tournage
3,8 millions d’euros de budget
100 000 euros consacrés au «protocole» Covid
12 épisodes d’environ 26 minutes
22 février 2022 Diffusion sur RTL