Ce week-end, l’OPL et l’OCL donneront leurs concerts du nouvel an. Leur particularité : ils seront diffusés en streaming. Une contrainte qui sous-entend qu’il n’y aura ni public ni feux d’artifice, mais qui prouve que la scène est toujours là.
C’est un évènement qui résiste à la fermeture des salles de concert, une tradition que même la pandémie, si elle l’a reporté, n’a pas su annuler. En 2021, les concerts du nouvel an redoublent de symbolique : ils ferment définitivement l’interminable chapitre 2020 de notre histoire et en ouvrent un nouveau… en streaming. L’entrée dans la nouvelle année se fait donc sous le signe de la distance, de la prudence – «et surtout la santé !», comme on dit – mais, surtout, d’une envie, plus que jamais, du retour au «live». Au Luxembourg, les deux concerts programmés ce week-end sont ceux de l’Orchestre philharmonique du Luxembourg (OPL), ce soir, et de l’Orchestre de chambre du Luxembourg (OCL), dimanche après-midi.
Après une année qui a vu se multiplier les initiatives en ligne, prévoir un concert en streaming n’était pourtant pas au programme des deux orchestres, qui ont dû se réadapter à la situation. Pour l’OCL, c’était avant tout «une question de moyens», indique Corinne Rosé, administratrice de l’orchestre. «Si on peut faire ça aujourd’hui, c’est grâce au CAPE, qui met les moyens pour qu’on puisse jouer en streaming. Pour ce concert, c’est la salle qui a invité l’orchestre à jouer le concert de Nouvel an» et qui s’est occupé de mettre en place les équipes techniques permettant la retransmission en direct. L’OPL, en revanche, a déjà testé le streaming en 2020; le manager de l’orchestre, Patrick Coljon, assure que l’équipe de la Philharmonie a «pris les devants» en ce qui concerne le passage du «live» à la diffusion en ligne, «pour pouvoir quand même présenter un concert du nouvel an à notre public».
Ce concert garde l’empreinte des fêtes de fin d’année mais amène aussi un regard sur l’avenir et la nouvelle année
Puis avec les questions techniques viennent aussi celles des conditions du concert. Si Patrick Coljon admet que les musiciens «se sont habitués» à l’absence de public et aux distances de deux mètres à respecter sur scène, «ce n’est quand même pas la même ambiance». «Sans le public, ce n’est pas la même chose. On sait que les gens nous regardent de chez eux, ce qui est chouette, mais il n’y a pas cette chaleur dans la salle, pas d’applaudissements, c’est un peu plus stérile.» De là à déstabiliser les musiciens, le chemin est encore long. «Le pire pour un orchestre, rappelle le manager de l’OPL, c’est de ne pas jouer.» Voilà quand même un point positif. Mieux : le streaming offre à l’orchestre «l’occasion de continuer à jouer et de progresser encore et toujours. Si un orchestre s’arrête pendant quelques semaines ou des mois, la reprise est plus dure, sans compter les mesures de distanciation qui rendent la reprise plus difficile encore».
Une pensée secondée par Corinne Rosé, qui ajoute pour sa part que le concert de l’OCL a «tout un historique». Initialement prévu comme un concert de Noël, avec les trois premières cantates de l’Oratorio de Bach, le programme a dû être remanié «pour qu’il garde l’empreinte des fêtes de fin d’année mais qu’il amène aussi un regard sur l’avenir et la nouvelle année», et à la suite de l’impossibilité de faire jouer les choristes de l’ensemble vocal du Conservatoire du Nord par manque de place : «Les choristes auraient dû jouer avec le masque», précise-t-elle. L’Ortaorio de Noël est néanmoins resté «le squelette» de ce nouveau programme, avec des solistes pour remplacer le chœur, et en y greffant de nouveaux airs «parfaits pour la période» : «Le Messie de Haendel, une cantate de Bach, très festive, lumineuse, que Bach avait composée pour un mariage, et L’Hiver, tiré des Quatre Saisons de Vivaldi.»
En 2021, on aimerait pouvoir faire autre chose que du streaming
Pour les orchestres, finalement, 2021 commence plus ou moins là où 2020 s’est terminée : avec des contraintes auxquelles il faut se soumettre, et des défis à relever. Mais «le fait de jouer, déjà, c’est formidable», reprend l’administratrice de l’OCL. Même son de cloche du côté de l’OPL : «Les musiciens font de la musique ensemble, c’est le plus important.» Avec un bémol toutefois, pour Patrick Coljon : «Tout ce que les musiciens faisaient à côté – musique de chambre, récitals… – est annulé pour l’instant. Cela joue aussi beaucoup dans le maintien de la forme, l’envie de jouer, la préparation…»
Puisque l’on doit respecter les mesures en vigueur, les embrassades sous le gui sont interdites. Les restrictions en cette période incertaine mettent aussi en péril la prise de nouvelles résolutions, mais l’heure des vœux n’en a pas moins sonné. Pour les orchestres, le premier serait de «pouvoir faire autre chose que du streaming» en cette nouvelle année, comme le souhaite Patrick Coljon. «Et de retrouver notre effectif complet», ajoute-t-il, précisant que l’OPL tourne actuellement à «une cinquantaine de musiciens», la moitié de son effectif complet, ce qui «limite le répertoire». L’OCL partage le souhait du retour au «live» mais «se contente de peu», selon l’aveu lâché, en souriant, par son administratrice. Le streaming, conclut Corinne Rosé, «montre quand même que quand on veut faire les choses, qu’on a cette passion et qu’on croit que la musique est essentielle – pour reprendre un terme beaucoup employé aujourd’hui – on peut y arriver, même avec de petits moyens, et même si les conditions ne sont pas idéales. Sur les réseaux sociaux, on voit que le public nous attend. Cela justifie encore plus les efforts qu’on met en œuvre malgré tout pour organiser des choses.»
Valentin Maniglia
Les concerts du nouvel an :
Orchestre philharmonique du Luxembourg
Ce soir, à 20h. Sur YouTube.
Orchestre de chambre du Luxembourg
Dimanche, à 17h. Sur Facebook et www.cape.lu.