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Les ingrédients des e-cigarettes désormais consultables en ligne


Si ces substances sont couramment utilisées dans d'autres produits de consommation comme les aliments ou les cosmétiques, leurs effets lorsqu'ils sont chauffés et inhalés sont encore mal connus. (illustration AFP)

Qu’est ce qui se cache derrière les « arômes mojito », « fruits rouges » ou « menthe » des liquides de e-cigarette ? Une base de données publiée mercredi par l’Anses dresse le panorama de toutes les substances contenues dans les produits du tabac et du vapotage.

« On est la première agence européenne qui rend disponible l’intégralité de ces informations », qui doivent obligatoirement être déclarées depuis 2016, s’est félicité Matthieu Schuller, directeur de l’évaluation des risques de l’Agence nationale de sécurité sanitaire.

« Concrètement, si je suis vapoteur ou vendeur d’e-liquides et si je veux me renseigner sur un produit, je vais commencer par vérifier s’il a bien été enregistré auprès de l’Anses (…). Je peux ensuite consulter ses ingrédients majoritaires tels que déclarés et je peux enfin regarder si l’Anses a relevé des écarts dans la déclaration du fabricant pour ce produit », a précisé l’agence sanitaire.

De fait, près de 4% des produits du vapotage vendus sur le marché français (3,3% à 4,2% selon l’année) ont déclaré au moins un ingrédient interdit car cancérogène, susceptible de favoriser les mutations génétiques (mutagène) ou toxique pour la fertilité ou le développement du fœtus (reprotoxique). Dans les produits du tabac (cigarettes, tabac à rouler, cigares, tabac chauffé…) cette proportion est comprise entre 0,4% et 1,4% selon les années, et environ 0,2% comportent d’autres ingrédients interdits (vitamines, caféine, taurine…)

« Dans une moindre mesure (…) l’Agence a mis en évidence des non-conformités portant sur des émissions supérieures au seuil réglementaire pour certaines cigarettes ou une concentration trop élevée en nicotine dans certains produits du vapotage », ajoute l’Anses.

Cette base de données, qui sera actualisée « de manière mensuelle », constitue une « première étape » avant « une évaluation des risques » éventuellement liés à chacune de ces substances, précise Matthieu Schuller.

Mieux connaître les effets

Les liquides de vapotage sont généralement composés de glycérine végétale et de propylène-glycol, qui servent de support de dilution, de nicotine à différentes concentrations, et d’arômes artificiels (jusqu’à 15 dans certains mélanges). On y trouve également parfois des sucres, des édulcorants, des acides et des extraits de plantes.

Si ces substances sont couramment utilisées dans d’autres produits de consommation comme les aliments ou les cosmétiques, leurs effets lorsqu’ils sont chauffés et inhalés sont encore mal connus. Les craintes sur les risques liés au vapotage avaient été notamment alimentés par une crise de maladies pulmonaires sévères ayant fait 60 morts l’an dernier aux États-Unis. La cause a depuis été identifiée : un ingrédient ajouté pour couper les e-liquides au cannabis, l’acétate de vitamine E.

« Début 2021, on devrait avoir une idée des substances prioritaires à évaluer », estime Matthieu Schuller. Pour cela, l’agence a déjà commencé à identifier quelles molécules sont les plus problématiques et lancé des études auprès des vapoteurs pour mieux savoir quels produits sont les plus consommés et comment, et ainsi estimer à quelles substances ils sont les plus exposés. Elle réalisera aussi l’an prochain ses propres analyses sur un échantillon de produits, pour vérifier si les déclarations des fabricants correspondent à la composition réelle.

Fabricants pas assez transparents

Une première enquête réalisée par BVA, également publiée mercredi, montre notamment que près d’un tiers des vapoteurs assemblent eux-mêmes leur liquide, en achetant séparément des bases aromatisées en grands contenants et des « boosters » à la nicotine, ce qui revient moins cher que les produits prêts à l’emploi.

Or les produits qui ne contiennent pas de nicotine ne sont pas concernés par la déclaration obligatoire, donc il y a « une interrogation sur la composition de ces produits », observe aussi Benoît Labarbe, responsable de la mission tabac à l’Anses.

L’agence sanitaire souligne par ailleurs que le processus de déclaration des fabricants pourrait être nettement amélioré. Ils sont tenus de détailler la composition des produits, mais aussi les substances émises dans la fumée ou dans l’aérosol généré par le chauffage du liquide, ainsi que leurs volumes de ventes. Or pas moins de 67% de ces données n’ont pas été transmises pour les produits du tabac, et 61% pour le vapotage.

L’Anses recommande aussi à la Commission européenne d’établir une « liste validée de substances », pour éviter des « incohérences » dans certaines déclarations qui mentionnent la dénomination commerciale des ingrédients et non la substance chimique qui les compose.

LQ/AFP