Des flingues, des roses, une voix qui crisse, des tignasses qui tombent, des guitares qui s’élèvent : les Guns N’ Roses ont assuré un show de trois heures, généreux mais trop souvent mécanique, vendredi soir dans la fournaise du Stade de France.
Il a fallu attendre 24 ans pour revoir sur une scène française le groupe californien avec ses membres d’origine : Axl Rose, le chanteur au timbre aigu et au bandana rouge, Slash, le guitariste chevelu inséparable de son haut de forme, et Duff McKagan, le bassiste fan invétéré de Prince.
Il aura aussi et surtout fallu un contrat en or pour que soit actée cette reformation dans le cadre de ce « Not in this lifetime… Tour » entamé l’an dernier aux États-Unis. « Pas dans cette vie », c’est ce qu’avait répondu Rose en 2012 à un journaliste demandant si son groupe se reformerait un jour.
Pour ce groupe qui fut capable de toutes les excentricités et tous les excès au faîte de sa gloire dans la période 1987-1993, manier l’ironie va de pair en 2017 avec une légère propension, jamais vraiment abandonnée, au goût douteux. « Sans quoi les Guns ne seraient pas vraiment les Guns », entend-on d’ailleurs chez des fans invétérés dans les travées du stade.
Guns plus que Roses
Des choix contestables, d’abord observés lors du compte à rebours d’avant entrée en scène, lancé par des détonations d’armes à feux (Guns plus que Roses, donc). Difficile à entendre dans un stade, vu le contexte actuel lié aux menaces terroristes, même pour faire monter l’ambiance. Ensuite musicalement, comme ce Wish You Were Here de Pink Floyd injustement maltraité à deux guitares.
Moins coupable que l’autre guitariste Richard Fortus, qui, au-delà de la ressemblance physique, est aux Guns N’ Roses ce que Ron Wood est au Rolling Stones, Slash a tout de même brillé dans son rôle de « guitar-hero », les innombrables gros plans magnifiant sa dextérité aux cordes.
Bien plus qu’Axl Rose, assez souvent limité vocalement, c’est lui qui a surtout obtenu les vivats des quelque 50 000 fans du SDF, avec ses solos qu’il ne joue pourtant plus cigarette à la bouche depuis qu’il a arrêté de fumer.
Reprises inspirées
Sa facilité à sonner comme d’autres « dieux » guitaristes (hormis David Gilmour de Pink Floyd donc) a été impressionnante : ici Jimi Hendrix avec Voodoo Child repris en intro de Civil War, là Chuck Berry sur Johnny B. Goode, ici Angus Young d’AC DC sur Whole Lotta Rosie, là Carlos Santana en jouant langoureusement le thème du Parrain de Nino Rota sur Speak Softly Love.
Les Guns N’ Roses n’ont pas été avares en reprises, avec notamment Black Hole Sun, en hommage à son créateur Chris Cornell, ex-leader de Soundgarden récemment suicidé, et deux autres figurant depuis longtemps dans leur discographie : Live and Let Die des Wings et Knocking on Heaven’s Door de Bob Dylan, respectivement présentes sur Use Your Illusion I et II (1991).
Malgré quelques montées en puissance appréciables sur leurs propres tubes Welcome to the Jungle, You could be Mine, Sweet Child O’Mine, Night Train, Don’t Cry ou encore Paradise City, les Guns ont la plupart du temps déroulé leurs titres sans émotion.
A l’image d’Axl Rose, métal hurleur, le visage étonnamment figé par la chirurgie esthétique, malgré une débauche d’énergie incontestable à souvent courir le long de la scène, autant que changer de t-shirts, dix fois, et de chapeau, cinq fois. Histoire de rappeler que les Guns N’ Roses c’était un son, une attitude, mais aussi un sacré look dans les années 80.
Le Quotidien/AFP