Il se réinvente au cœur des plus célèbres cabarets et parodie les plus fameux titres de la «pop culture» : l’effeuillage burlesque évolue avec son temps, attirant toujours plus de monde, dans le public comme sur les planches.
Une danseuse déguisée en Princesse Leia s’effeuille aux côtés du robot R2D2, Chewbacca se lance dans une chorégraphie sexy : à l’image de ce spectacle inspiré de Star Wars, le cabaret néoburlesque s’est fait une place dans la culture populaire. Jusqu’au 24 novembre au théâtre du Gymnase Marie-Bell, à Paris, le spectacle The Empire Strips Back (référence humoristique à l’effeuillage comme à l’«Épisode V» de la saga créée par George Lucas) met en scène danseuses et danseurs se dévêtissant le temps d’une chanson dans les décors de la saga culte, avec une certaine dose de dérision.
«Vous allez voir, ça fait du bruit !», prévient une ouvreuse. Encouragé par les bons mots du maître de cérémonie, le public – et tout particulièrement les femmes – s’égosille pendant près de deux heures pour encourager les artistes qui leur adressent de temps en temps de petits signes. «Le succès du show est dû à son originalité, principalement à ce mélange entre science-fiction et burlesque», commente la danseuse Ophélie De Cesare. Aux États-Unis, d’où il est originaire, et en Australie, The Empire Strips Back a été systématiquement joué à guichets fermés; à son arrivée à Paris – sa première fois en Europe –, le spectacle avait déjà vendu plus de 100 000 tickets. À raison : «Qui pourrait s’attendre à voir son personnage de science-fiction favori onduler de cette façon ?»
«L’envie de se libérer par le corps»
Issu de la contre-culture américaine des années 1990, l’effeuillage néoburlesque s’est fait connaître du grand public avec les performances de l’artiste américaine Dita von Teese dans les années 2000, puis, en 2010, avec le succès des films Burlesque, avec Christina Aguilera et Cher, et Tournée, de Mathieu Amalric. Jean-Paul Gaultier y a consacré sa revue Fashion Freak Show et la pratique a récemment fait une apparition dans la série pour jeunes adultes de Netflix Riverdale.
«J’ai commencé en 2021 et il y avait déjà beaucoup d’engouement», remarque Léa alias Leony Peony, 25 ans, professeure et performeuse. Les pratiquantes – car il s’agit presque uniquement de femmes – sont de plus en plus jeunes. «Avant, c’étaient des femmes qui avaient passé la quarantaine, maintenant beaucoup de personnes de 20 à 35 ans s’intéressent au burlesque.» Pourquoi? «L’envie de se libérer par le corps», que Leony Peony relie à l’après-covid et à la quatrième vague du féminisme, marquée par le mouvement #MeToo. Marine, alias Peau Douce, 33 ans, a débuté avec les cours de Léa, avant de se lancer en solo. «Cela me permet d’explorer une forme de puissance, de confiance en soi, dans un milieu où la sororité est une valeur cardinale», confirme-t-elle.
(L’effeuillage burlesque) permet d’explorer une forme de puissance, de confiance en soi, dans un milieu où la sororité est une valeur cardinale
Si les danseuses et danseurs de The Empire Strips Back ne dépareilleraient pas dans des cabarets mythiques comme le Crazy Horse et le Moulin-Rouge, le burlesque «est beaucoup plus inclusif, que ce soit par rapport aux corps ou à l’orientation sexuelle» (avec des scènes LGBTQ+ de plus en plus nombreuses), note aussi Leony Peony. «On revendique plus de choses.»
Inspiré par la première vague burlesque de la fin du XIXe siècle, le Crazy Horse s’en est éloigné à partir des années 1960. L’effeuillage est revenu sur scène avec l’invitation de Dita Von Teese en 2006. Arrivée à la tête du cabaret la même année, Andrée Deissenberg y voit le signe d’un changement de regard sur le corps des femmes. Pour elle, les danseuses sont aujourd’hui portées par «cette revendication de devenir sujet et d’assumer leur corps». Une évolution qui se retrouve aussi parmi le public : plus de la moitié de la salle est féminine, d’après la directrice du lieu.
Au Paradis latin, «on s’est éloigné de l’image de la grande blonde de 1,75 m», revendique son directeur, Walter Butler. Après avoir créé en 2019 l’actuelle revue du cabaret, le chorégraphe Kamel Ouali se dirige vers l’élaboration d’un nouveau spectacle centré sur l’effeuillage burlesque. Son souhait : «Montrer une femme affirmée, forte et libre.» Quant au Moulin- rouge, fréquenté par une clientèle internationale dont la moyenne d’âge s’établit entre 35 et 45 ans, il mise toujours sur son esthétique d’origine. «Le french cancan, c’est vraiment l’élément que l’on va conserver coûte que coûte», affirme Jean-Victor Clerico, directeur de l’institution du quartier de Pigalle.
Superbe article ! Léonie sera au Luxembourg en avril pour le show de Burlesque Luxembourg qui existe depuis 2019 au Grand-Duchet.