Le festival de musiques du monde du LCTO, MeYouZik, a fait le plein mercredi et jeudi sur et autour de la place Guillaume-II. Pour cette édition 2019, l’Afrique était plus que jamais à l’honneur.
Tous les ans, avec MeYouZik, le «world» se donne rendez-vous à Luxembourg. Ou du moins la world… music! Après une année très ciblée sur les rythmes et musiques lusophones l’an dernier, le programmateur, Roby Schuler, a décidé cette année de réserver la première soirée aux sonorités venues d’Afrique. L’Afrique est donc plus que jamais à l’honneur, «même s’il y a un groupe afro-caribéen», précise-t-il.
Direction donc la place Guillaume-II. C’est Mamadou Diabaté qui ouvre le bal. Une pointure, d’entrée! Les balafons sont installés et alors que quelques dizaines de spectateurs attendent, sans présentation ni lancement officiel, à 18 h pile, les percussions commencent à se faire entendre. Les six musiciens montent sur scène. En plus des balafons, un batteur, un percussionniste, un guitariste et un bassiste occupent la Lion Stage. Le Malien s’est entouré de musiciens du Burkina Faso, mais aussi d’Autriche ou d’Israël. Il n’y a que la musique qui compte.
Et la musique, justement, est ultra-dynamique. Diabaté chante et impressionne par sa dextérité et sa vitesse au balafon. Difficile de rester de marbre devant ces rythmes. Certains y parviennent pourtant, restant confortablement assis sur les marches de l’hôtel de ville. Le chanteur les interpelle : «Vous êtes un peu loin!» «Ne restez pas assis comme ça, comme si vous étiez au bureau devant votre ordinateur, venez danser avec nous!», «Je veux qu’on bouge ensemble!», lancera-t-il, toujours avec le sourire, à plusieurs reprises.
Mais on le sait, le public luxembourgeois n’est pas réputé pour être parmi les plus expressifs du monde. Ce «venez danser avec nous!» deviendra presque le mot d’ordre de la soirée. «On va bouger ensemble, allez tout le monde!» sera le cri de ralliement des Tambours de Brazza, tandis que The Bongo Hop, sur la Holy Ghost Stage, la petite scène installée rue du Saint-Esprit, lancera lors de son passage : «Êtes-vous au courant que ceci est une fête? Alors sentez-vous libres de bouger, danser, crier!» Devant tant de détermination, la sauce a fini par prendre, à chaque fois.
Seun Kuti et Egypt 80 immanquables
Car l’autre mot d’ordre de la soirée était clairement «on est là pour vous faire danser», «pour vous faire voyager». Direction donc le Mali avec Mamadou Diabaté, Congo-Brazzaville avec les Tambours de Brazza, l’Afrique du Sud avec le surprenant DJ Invizable, le Congo Kinshasa avec Bantou Mentale pour finir au Nigeria avec la tête d’affiche de ce millésime 2019, de retour au MeYouZik après un passage en 2011, Seun Kuti, plus jeune fils du regretté Fela Kuti, de qui il a repris le flambeau et l’orchestre.
Plusieurs artistes rencontrés pour le festival avaient d’ailleurs fait du concert de Seun Kuti et Egypt 80 un immanquable de leur soirée. Le public semble avoir fait de même. Car si le public n’a pas cessé de croître tout au long des représentations de Mamadou Diabaté et des Tambours de Brazza, de nombreux spectateurs se sont rendus sur le Knuedler spécialement pour le dernier concert de la soirée. «En plus d’être le fils d’un mythe, ce gars, c’est un tueur», lance Philip, tout près de la scène, qui ne rate pas une miette du show.
Il faut dire que ça envoie du bois. En tout, ils sont 14 sur scène, c’est dynamique, coloré, vivant. D’entrée, Seun rend publiquement hommage à son père Fela. Puis devient plus taiseux entre les chansons, mais se donne à fond, aussi bien au chant qu’au saxo et parfois même aux claviers. Les percussions sont un peu moins présentes que lors des deux premiers concerts de la soirée, donc l’ambiance est un peu moins à la danse, même si l’afrobeat, avec ses accords joués en boucle, a quelque chose de chamanique et que Seun, avec ses mouvements endiablés, a quelque chose du gourou.
Un gourou messager, comme tous les groupes et artistes passés par MeYouZik, de brassage, d’échange, de paix et de fraternité.
Pablo Chimienti