Amputé d’une bonne partie de son budget, le festival de Wiltz, qui démarre ce vendredi soir, la joue économe.
L’ancienne ministre de la Culture Maggy Nagel qui, bille en tête, s’était donné comme mission la remise à plat du système de conventions, a laissé des traces à Wiltz. « Ça a fait très, très mal », raconte Roland Kinnen, président de l’honorable festival, créé en 1953. Et les chiffres parlent d’eux-mêmes… « À la suite des négociations, on est passé de 140000 euros de dotation… à zéro! Sans aide, ni subvention, c’était une évidence : on ne pouvait plus exister. Ça nous a tués! »
Heureusement, grâce « à l’intervention de la ville » auprès du ministère, un appui de quelque 80 000 euros a toutefois été consenti : suffisant, certes, pour ne pas enterrer le rendez-vous, mais trop maigre pour lui assurer la même ligne de conduite. « On a donc réduit notre programmation », explique-t-il, d’où cette petite affiche de huit productions (pour neuf représentations), s’étalant sur une vingtaine de jours.
Outre l’impact en termes de billetterie – « On a seulement démarré les ventes en mars, et trois mois de retard, ça ne se rattrape pas », précise, « déçu », Roland Kinnen – cette coupe budgétaire a plongé les organisateurs dans une sérieuse réflexion sur l’avenir de la manifestation… et leur propre destin. « On est cinq personnes, bénévoles, à être actifs depuis 40 ans autour de ce festival. Vu notre âge avancé et notre nombre, chaque année, on est un peu plus dépassés. Et la situation a changé au Luxembourg : la concurrence s’est accentuée, et aujourd’hui, on trouve énormément de spectacles, partout dans le pays. »
«Chez nous, on a quand même 18 cygnes!»
Un constat qui va conduire le festival à se professionnaliser d’ici 2017, à travers la création d’une ASBL, Culture Wiltz, qui incorporera les activités du Prabbeli. « Et on va embaucher un directeur artistique, qui va s’occuper de la programmation, du marketing et de la communication .» Ce qui amène Roland Kinnen à parler de cette 64 e édition comme «charnière », moins riche en termes de quantité mais convaincante, selon lui, qualitativement parlant. « Chez nous, on a quand même 18 cygnes! », rigole le président en évoquant l’allure de la célèbre œuvre de Tchaïkovski, présentée samedi.
Et les exemples ne manquent pas, que l’on évoque la valeur du Brno City Theatre et ses « 400 comédies musicales à l’année », dont Chicago , proposée cette année, ou celle du Moscow City Ballet, parmi « les meilleurs de Russie ». Pour le jazz, autre « tradition » du festival, on fait cependant moins dans le grandiloquent, avec un double concert : d’abord, le trio local Reis/Demuth/Wiltgen, puis Sinne Eeg, chanteuse « à la voix sublime », ici en quartette.
« Avant, les plus grands sont passés par Wiltz, comme Diana Krall. Désormais, ils sont trop chers! », rationalise le président, qui enchaîne sur son coup de cœur : The Wall , chef-d’œuvre de Pink Floyd, mis en scène par l’Atom Heart Mother Rockestra et réalisé avec un chœur d’enfants de Wiltz et de Heiderscheid. Reste à espérer que le temps soit plus clément, un élément essentiel pour un festival en plein air. « Une fois encore, ça n’aura pas été de notre faute! », conclut Roland Kinnen, impassible.
Grégory Cimatti
Jusqu’au 23 juillet. Le festival démarre ce vendredi soir 1er juillet avec Cinderella , interprété par The Moscow City Ballet.