Habitué au Festival du Film d’Amour de Mons, le réalisateur belge Frédéric Sojcher est venu présenter son nouveau film « Je veux être actrice » où il met en scène sa fille de 10 ans qui se pose mille et une questions sur le métier d’actrice.
Auteur, scénariste, réalisateur, professeur de cinéma à la Sorbonne à Paris, Frédéric Sojcher est une multi-casquette qui aime jouer avec les genres cinématographiques. De « Cinéastes à tout prix » présenté hors compétition au Festival de Cannes 2004 à « Je veux être actrice » en passant par « H.H. Hitler à Hollywood », il s’amuse à nous bousculer, à nous interpeller, à nous interroger sur la part de réalité ou de fiction de ses œuvres qui est un peu malgré lui sa griffe « je n’ai pas assez d’argent pour faire des films de fiction et c’est donc une manière de trouver des dispositifs qui demandent beaucoup moins de moyens » nous explique-t-il avec un large sourire.
Nastasjia, dix ans, est la fille de Frédéric Sojcher. Elle rêve de devenir actrice et interroge son père à ce sujet. Mais ceux qui sont le plus à même de répondre à cette question, ce sont les acteurs et actrices qui ont joué dans les films de son papa. Elle décide alors d’aller les trouver pour leur poser toutes les questions qui la taraudent. C’est ainsi que tour à tour, Patrick Chesnais, Micheline Presle, Jacques Weber, Denis Podalydès, Michaël Lonsdale et même le comique Jean-François Dérec qui lui, n’avait encore jamais joué sous la direction de Frédéric Sojcher, ont joué le jeu.
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« Je veux être actrice », que l’on pourrait qualifier de film familial, est avant tout un cadeau que Frédéric offre à sa fille mais aussi à son papa, ancien professeur de philosophie à l’Université de Bruxelles. Un cadeau qui a bien failli ne pas voir le jour « au départ, il y avait un autre projet de film qui se serait appelé « l’enfant et le philosophe » ; l’idée aurait été que mon père, prof de philosophie à l’université de Bruxelles, rencontrerait ma fille autour d’une leçon de philo qu’il donnerait à un enfant, mais je n’ai pas pu le monter financièrement. Et, c’est en revoyant « Climax » avec cette séquence avec Jacques Weber sur Cyrano sur : c’est quoi la beauté, intérieure, physique ? Que le responsable de France 2 de cette émission qui diffuse les courts métrages m’a dit « pourquoi tu ne développerais pas cette partie-là » ; c’est donc lui qui m’a donné l’envie de développer cela sachant que ma fille voulait devenir actrice et me demandait tout le temps quand est-ce que tu me feras rencontrer les acteurs qui ont joué dans tes films. »
Si le genre de « Je veux être actrice » est clairement défini comme étant plus un documentaire qu’un docu/fiction, il ne pouvait pas exister sans scénario et sans dialogues préalablement écrit. Frédéric nous explique comment il a procédé « avec les acteurs comme avec Jean-François Dérec, il n’y avait pas de texte, il réagit à ce que pose Nastasjia. Ses questions étaient prévues en amont mais je pense que la grande force de Nastasjia était d’être à l’écoute de ce que diraient les différents acteurs, de ne pas être figée dans des questions. Ceci dit, ce n’est jamais une improvisation totale puisqu’il y a toujours le lieu, le dispositif de la caméra et les questions prévues à l’avance qui interviennent sur le documentaire. »
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« Je veux être actrice » dure 62 minutes, le tout sur une musique signée Vladimir Cosma. « J’ai eu la chance de l’avoir sur mon court métrage « Climax » avec Patrick Chesnais et Lorànt Deutsch grâce à une personne du montage qui m’a dit, alors que je rêvais d’avoir Vladimir Cosma, « pourquoi tu ne demandes pas alors ? » ; j’ai répondu c’est impossible, il ne va jamais accepter de participer à un court métrage ; « mais appelle le, tu verras » et après mon appel, il a accepté de venir à la salle de montage ; il a aimé et accepté de faire la musique de « Climax ». Depuis lors, c’est le troisième film que l’on fait ensemble » ; c’est une œuvre tendre signée par un papa qui rêve au fond de lui que sa fille devienne un jour actrice. Le duo petite-fille/grand-père est également touchant à voir parce que leur relation est vraie, il n’y a aucun artifice dans leur jeu qui fausserait alors la profondeur d’âme que dégage l’œuvre de Frédéric Sojcher. Quant à Nastasjia, elle a suffisamment de caractère et de personnalité pour gérer son avenir et décider si un jour elle deviendra ou non une actrice.
Brigitte Lepage