Pas de stars sur la Croisette au printemps : face à l’épidémie de coronavirus, le Festival de Cannes renonce à se tenir comme prévu courant mai.
Après l’Euro de football et Roland Garros, tous deux reportés, le festival de Cannes était une des dernières grandes manifestations internationales à n’avoir pas fait d’annonce sur son édition 2020.
« Le Festival de Cannes ne pourra se tenir aux dates prévues, du 12 au 23 mai prochains », ont fait savoir les organisateurs jeudi dans un communiqué, évoquant « plusieurs hypothèses », « dont la principale serait un simple report, à Cannes, fin juin – début juillet 2020 ».
« Dès que l’évolution de la situation sanitaire française et internationale nous permettra d’en évaluer la possibilité réelle, nous ferons connaître notre décision », précisent-ils.
Une décision qui sera prise en concertation avec l’État, la mairie de Cannes (sud de la France) ainsi que les professionnels du cinéma, pour cette édition qui doit avoir pour président du jury le réalisateur américain Spike Lee.
Marché du film virtuel ?
Après la parution mi-mars d’un article évoquant une annulation pure et simple, le festival avait assuré qu’aucune décision n’était prise, renvoyant à la mi-avril, au moment où les organisateurs devaient dévoiler leur sélection de films en lice pour la Palme d’or.
Le festival « étudie avec attention et lucidité l’évolution de la situation nationale et internationale en concertation avec la Ville de Cannes et le CNC » (Centre national du cinéma et de l’image animée), répondait-il alors sur Twitter.
« On reste raisonnablement optimistes en espérant que le pic de l’épidémie soit atteint fin mars », affirmait début mars Pierre Lescure, son président. « Mais nous ne sommes pas inconscients. Si ce n’est pas le cas, on annulera ».
Face aux possibilités d’annulations, le patron du Marché du film (12 500 participants) qui se déroule en parallèle du festival a évoqué mercredi dans la revue Le Film Français la possibilité d’organiser une édition virtuelle en mai, avec des projections en ligne, tout comme les rencontres entre professionnels.
À Cannes, plusieurs salons professionnels phares avaient déjà pris des mesures face à l’épidémie de coronavirus : le Mipim pour l’immobilier et la 3e édition du festival Cannes Séries ont été reportés à des dates ultérieures. Pour le Mip TV, deuxième grand événement mondial des professionnels de la télévision initialement prévu du 30 mars au 2 avril, une annulation sèche a été décidée.
Mai 1968 et septembre 1939
Manifestation attirant 40 000 professionnels et 200 000 spectateurs, le festival de Cannes a déjà été annulé ou interrompu par le passé, mais jamais reporté.
Le cas le plus célèbre est l’édition de mai 1968, interrompue après une fronde menée par des cinéastes, Jean-Luc Godard et François Truffaut en tête, en soutien au mouvement étudiant et ouvrier.
À un cinéphile dépité par la tournure des choses, Godard lança notamment : « je vous parle de solidarité avec les étudiants et vous me parlez de travelling et de gros plan », avant de l’invectiver.
Autre temps fort de cette édition pas comme les autres : l’actrice Géraldine Chaplin et le metteur en scène Carlos Saura s’accrochèrent au rideau pour empêcher la projection de leur propre film.
La toute première édition cannoise, celle de 1939, fut elle aussi annulée : elle devait s’ouvrir le 1er septembre, date de l’invasion de la Pologne par l’Allemagne.
Deux jours plus tard, la France et la Grande-Bretagne déclarèrent la guerre à l’Allemagne, renvoyant aux oubliettes pour quelques années le projet d’un festival de cinéma dans le sud de la France, concurrençant la Mostra de Venise.
Résultat : le tout premier festival de Cannes s’ouvrira officiellement le 20 septembre 1946. Miné par des difficultés budgétaires, son avenir restera incertain pendant plusieurs années, avec des éditions annulées en 1948 et 1950.
AFP