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La sortie du mercredi : « Selma »


Quarante-sept ans après sa mort, Martin Luther King a enfin son film. C’est Selma, de la réalisatrice Ava DuVernay, avec, dans le rôle principal, l’impeccable David Oyelowo.

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Une des forces de « Selma » tient en l’interprétation (l’incarnation !) de Martin Luther King par David Oyelowo. (Photos : DR)

Un jour d’août 1963, le 28, exactement, il lance une phrase. Quatre mots pour l’histoire : « I have a dream ». J’ai fait un rêve… Martin Luther King est un pasteur noir (le politiquement correct n’avait pas sévi, on ne disait pas encore « Afro-Américain ») et il lutte pour l’égalité des Noirs et des Blancs.

Oui, Martin Luther King a un rêve dans cette Amérique où un être humain non blanc est encore tenu pour un être inférieur. Combattant des Droits de l’Homme assassiné à Memphis le 4 avril 1968 à 39 ans, personnage historique, il n’avait pas encore « son » film. Son biopic. En cet hiver 2015, près de quarante-sept ans après sa mort, le voici enfin. C’est Selma réalisé par Ava DuVernay et coproduit par la célèbre présentatrice télé Oprah Winfrey.

De nombreux réalisateurs ont souhaité le tourner, d’autres ont été contactés par la production – parmi lesquels Steven Spielberg, Stephen Frears, Spike Lee ou encore Michael Mann. Finalement, après huit ans de recherches, interrogations et tergiversations, c’est Ava DuVernay, 42 ans et surtout connue pour son travail sur des séries télé (dont Scandal), qui a été retenue.

La réalisatrice aurait pu filmer la chronologie du pasteur Martin Luther King. Elle a opté pour un parti-pris clair et précis, un épisode fort de sa vie : la marche de Selma, en 1965. Une marche pour le droit de vote des Noirs… À cette occasion, l’icône de la lutte pour les droits civiques fait pression sur le gouvernement. Malgré une dangereuse et terrifiante campagne (d’intimidation), il organise une marche pacifique de Selma à Montgomery, en Alabama. Cette marche va, devant la caméra d’Ava DuVernay, devenir l’épicentre du long-métrage.

> Un grand moment d’histoire

Avec élégance, Ava DuVernay a mis en images cette historique marche de Selma à Montgomery.

Ce qui fait dire à l’un des producteurs, Jeremy Kleiner : « On peut avoir plusieurs lectures de Selma : expliquer comment nos gouvernements peuvent être contraints par le peuple à prendre des décisions morales; montrer un militantisme sans glamour avec un souci de réalisme brut; célébrer le sens stratégique d’un mouvement luttant pour l’égalité des droits; ou bien rappeler l’histoire de la lutte contre une doctrine bien enracinée, celle de la suprématie blanche. Selma est une œuvre complexe qui ne s’appréhende pas d’un seul tenant : elle fait écho aux multiples aspects de notre histoire. »

Une des forces de Selma tient en l’interprétation (l’incarnation !) de Martin Luther King par David Oyelowo. L’acteur anglo-nigerian, 38 ans, vu récemment dans Interstellar ou encore Le Majordome, ne s’est jamais caché pour faire savoir qu’un jour, il jouerait le rôle de Martin Luther King. Ainsi, pendant sept années (de 2007 à 2014), il s’est imprégné du personnage pour pouvoir un jour se glisser dans sa peau.

Il raconte : « Tout ce temps m’a permis de m’immerger dans le rôle, de tout apprendre sur King, sur le mouvement pour les droits civiques et son impact sur l’histoire américaine. Je n’ai pas grandi avec Martin Luther King comme figure mythique, ce qui m’a permis de l’appréhender comme un être humain, un personnage autrement complexe. Pour autant, l’admiration que j’éprouvais envers lui n’a fait que croître à mesure que j’en apprenais davantage sur sa vie. »

Mieux encore : avec Selma, la réalisatrice, même si son film peut paraître un peu long et didactique, a su capter un moment d’Histoire. C’est si rare !

De notre correspondant à Paris Serge Bressan