Isaac Delusion, une des grandes révélations françaises de l’année 2014 avec sa pop rythmée et planante, fera, mercredi prochain, à la Rockhal, son premier passage sur une scène grand-ducale.
La musique planante d’Isaac Delusion s’accompagne d’un univers graphique onirique. (Photos : Valentin Boudet/DR)
> L’année 2014, concernant la « nouvelle musique » française, a été l’année Isaac Delusion, avec la sortie en juin de l’album qui porte le nom du groupe, des clips regardés par des centaines de milliers d’internautes, une tournée qui ne semble pas vouloir s’arrêter et des critiques dithyrambiques. Comment avez-vous vécu tout cela ?
Jules Paco : On l’a vécu comme quelque chose d’assez incroyable. Mais c’est encore tout frais et, étant en plein dedans, on a encore du mal à avoir du recul, ce qui fait que l’on ne s’en rend pas tout à fait compte. D’ailleurs, quand j’entends tout ce que vous avez dit, tous ces mots gentils… Je n’ai vraiment pas l’impression que vous parliez de mon groupe.
> La presse parle de vous comme d' »héritiers de la French touch », de « hauts représentants de la pop 2.0 », comme du « groupe le plus floating (flottant) français du moment », comme d’une « des plus belles pépites pop à la française de ces dernières années » ou encore comme d' »artistes multidisciplinaires, aussi catchy qu’inventifs qui redéfinissent les contours de la dream pop ». Vous reconnaissez- vous dans ces critiques ?
C’est tellement gentil que j’ai envie de m’y reconnaître, bien sûr ! Après… Comment dire ? (il marque une pause) Je n’ai pas du tout la prétention de m’autoproclamer héritier ou représentant, ou quoi que ce soit d’autre, de l’un ou l’autre mouvement; mais clairement, entendre tout cela fait très plaisir. Et si les gens le pensent vraiment, on est ravis. Mais nous, en interne, on ne peut clairement pas se définir ainsi. Ce serait tellement arrogant de dire de soi qu’on est les héritiers de la French touch ou les représentants de la pop 2.0 !
> Comment vous définissez-vous alors ?
Comme un groupe d’amis qui font la musique qu’ils aiment. On n’a jamais essayé de faire cela sérieusement. On a commencé parce qu’on aimait la musique, qu’on avait envie d’en faire et que cela nous faisait du bien. Aujourd’hui, on a la chance de pouvoir faire écouter cette musique aux gens, de la jouer en live et qu’elle soit appréciée. En fait, c’est cela le meilleur compliment qu’on puisse nous faire. Si notre musique plaît aux gens, c’est là qu’on a gagné !
> Votre musique donne envie de planer, de se libérer de la gravité, de voler. C’est quoi ? Une sorte de syndrome de Peter Pan, des adultes qui refusent de grandir et veulent continuer à voler dans leur imaginaire ?
Je crois que c’est notre musique, c’est avant tout une sensation, une histoire de sentiments, d’émotions. Une musique qui est aussi bien celle du regard naïf d’un enfant qui découvre le monde et s’émerveille et celle de la sensation qu’on peut avoir quand on voyage et qu’on découvre une autre culture. Mais effectivement, il y a aussi le rêve : on a la chance de pouvoir rêver, de sortir complètement de la réalité, d’aller dans des univers parallèles et d’être, sur le moment, persuadés que l’on est en train de vivre cela vraiment. Ce sont des sensations très fortes qui se rapprochent beaucoup des sentiments que l’on ressent quand on écoute la musique que l’on aime passionnément. Dans les deux cas, il y a un bouillonnement intérieur formidable. Et notre musique, c’est cela : une recherche de sensations fortes.
> Le nom du groupe vient de la mythologie ?
Oui, c’est un mélange de plein de choses. Et c’est tellement compliqué que je ne saurais plus vraiment l’expliquer. En tout cas, c’est un nom qui nous parle et qui nous va bien.
> Le groupe est né en tant que duo, il est, depuis, devenu quatuor, en quoi ce changement a-t-il fait évoluer Isaac Delusion ?
Oui, on était deux, on est passés à trois et puis à quatre, cela d’abord pour la scène. Loïc chantait et jouait de la guitare, moi j’étais là avec mes machines, mais très vite on a eu envie de rendre le live plus vivant justement… Plus communicatif, moins minimaliste. Au début, avec les morceaux des EP, on avait du mal à embarquer le public en live, parce que c’était vraiment très planant. Après la scène, le groupe est resté un quatuor aussi pour la composition, ce qui a beaucoup enrichi ce qu’on faisait de nouvelles influences et de nouvelles couleurs. Entre les deux EP et l’album, on sent vraiment ce changement. C’est plus produit et plus rythmé, car on avait envie de faire danser les gens.
> Donc, le public qui viendra vous voir à la Rockhal doit s’attendre à un concert qui bouge…
Voilà. L’album marche très bien en live parce qu’il reprend des morceaux que l’on joue depuis un moment sur scène et qui sont justement faits pour le live. Il y a toujours un côté planant, mais désormais proche de la trance. En d’autres termes, quelque chose de bien équilibré, d’aérien et de rythmé.
> Vos clips sont également très travaillés et artistiques. Arrivez-vous à retranscrire cet univers très visuel sur scène ?
On avait avant un ami qui a réalisé certains de nos clips, qui jouait des visuels en live, qui sublimait notre musique, mais on a arrêté pour le moment, car cela avait tendance à rendre le public plus passif. On essaye donc de trouver un juste milieu.
> Vous étiez en studio en décembre. Un nouvel album serait-il déjà en préparation ?
On continue à composer, à travailler des morceaux et à les enregistrer. Pour l’instant, on a plein de maquettes, on verra bien ce que l’on en fait. Mais disons que l’on devrait sortir un morceau dans pas trop longtemps pour annoncer la suite.
Entretien avec notre journaliste Pablo Chimienti
Rockhal – Esch-sur-Alzette. Mercredi prochain à partir de 20h. Support act : Jeremie Whistler