Des « retards », des « faiblesses », « des résultats qui marquent un échec »: une commission indépendante chargée d’évaluer la politique française en matière de lutte contre le sida étrille les résultats en matière de dépistage et de prévention, alors que « l’épidémie se poursuit ».
Dans un « avis » cinglant sur la politique du dépistage, publié mercredi, le Conseil national du sida (CNS) juge que « la situation actuelle est inacceptable alors que tous les outils permettant d’enrayer l’épidémie sont disponibles, qu’il s’agisse du dépistage du VIH ou des traitements dans leurs différents usages préventifs ».
« Une remobilisation forte s’impose sur le plan national pour dépasser les obstacles qui perdurent en matière d’accès au dépistage et aux outils innovants de prévention », estime cette instance conseillère des pouvoirs publics. « En dépit des efforts engagés, les indicateurs ne montrent pas de réduction de l’épidémie en France d’un niveau aussi important qu’à l’étranger, dans des villes et des pays comparables aux nôtres », grince cette organisation, qui déplore aussi des « retards » du recueil de certaines données sur l’évolution de l’épidémie.
« Aucune évolution favorable » n’est observée
Certes des « données récentes suggèrent l’amorce d’une inflexion », mais elle « reste à confirmer » et est, pour l’instant, « limitée », selon ce rapport. Car « aucune évolution favorable » n’est observée dans certains groupes de populations clés comme dans certains territoires prioritaires, assène le CNS, qui estime que « ces résultats marquent un échec ».
L’épidémie se poursuit en France chez les hommes homosexuels, des femmes et hommes nés à l’étranger, en particulier en Afrique sub-saharienne, qui pour beaucoup se contaminent en France, note le CNS. Il pointe un nombre « stable » des découvertes de séropositivité, autour de 6 400 par an, ainsi que la proportion (30%) de ces découvertes « à un stade avancé ». En 2016, en France, 24 000 personnes infectées ignoraient l’être, dont 52% nés à l’étranger. Sur ce total, 9 000 étaient des homosexuels (soit 38% des non-diagnostiqués).
Les moyens d’enrayer la circulation du VIH existent
« En tout état de cause, les objectifs (…) que la France s’était fixés d’ici à 2020 ne seront pas atteints », poursuit-il. En l’occurrence, il s’agit d’arriver à diagnostiquer 95% des personnes infectées, de mettre sous traitement antirétroviral 95% de ces personnes diagnostiquées séropositives et de traiter avec succès 95% d’entre elles, pour empêcher la transmission du virus. Le traitement préventif PrEP pris avant un rapport sexuel, et celui donné après un rapport à risque non protégé, sont d’autres moyens d’enrayer la circulation du VIH.
Le dépistage doit être « mieux adapté aux besoins des personnes les plus exposées »
Le CNS suggère, entre autres, de faciliter l’accès aux différents outils de dépistage, et de « démédicaliser » l’offre quand c’est possible et justifié. L’idée est de « simplifier » l’accès aux tests sanguins classiques, d’augmenter l’offre, trop peu développée, du test d’orientation rapide TROD proposé par des associations et de l’élargir aux pharmaciens et médecins généralistes. L’expérience « Labo sans ordo » à Paris et dans les Alpes-Maritimes, qui donne accès aux tests VIH dans les laboratoires de ville, sans ordonnance et sans frais, aux assurés sociaux et titulaires de l’AME, pourrait, si elle est concluante être généralisée.
Et le dépistage au Luxembourg ?
Pour rappel, au Luxembourg, l’autotest, qui permet un accès facilité au dépistage du VIH, peut être acheté en pharmacie et, depuis le 23 novembre, dans les différents Cactus du pays. On peut ainsi l’effectuer sans la présence d’un professionnel de santé, à la maison ou ailleurs. N’hésitez pas à participer aux actions qui se déroulent en ce moment au Grand-Duché, jusqu’à vendredi, à l’occasion de la semaine européenne de Dépistage et de la Journée mondiale du sida qui a lieu chaque 1er décembre.
LQ/AFP