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La découverte « Absolutely Free » (Interview + Vidéo)


Trio en provenance de Toronto, « Absolutely Free » s’est donné comme mission de dépasser les formats dits « classiques » et défricher des terrains sonores encore vierges. Entretien avec un groupe libre de tout carcan.

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« Aujourd’hui, on compose nos chansons autant en interprètes qu’en auditeurs, ce qui était moins le cas avant avec notre vision très « art punk » ». (Photos : DR)

Ces ex-DD/MM/YYYY, repérés en leur temps par Geoff Barrow (Portishead, BEAK) convoquent dans leur musique hybride les legs de Gang of Four, Phil Spector, Terry Riley, Kraftwerk, ainsi que d’autres héros modernes du néo-psyché. Ils viennent de publier un premier album de pop-rock brillant et tortueux, témoignant de la vivacité de la scène canadienne. Du krautrock aux polyrythmies « world » en passant par l’électronique, cette formation vise large… et juste.

> Prendre le titre d’un album de Zappa comme nom, ça peut faire très peur… Était-ce intentionnel ?

Moshe Rozenberg : Oui, on est toujours rationnels (rire). Mais ce n’est pas à voir comme un hommage appuyé à ce musicien de génie qu’a été Frank Zappa, même si clairement, on l’adore ! Après DD/MM/YYYY, le fait de recréer un nouveau groupe nous est apparu comme un nouveau départ, un souffle libérateur. D’où ce nom qui, de surcroît, se fonde sur un paradoxe, parce que rien, en effet, ne peut être absolu…

> Après avoir joué ensemble avec DD/MM/YYYY, en quoi Absolutely Free peut-il être justement vu comme quelque chose de totalement nouveau ?

On a surtout essayé d’effacer les souvenirs de nos esprits, histoire de repartir vraiment de zéro. Ce qui n’a pas été évident car, au final, on reste les mêmes personnes, influencées par ce que l’on a fait dans le passé avec DD/MM/YYYY, avec lequel on a tourné comme des malades ! Il nous a façonnés et permis de devenir ce que nous sommes aujourd’hui.

> Quelles sont les différences entre les deux groupes, alors ?

La patience et la réflexion…

> C’est-à-dire ?

Aujourd’hui, on compose nos chansons autant en interprètes qu’en auditeurs, ce qui était moins le cas avant avec notre vision très « art punk ». La performance était notre moteur. Maintenant, on accorde du sens à l’écoute comme au jeu. Bref, il est ici question de la façon dont on interagit avec la musique que l’on fait. Disons que l’on est plus pédagogiques, et notre musique est mieux pensée.

> Conformément à votre appellation, quelle liberté défendez-vous ?

On fait de l’art, ce qui implique que l’on est libres de créer des connexions entre différentes musiques, de porter ces expressions dans le futur, de les partager… et de renouveler l’expérience.

> Dans ce sens, vous considérez- vous comme les explorateurs sonores, des scientifiques rompus à la cause musicale ?

J’aime plutôt la définition « musiciens méritants », car depuis que l’on crée ensemble, on n’est jamais tombés dans la facilité. On a toujours cherché à mettre en lumière le détail, à trouver de nouvelles voies, à ne rien laisser au hasard. On est très exigeants avec nous-mêmes.

> Vous venez de Toronto, au Canada. Cette ville est-elle un terreau idéal pour la créativité ? Elle fournit régulièrement des groupes de grande qualité, comme récemment Metz ou Austra

Oui, c’est clair. En même temps, cette ville est énorme. Du coup, parmi cette foule de gens, il y a plus de chances qu’il en émerge des artistes, non ? Mais c’est vrai que Toronto est très plaisant pour faire de la musique. Depuis notre adolescence, on y a vu régulièrement des groupes incroyables, que le reste du monde n’a probablement jamais vus et dont ils n’ont jamais entendu parler (rire). Mais pour être honnête, au sein de cette communauté, on se sent comme sur une île. De par notre démarche, nos instruments, nos envies, on est quand même assez différents.

> En octobre dernier, vous avez sorti un premier disque à votre nom – produit par Mike Haliechuk (Fucked Up, Austra). Pouvez-vous le définir ?

C’est un voyage qui emmène l’auditeur quelque part. Il faut juste se laisser emporter…

> Cet album est un vrai patchwork de styles (electro, psyché-rock, pop, krautrock, polyrythmies « world »), sans pour autant que son écoute soit complexe…

Même si on avait des idées audacieuses, on voulait qu’elles se greffent à un projet qui soit digeste. Dans ce sens, il fallait que les chansons s’articulent ensemble, soit au service du disque dans son entité. Il y a une cohérence derrière cet album. D’où cette écoute qui peut paraître fluide et agréable.

> Vous avez travaillé avec Geoff Barrow à l’époque de DD/MM/YYYY. Pensez-vous le refaire avec Absolutely Free?

C’est difficile à dire… C’est en tout cas quelqu’un que l’on admire. Il est extraordinaire ! On va certainement tout mettre en œuvre pour refaire quelque chose ensemble. Qui sait…

Entretien avec notre journaliste Grégory Cimatti


CarréRotondes – Luxembourg.

Demain à 21h30. Support : Silent Kid (DJ set).