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La Berlinale crée la surprise en couronnant une romance hongroise


la Berlinale a récompensé samedi soir "On body and soul" de la Hongroise Ildiko Enyedi. (photo AFP)

Premier des grands festivals de l’année, la Berlinale a récompensé samedi soir « On body and soul » de la Hongroise Ildiko Enyedi, une histoire d’amour dans un abattoir, face à un film du favori finlandais Aki Kaurismäki.

Caméra d’or à Cannes en 1989, la réalisatrice a évoqué devant la presse la situation politique « de plus en plus absurde, terriblement absurde » dans la Hongrie de Viktor Orban, avec des artistes toutefois protégés par l’organisme national de soutien du cinéma, « un havre pour les auteurs ». « Nous voulions un film simple, clair comme de l’eau de roche et nous ne savions pas si le public allait nous suivre car il se voit uniquement avec un coeur empreint de générosité », a-t-elle déclaré en recevant l’Ours d’or.

Son film parle d’un homme et d’une femme se désirant mais ne parvenant pas à communiquer, sauf dans leurs rêves qu’ils partagent. Ils vont se rapprocher en évoquant leurs songes qui les emmènent loin de l’abattoir où ils travaillent. « Il faut prendre des risques si l’on veut vraiment vivre », a estimé la réalisatrice qui n’avait pas tourné de long-métrage depuis 18 ans.

« Le jury est tombé amoureux de ce film, non seulement grâce à ses qualités mais aussi car il nous rappelle un mot que nous utilisons parfois trop facilement: la compassion », a déclaré son président, le cinéaste néerlandais Paul Verhoeven (« Basic Instinct »), qui avait souhaité voir « des films controversés » pendant les onze jours de la compétition.

Au terme d’un festival à la dimension politique assumée, le jury a décerné en lot de consolation le prix du meilleur réalisateur au Finlandais Aki Kaurismäki, qui signe un nouveau plaidoyer pour les réfugiés dans « L’autre côté de l’espoir », six ans après « Le Havre ». Le film parle de la rencontre entre un migrant syrien échoué à Helsinki et un restaurateur local séparé de sa femme alcoolique, qui va lui venir en aide.

Il était favori pour l’Ours d’or, aux côtés de « Una mujer fantastica » du Chilien Sebastian Lelio, récompensé pour son scénario. Ce portrait d’une femme transgenre qui doit se battre pour exister à la mort de son compagnon plus âgé a révélé l’actrice Daniela Vega, elle-même transgenre.

« Dans des périodes sombres, nous devons nous battre avec beauté, élégance et poésie », a souligné le réalisateur, figure d’une nouvelle vague de cinéastes chiliens.

Tribune anti-Trump

C’est finalement la Sud-coréenne Kim Min-hee (la « Mademoiselle » de Park Chan-Wook) qui a été récompensée pour son rôle d’actrice au coeur brisé dans « On the Beach at Night Alone » d’Hang Sang-soo.

Côté masculin, l’Autrichien Georg Friedrich (« Bright nights ») a été couronné en père taiseux tentant de renouer avec son fils lors d’un road trip en Norvège.

berlin

Seul film africain en compétition, « Félicité » du Franco-Sénégalais Alain Gomis a gagné le Grand prix du jury. Ce portrait d’une chanteuse de bar à Kinshasa se battant pour son fils victime d’un accident a été « difficile à faire ». « Ca a été une année difficile en RDCongo », a souligné le réalisateur, évoquant les élections dans le pays.

La Berlinale a pour la première fois décerné un prix du meilleur documentaire, récompensant « Istiyad Ashbah » (« Ghost Hunting »), une expérience cinématographique en forme de thérapie collective sur le traumatisme d’anciens prisonniers palestiniens.

La Berlinale a eu souvent des allures de tribune pour les opposants à la politique de Donald Trump. « Je veux que l’on sache qu’il y a de nombreuses personnes dans mon pays qui sont prêtes à résister », a déclaré à l’ouverture du festival l’actrice américaine Maggie Gyllenhaal, membre du jury.

Egalement membre du jury, le Mexicain Diego Luna a profité de son passage pour manifester devant l’ancien mur de Berlin et dénoncer le projet de barrière entre le Mexique et les Etats-Unis que souhaite bâtir M. Trump.

En 2016, le jury de la Berlinale présidé par Meryl Streep avait récompensé « Fuocoammare », un documentaire sur la crise migratoire. Le film est en lice pour l’Oscar du meilleur documentaire.

Le Quotidien / AFP