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Kids United : les enfants stars aux Arènes de Metz

Ils ont fait d’une chanson de Demis Roussos l’un des tubes inattendus de l’année : les Kids United, chanteurs de 9 à 16 ans, font un tabac dans les cours d’école et les salles de concert. Ils seront de passage aux Arènes de Metz, le 8 octobre.

Résolument positif, à la naïveté assumée, le refrain On écrit sur les murs de Demis Roussos (1989) remis au goût du jour par les «Kids» a connu un très joli succès à la radio et dans les cours de récréation. Le premier album des jeunes chanteurs a séduit à ce jour plus de 500 000 acheteurs selon le label Play On, un succès commercial majeur à base de reprises françaises et internationales.

Les plus petits, mais aussi leurs parents et grands-parents, se sont entichés de ces six artistes en herbe, tous nés dans les années 2000 – Erza, Esteban, Gabriel, Gloria, Nilusi, Carla – et passés par des télé-crochets comme The Voice Kids ou La France a un incroyable talent. Des gamins-chanteurs qui ont fait souffler un vent de fraîcheur dans une France blessée, avec un disque sorti une semaine seulement après les attentats du 13 novembre 2015.

Un euro par album vendu étant reversé à l’Unicef, ce succès a par ailleurs permis aux «Kids» de remettre un premier chèque de 400 000 euros à l’agence de l’ONU pour l’enfance, en mai à l’occasion d’un concert à l’Olympia. Avant de partir en tournée française, à l’automne, les chanteurs en herbe ont profité des vacances pour sortir déjà un deuxième album, Tout le bonheur du monde.

Temps scolaire préservé

Les «Kids» ne sont désormais plus que cinq – Carla ayant choisi de tenter l’aventure en solo – mais la formule reste la même, avec des reprises de chansons populaires et consensuelles de Céline Dion (Destin), Indochine (J’ai demandé à la lune), Zaz (Si), Patrick Bruel (Qui a le droit ?) ou Laurent Voulzy (Le Pouvoir des fleurs). Ils s’offrent aussi un invité de marque, le rappeur Black M, qui vient reprendre avec eux son titre Sur ma route.

Après la chanson de Demis Roussos, ils remettent au goût du jour un nouveau titre plus ancien, L’Oiseau et l’enfant, de Marie Myriam, chanson qui a offert à la France sa dernière victoire en date à l’Eurovision en 1977. Mais ils proposent aussi un premier titre original, Ensemble, aux sentiments pastel : «Demain le soleil brillera pour tout le monde/J’ai envie de faire de cette Terre l’éden…»

«L’idée de Kids United, c’est de rendre accessibles des chansons à des nouvelles générations qui ne les connaissent pas forcément. C’est un projet intergénérationnel, avec des enfants qui viennent chanter l’espoir sans aucune arrière-pensée», explique Jérémy Chapon, le directeur musical du projet.

Les enfants avaient été choisis au terme d’un casting de quelque 100 à 150 aspirants chanteurs et retenus en fonction de leur «tessiture de voix» se complétant les uns les autres, selon le producteur. Afin de préserver le temps scolaire, toutes leurs activités musicales (enregistrements, promotion, concerts) sont concentrées le mercredi après-midi et les week-ends, assure Julien Godin, directeur de Play On, qui assure aussi que les parents des chanteurs sont associés aux décisions artistiques et l’argent gagné par ces artistes – tous mineurs – est placé sur «un compte bloqué».

Erza, jeune chanteuse de Sarreguemines

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Photo DR/Le Républicain Lorrain

Erza, la Mosellane des Kids United, savoure sans modération son succès entre le collège et sa vie sur scène.
Elle est rentrée timidement dans un collège sarregueminois début septembre, sous les regards étonnés et ravis des jeunes de son âge qui n’ont pas manqué d’aller lui demander autographes et «selfies» à la récré. Erza surfe sur le succès avec les Kids United dont le deuxième album est sorti cet été avec comme titre phare, enregistré en Corse, L’Oiseau et l’enfant. Cent onze millions de vues ont été comptées sur YouTube avec le titre On écrit sur les murs.

Pas facile de conjuguer notoriété et vie scolaire, d’autant plus qu’Erza, qui s’était fait remarquer en terminant troisième de l’émission de M6 La France a un incroyable talent en 2014 avant de se voir proposer d’intégrer les Kids United, enchaîne émissions de télévision et concerts. Elle s’est produite le 21 septembre, jour de ses onze ans, à l’Olympia pour la cinquième édition de Leurs voix pour l’espoir en compagnie d’artistes renommés. À partir d’octobre démarrera une tournée de 25 dates dans les Zénith de France. Mais dès la semaine prochaine, elle est attendue aux Arènes de Metz.

Bref, Erza est sur un nuage médiatique. Après le disque de platine qui a récompensé le premier album, elle a eu la surprise de se voir attribuer le disque de diamant. «Nous étions en concert aux Folies bergères lorsqu’à la fin du show on nous a demandé de rester sur scène. Oh là là, quelle surprise lorsqu’on nous a annoncé que nous étions disque de diamant pour l’album Un monde meilleur.» Mais le papa, réfugié politique en 1991 après avoir fui la guerre en ex-Yougoslavie, rassure : «Erza va manquer l’école une semaine, mais la production a mis un professeur à disposition qui s’est mis en relation avec son collège pour lui faire étudier son programme.»

Le succès, un jeu d’enfant

Quel est donc ce monde où, dans les cours d’école, on chante Demis Roussos ? Oui, on parle bien du barbu en toge des Aphrodite’s Child, dont le titre On écrit sur les murs est sorti de l’oubli dans lequel il était tombé, pour comptabiliser, en moins d’un an, 114 millions de vues sur YouTube !

De quoi punir jusqu’à nouvel ordre cette jeunesse décadente qui, plongée quotidiennement dans ses rêveries, fredonne Wham! et Marie Myriam. L’œuvre diabolique des Kids United, groupe de jeunes enfants qui remettent au goût du jour des «classiques» trop datés pour eux. Sinon, ils auraient laissé tranquille les fantômes de Gold et Patrick Bruel, bien mieux dans les nimbes qu’à la radio. Mais non, l’exhumation est en marche et elle fait des ravages : un disques de diamant, des salles de concert remplies comme un œuf, et des marmots surexcités, jouant à Céline Dion devant la glace. Le cauchemar !

Derrière, bien sûr, l’industrie musicale appuie sur la fibre nostalgique des parents, qui redécouvrent des chansons avec un pincement au cœur. Des tubes qui ont cartonné de leur temps. Pas de raison que ce ne soit pas le cas vingt, trente, quarante ans plus tard. Toute la puissance de la variété française, ce véritable monstre gluant… Ajoutez à cela le marché des préadolescents, cœur de cible de cette industrie sans scrupule qui est prête à tout pour vanter les louanges d’un Black M ou d’un Maître Gims.

Plus pervers encore, c’est la sensibilité humanitaire de ces Kids United, dont le logo – sorte de croisement entre United Colors of Benetton et Touche pas à mon pote de Harlem Désir – est lié à celui de l’Unicef. Un facteur caritatif qui apaise les esprits car, c’est entendu, faire du bussiness avec des enfants, c’est mal… Un chèque de 400 000 euros pour défendre les droits des enfants dans le monde – quel paradoxe ! – permet de mieux faire passer la pilule et d’éviter qu’on les compare à de singes savants. Un militantisme déguisé que l’on n’avait plus vu depuis Les Poppys, groupe de jeunes hippies qui, en 1971, se découvraient un activisme précoce avec Non, non, rien n’a changé.

Reprises à succès, bonne cause et nostalgie : voici les trois ingrédients qui font de ce groupe buveur de lait la nouvelle marotte des cours d’école. Les mêmes, dans les grandes lignes, qui ont permis notamment l’éclosion – la dernière du genre en date, heureusement vite étouffée – des Rock Kids, avec le célèbre We Will Rock You braillé par des bambins survoltés. Le mieux, finalement, pour éviter cet énième bouclage de chansons, réutilisées encore et encore, même les plus louables (Imagine, Chanter pour ceux, Papaoutai), c’est d’éviter de griller les étapes, de chercher coûte que coûte les nouvelles stars de demain, passées, de surcroît, au filtre télévisuel, et dans de ce sens, laisser le talent – et ces gamins n’en manquent sûrement pas ! – prendre toute sa mesure dans le temps. Après, chanter On écrit sur les murs, au repas du soir, avec ses enfants, n’a rien de condamnable, bien sûr. Bien que Rain and Tears, en tenue d’époque, reste bien plus valeureux.

Grégory Cimatti