La Cinémathèque française examine «L’art de James Cameron», cinéaste de tous les records pour qui tout a commencé… avec un papier et un crayon.
Les dessins qui ont inspiré Terminator (1984), Titanic (1997) ou encore Avatar (2009) sont exposés depuis jeudi dernier à la Cinémathèque française, à Paris. On découvre dans l’exposition «L’art de James Cameron» les talents d’illustration du réalisateur américain, depuis des dessins d’enfance, couchés sur des cahiers de classe, jusqu’à des croquis esquissés pour ses films les plus récents. Avec, comme clou du spectacle, les dessins de Rose, héroïne de Titanic. Dans le film, le personnage interprété par Kate Winslet se fait tirer le portrait par Jack (Leonardo DiCaprio); les dessins sont en fait réalisés par James Cameron, dont la main apparaît à l’écran.
De façon frappante, certains dessins semblent prémonitoires, à l’image d’un paysage fantastique, dessiné dans la jeunesse de Cameron, qui rappelle très fortement la planète Pandora d’Avatar. «C’était il y a 50 ans. Je sais que c’est ce dessin qui m’a fait ensuite penser à une planète bioluminescente», a expliqué le réalisateur de trois des cinq plus gros succès mondiaux au cinéma, dont Avatar, en tête du classement depuis sa sortie en 2009. «Au début des années 1990, j’ai créé une société d’effets visuels, et on essayait de créer des créatures, des personnages, toutes sortes de choses. J’ai pensé qu’il fallait que j’écrive un scénario sur une autre planète. J’ai retrouvé ce dessin (…) Et c’est devenu Avatar.»
«Le dessin était tout pour moi»
La halte du réalisateur à la Cinémathèque française, mercredi dernier, s’est faite alors que James Cameron peaufine ces temps-ci le troisième volet de la saga en Nouvelle-Zélande. Il observe que l’état de la planète «continue de s’aggraver. Et c’est une question qui devient de plus en plus importante à mesure que l’histoire avance. Dans le troisième Avatar, nous sommes dans un état de transition (à propos du) combat pour la survie de la Terre et de Pandora.» «Le grand défi pour notre survie en tant qu’espèce, c’est que nous devons changer notre façon de vivre, d’exister», signale James Cameron. «On ne peut pas attendre qu’un changement aussi profond se produise grâce à un seul film. Il faut un chœur de voix.»
Loin de cette fable écologique, l’univers de Cameron, inspiré visuellement par les comics et la fantasy de sa jeunesse, se révèle très sombre : l’œuvre d’un enfant qui a grandi avec la guerre froide et la menace nucléaire. «Le dessin était tout pour moi. C’est la façon dont je traitais le monde», analyse-t-il aujourd’hui. Et se souvient au passage avoir «dessiné (sa) propre version avec (ses) propres animaux» de Mysterious Island (Cy Endfield, 1961), premier choc cinématographique qu’il a eu à cinq ans. Dans cette adaptation de Jules Verne, les créatures gigantesques (un crabe, des guêpes, des oiseaux…) sont l’œuvre du pionnier des effets spéciaux et de la «stop motion» Ray Harryhausen, dont l’influence s’est fait sentir sur Cameron et ses collègues de la même génération (Spielberg, Lucas, Coppola, Zemeckis, De Palma…).
«Un art perdu»
Certaines illustrations sont issues de ses rêves ou surtout de ses cauchemars, couchées sur papier par un réalisateur couvert de sueur, au petit matin. C’est le cas d’une image qui a engendré Terminator : «Dans un rêve fiévreux, j’ai vu l’image d’un squelette chromé au milieu d’un feu ardent, et mon esprit a commencé à reconstituer ça quand je me suis réveillé. Je l’ai immédiatement dessiné. Ensuite, j’ai pensé que ce serait un mec avec un intérieur de robot et un extérieur humain. Il est brûlé et révélé au public.»
À bientôt 70 ans (il les fêtera le 16 août prochain), James Cameron plaide pour l’importance du bon vieux crayon, dans un monde où la technologie est omniprésente et où l’humain est «constamment bombardé par la créativité des autres, avec des films, des jeux, un flot continu de médias». «Le dessin est en train de devenir un art perdu. Même les artistes qui travaillent avec moi ne prennent généralement plus de crayon. Ils me considèrent comme un dinosaure parce que je leur dessine quelque chose!»
Jusqu’au 5 janvier 2025. Cinémathèque française – Paris.