Nominée aux Oscars, Isabelle Huppert, qui a remporté vendredi le César de la meilleure actrice pour son rôle dérangeant de femme violée dans « Elle », est une actrice audacieuse à la carrière impressionnante, marquée par plus de 100 films en France et à l’international.
« C’est un rôle extraordinaire, complet et complexe, et dans une carrière d’actrice, cela tient à cœur », a-t-elle déclaré après la cérémonie des Césars. « Elle », thriller subversif du Néerlandais Paul Verhoeven adapté d’un roman de l’écrivain français Philippe Djian, « Oh… », lui a déjà valu un Golden Globe aux États-Unis et une nomination aux Oscars remis dimanche. Elle y campe Michèle, une forte femme violée par un inconnu qui, loin de s’effondrer, va traquer son agresseur.
Lors des Golden Globe, Paul Verhoeven avait loué « son audace », « son authenticité » et « son talent ».
« Dans les films il n’y a pas beaucoup de choses qui me font peur », assure la comédienne, qui tourne actuellement « Eva » avec Benoît Jacquot, cinéaste qui l’a déjà dirigée cinq fois.
Cette brillante actrice, qui n’hésite pas à interpréter des femmes antipathiques, frustrées ou guettées par la folie, se glisse aussi bien dans la peau d’une fausse ingénue, d’une garce, d’une pianiste sulfureuse ou d’une mère supérieure un peu trop affectueuse.
Rousse énergique à la silhouette fine, elle est l’une des actrices françaises les plus prolifiques, récompensée par de nombreux prix en France comme à l’étranger, dont un Lion d’or pour sa carrière à la Mostra de Venise en 2005 et un César de la meilleure actrice en 1996 pour « La cérémonie ».
En France, elle a tourné avec les plus grands réalisateurs, dont Claude Chabrol et Maurice Pialat.
A l’étranger, elle a été dirigée notamment par l’Autrichien Michael Haneke, les Américains Michael Cimino et Otto Preminger, les Italiens Marco Bellocchio et Marco Ferreri, le Polonais Andrzej Wajda, le Coréen Hong Sang-soo ou le Philippin Brillante Mendoza.
Deux prix à Cannes
Née le 16 mars 1953 dans un milieu aisé, Isabelle Huppert a été formée au Conservatoire avant de débuter au théâtre avec Antoine Vitez ou Robert Hossein.
Faussement sage dans « Les valseuses » (1974) de Bertrand Blier, elle est remarquée dans « Le juge et l’assassin » (1976) de Bertrand Tavernier, où elle joue la fiancée du juge manipulateur, puis dans « La dentellière » (1977) de Claude Goretta.
Claude Chabrol devient l’un de ses réalisateurs fétiches, avec lequel elle tournera sept films, parmi lesquels « Violette Nozière » (1978), « Madame Bovary » (1991), « La cérémonie » (1995) et « L’ivresse du pouvoir » (2006).
Au Festival de Cannes, dont elle est une habituée, elle a remporté deux prix d’interprétation, en 1978 pour « Violette Nozière » et en 2001 pour « La pianiste » de Michael Haneke, où elle est une professeure de piano au sadisme glaçant.
L’actrice, dont le culot fait merveille, mais qui sait aussi varier les émotions et passer avec brio de la froideur au comique, sera à l’affiche cette année du prochain film d’Haneke, « Happy End ».
Au théâtre, elle a aussi travaillé sous la direction des plus grands, comme Bob Wilson (« Orlando », « Quartett »), Jacques Lassalle (« Médée ») ou Luc Bondy (« Les fausses confidences »).
Elle a été en 2016 sous la torture de l’amour dans « Phèdre(s) », mis en scène par le Polonais Krzysztof Warlikowski.
Au cinéma, elle s’est illustrée également l’an dernier en professeure de philosophie quittée par son mari dans « L’avenir », de la Française Mia Hansen-Love, Ours d’argent de la meilleure réalisation à Berlin.
Isabelle Huppert, qui préserve sa vie privée, est la mère de trois enfants, dont l’actrice Lolita Chammah. Elles ont partagé l’affiche en 2010 dans « Copacabana » de Marc Fitoussi et récemment dans « Barrage » de la Luxembourgeoise Laura Schroeder, présenté dans une section parallèle à la dernière Berlinale.
Le Quotidien / AFP