Une nouvelle génération de films d’horreur à petit budget fait trembler les méga-productions des studios hollywoodiens, en préférant l’art du suspense vieille école aux torrents d’hémoglobine et aux déferlantes d’effets spéciaux.
«Les films d’horreur malins sont à la mode», constate Jeff Bock, de la société spécialisée dans le box-office Exhibitor Relations. Ils «se fondent sur tout ce qui est intelligent: un nouvel angle pour aborder une vieille histoire, ou même une bande-annonce d’enfer», analyse-t-il.
«Don’t Breathe – La maison des ténèbres», qui sort en octobre en France, a ainsi reçu des critiques élogieuses aux États-Unis, et espère connaître le même destin que «Mister Babadook», «It Follows» et une série d’autres succès de l’épouvante concoctés avec une dizaine de millions de dollars ou moins. «Dans le noir», qui sort mercredi en France, a récolté 62 millions de dollars aux États-Unis en quatre semaines, pour un budget de 4,9 millions, et s’accroche au top dix du box-office.
Sans avoir la même force de frappe marketing que les grosses machines hollywoodiennes, les films d’horreur nouvelle vague ont réussi ces dernières années à en faire trembler plus d’une en ne comptant que sur la puissance du bouche à oreille. Par comparaison, «Suicide Squad», en tête du box-office nord-américain, a rapporté 238 millions de dollars en deux semaines pour un budget astronomique de 175 millions.
Les films d’horreurs, qui fleurissent chaque année l’été aux côtés des gros «block-busters» façon «Jason Bourne», ont parfois eu droit à des budgets colossaux, avec un résultat incertain. «L’exorciste: au commencement» (2004), remake du classique éponyme, a ainsi coûté environ 80 millions de dollars mais n’en a rapporté que la moitié.
Tout est dans le suspense
Ces dernières années, le producteur Jason Blum, qui a notamment co-financé «Whiplash», lauréat de nombreux prix prestigieux, s’est fait un nom comme l’un des maîtres de cette nouvelle vague. Il est parfois critiqué pour les minuscules cachets alloués à ses acteurs soumis à un traitement spartiate. Ethan Hawke, qui joue dans le premier volet de sa saga «American Nightmare», aurait même dormi sur son canapé pendant le tournage.
Son succès repose en grande partie sur une collaboration fructueuse avec les studios grâce à laquelle ses films sont distribués dans le monde entier, notamment la série «Insidious»: véritable cas d’école, le premier opus a rapporté 97 millions de dollars dans le monde pour un budget de 1,5 million. «It Follows» (2014), de Robert David Mitchell, est souvent cité comme l’une des figures de proue de cette nouvelle génération, dans la lignée des maîtres du genre comme les films de Wes Craven ou John Carpenter.
Après une relation sexuelle, une adolescente est soudainement poursuivie par une présence surnaturelle menaçante et, pour s’en débarrasser, elle doit elle aussi, de la même façon, la repasser à quelqu’un. L’un des acteurs, Daniel Zovatto, joue également dans «Don’t Breathe – La maison des ténèbres», de Fede Alvarez, dont c’est le second long métrage.
Le film suit un trio d’amis qui pénètre par effraction dans la maison d’un aveugle reclus, pensant se sortir facilement de ce forfait, avant qu’il ne tourne au cauchemar. Pour Daniel Zovatto, un acteur costaricain de 25 ans qui tient l’un des principaux rôles, des réalisateurs comme Alvarez ou Mitchell «amènent un nouveau regard sur le genre, ils changent la donne».
Fede Alvarez a réalisé en 2013 un remake relativement conventionnel du classique «Evil Dead» qui a rapporté 100 millions de dollars pour 17 millions de budget. Pour son nouvel opus, il dit avoir voulu éviter les incontournables du genre, les maisons hantées, tronçonneuses, zombies et autres. Agé de 38 ans, il a été nourri aux chefs d’œuvres d’Alfred Hitchcock, de «Psycho» à «Vertigo» en passant par «L’inconnu du Nord-Express».
Pour lui, l’essence de l’horreur n’est jamais «ce qui fait bondir de sa chaise, c’est toujours le suspense» qui vous visse à votre siège, a-t-il raconté, ajoutant aussi adorer les personnages «à la morale trouble». «J’aime qu’il faille choisir pour qui on prend parti et que ce ne soit pas moi qui vous fasse avaler qui est le héro, qui est le méchant, qui est le type marrant».
Le Quotidien/afp