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« Heart of a dog », un hommage à Lou Reed tout en délicatesse


Cet immense amour pour son mari, Laurie Anderson, performeuse, chanteuse, violoniste et poétesse, a voulu le traduire en film, 29 ans après avoir réalisé "Home of the Brave". (photo AFP)

L’artiste américaine Laurie Anderson rend hommage au rocker Lou Reed, son mari disparu en 2013, dans le film « Heart of a dog », en compétition à la Mostra de Venise, qui s’attarde avec délicatesse sur le sens de la vie.

Mariée avec le rocker américain pendant 21 ans, Laurie Anderson avait raconté à la presse le jour du décès de Lou Reed. « Je n’avais jamais vu une expression si belle. Ses mains étaient jointes, formant le 21 dans l’art du Tai Chi, soit l’eau qui coule. Ses yeux étaient bien ouverts. Je tenais dans mes bras la personne que j’aimais le plus au monde et j’ai pu lui parler jusqu’à ce qu’il meure. Puis son coeur a cessé de battre. Il n’avait pas peur et moi j’aurais été capable de marcher avec lui jusqu’à la fin du monde », avait-elle alors confié.

Cet immense amour pour son mari, Laurie Anderson, performeuse, chanteuse, violoniste et poétesse, a voulu le traduire en film, 29 ans après avoir réalisé « Home of the Brave ». « Heart of a dog » est un long-métrage de 75 minutes élégant, profond, émouvant et esthétique, durant lequel l’artiste de 68 ans évoque le deuil de son mari, mais aussi plus récemment de sa mère et de sa chienne terrier adorée, Lolabelle.

Gouttes d’eau qui perlent, feuilles bercées par le vent d’automne sur les arbres de New York… Le film est empreint de cette philosophie bouddhiste chère au couple. « Je préfère provoquer des réactions plutôt qu’expliquer mon travail », affirme Laurie Anderson, l’une des égéries de l’avant-garde artistique américaine.

« Il n’y a pas à pleurer »

Présence constante, la voix de l’artiste américaine est un chant qui explore les thèmes de l’amour, de la mort et du langage. Et pour la musique, qu’elle a également signée, elle utilise tant le violon, en solo comme en quartet, que l’électronique. Elle raconte sa propre vie, son enfance dans l’Illinois, son souvenir du 11 septembre 2001 à New York, mais aussi les vieux jours et le dernier souffle de sa chienne aveugle.

« La tristesse, il faut la ressentir mais il ne faut pas être triste », avait coutume de lui dire son gourou bouddhiste, un principe de vie qui sous-tend l’intégralité du film, qui mêle anecdotes et petits événements, comme tant de poésies en hommage à son mari. Ce dernier n’est cependant pas mentionné une seule fois.

« L’esprit de Lou est très présent dans le film, explique la veuve. Je voulais faire quelque chose qui soit un hommage à mon mari mais qui respecte aussi une partie de sa personnalité. Je voulais en particulier que le film reflète sa grande énergie ». Pour la réalisatrice, qui saisit l’occasion pour livrer ses réflexions personnelles sur la vie, ses angoisses, ses rêves et ses souvenirs, « la mémoire donne toujours une couleur différente » aux choses.

Elle médite sur ce que les bouddhistes appellent le « bardo », cet état intermédiaire après la mort de quelqu’un, qui dure 49 jours durant lesquels l’identité se décompose et la conscience se prépare à se réincarner en une autre forme de vie. « Il n’y a pas à pleurer » pour ses défunts, conseille l’artiste, soutenant que chaque histoire d’amour est avant tout une histoire entre fantômes.

En livrant aux spectateurs ses théories sur le sommeil, sur l’imagination et sur le deuil qui désoriente, Laurie Anderson pose le problème du temps et de son rapport avec l’identité. Est-ce cela un pèlerinage ? Et si oui, où va-t-on ?

 

AFP / S.A.