Il y a près de deux ans, il s’était confié au Quotidien à la sortie de Mesdames, album de duos fait avec et pour les femmes. Après 500 000 exemplaires vendus et une tournée des Zénith à guichets fermés, il se confie avant son passage aux Francofolies d’Esch-sur-Alzette, qui lance son été.
Bravo tout d’abord pour le succès de ce disque. Comment le vivez-vous ?
Je le vis très bien. Avec Quentin Mosimann, le compositeur, nous avons la chance de ne pas être blasés et d’avoir encore la capacité de prendre du recul. Nous avons conscience que c’est assez incroyable d’avoir une certification Diamant à notre époque. Cela arrive rarement dans une carrière et nous essayons d’en profiter au mieux. Un album est aussi un prétexte à la scène, et avec celui-ci, nous faisons une tournée incroyable. Nous avons fait 45 Zéniths, un Bercy et tous les festivals qui arrivent.
Est-ce que vous vous attendiez à un tel plébiscite sur ce projet ?
On ne s’attend jamais à ça et historiquement, les albums de duos ne marchent pas toujours. Ce n’est pas parce que l’on a tel ou telle artiste sur son disque, que l’on ramène leur public. Nous n’avions donc aucune notion de ce que pouvait en être le résultat.
Votre capacité à apporter quelque chose de différent à chaque album, une empreinte, n’est pas aussi l’une des raisons de ce succès ?
Oui mais je pense que c’est le lot de chaque artiste. Ce n’est pas parce que je fais du slam, que je parle plus que je ne chante, que je dois me renouveler plus que les autres. Chacun doit proposer des thèmes qu’il n’a jamais abordés, trouver le flow qui à la fois lui correspond et qui va lui permettre de chercher de nouvelles choses musicalement. Quentin Mosimann m’a aussi permis justement de me renouveler en faisant toutes les musiques de l’album et en apportant son univers. C’était d’ailleurs la première fois que j’ai écrit après les musiques. Je voulais me bousculer dans ma façon de travailler.
L’un des gros enjeux a-t-il aussi été de marier votre univers avec celui de chacune de vos invitées ?
Nous avons essayé à chaque fois de faire du sur-mesure. C’était tout d’abord une rencontre puis de parler avec chacune de ce que nous voulions. Il fallait aussi garder l’homogénéité du projet mais ce que nous avions préparé pour Suzane, nous n’allions pas le donner à Véronique Sanson par exemple, et inversement. Nous avons voulu pour chacune les mettre dans un confort tout en restant dans notre projet.
On retrouve aussi votre regard juste sur des sujets marquants de notre actualité, avec des titres tels que « Non-essentiels ». Qu’est-ce qui à un moment vous donne envie de coucher cela sur le papier ?
C’est compliqué car comme tout le monde, il y a des choses qui me sont insupportables, qui me semblent injustes et pour lesquelles je me sens légitime d’écrire. Sur « Non-essentiels », j’ai été choqué que subitement, les produits culturels étaient considérés comme non-essentiels, que les rayons se retrouvent balisés… C’était totalement absurde et ce terme de « non-essentiel » nous a fait du mal à nous les artistes. C’était vexant, maladroit. C’est en plus arrivé au moment où de fait, je devais encore repousser ma tournée donc cela m’a vraiment donné le besoin d’écrire ce texte.
Sur « Les gens beaux », vous prenez à juste titre partie pour Hoshi (également à l’affiche des Francofolies) et revenez sur les propos à son encontre de Fabien Lecoeuvre, lequel avait attaqué la chanteuse sur son physique.
J’étais révolté par les propos de ce type. Il a même voulu censurer la chanson. Je ne lui jette pas la pierre et je pense qu’il aurait mieux de faire profil bas, de passer à autre chose. A aucun moment je ne l’insulte et les seuls propos un peu tendus sont les siens.
Votre album cartonne, votre tournée aussi mais vous n’avez pas été nommé aux Victoires de la Musique. Comment l’avez-vous pris ?
Le système du collège des votants n’est pas très juste. Il ne favorise pas celles et ceux qui sont en indépendant, et c’est mon cas. Mais je ne lâcherais mon indépendance pour rien au monde. Je préfère faire mes projets comme je veux plutôt que d’être en major et pouvoir être nommé aux Victoires de la Musique. L’année précédente, j’en ai une mais c’était par le vote du public. (pour la chanson de l’année « Mais je t’aime » avec Camille Lellouche »). Il y a une petite injustice, d’autres l’ont dit aussi, mais ce n’est pas le plus grave.
Jouer devant des salles pleines est aussi une belle victoire et une reconnaissance.
Le soir des Victoires, j’étais à Montpellier, devant un Zénith complet, et c’est peut-être enfoncer des portes ouvertes que de le dire, mais c’est en effet ça le plus important. Le V des Victoires, je ne crache évidemment pas dessus, et cela reste toujours une reconnaissance pour son travail, pour son équipe…
Comment avez-vous vécu cette tournée ?
Ce n’était que du kif et après tant d’incertitudes avec les confinements, les reports…, nous ne savions pas si les gens allaient revenir. Cela avait mieux repris pour les concerts que pour le cinéma et le théâtre. Nous mesurons la chance que nous avons. Tout est complet, j’ai une superbe équipe et on s’amuse vraiment. C’est le privilège absolu que de vivre de sa musique, de voir les visages, de voir les sourires, de voir les gens chanter…
Vous commencez une tournée des festivals. Qu’avez-vous préparé ?
C’est un peu le même spectacle et nous nous adaptons à la configuration de chaque lieu. Nous avons cet écran monumental qui nous permet de retrouver mes invitées quand de fait, elles ne peuvent pas être présentes. On retrouve les chansons qui ont bien fonctionné en radios telles que celles avec Camille Lellouche, Louane, Suzane, Kimberose… Le public les attend et nous avons réalisé à chaque fois une sorte de clip qui nous permet sur scène d’avoir une interaction.
Envisagez-vous un « Mesdames 2 » ?
Pourquoi pas un jour, mais là non. Ce n’est pas rien un album de 14 duos, c’est un exercice génial mais c’est compliqué à mettre en place et c’est difficile de trouver la bonne alchimie des voix, des rythmes, la bonne musique, le bon texte… Le prochain album sera en solo, mais avec certainement un ou deux duos.
Est-ce que le fait d’avoir écrit ces textes pour les chanter avec des femmes a changé votre façon de travailler ?
Pas vraiment car j’avais déjà écrit pour d’autres femmes. Et j’aime me mettre au service d’artistes très différent. J’ai ainsi déjà fait trois chansons pour Céline Dion, j’ai aussi écrit pour Chimène Badi, Line Renaud… et côté artistes masculins, pour Johnny Hallyday, Idir, Charles Aznavour, Francis Cabrel, Yannick Noah… Je fais un peu de name-dropping mais c’est pour dire la chance que j’ai eue d’écrire pour ces gens-là. J’ai aussi écrit pour des inconnus, j’ai aussi écrit plein de trucs qui ne sont jamais sortis, comme tout le monde.
Envisagez-vous de collaborer de nouveau avec l’un ou l’autre de ces artistes ?
Cela dépend de leurs envies à chaque album, ce sont eux qui me contactent et je me mets ensuite dans leur univers pour leur apporter quelque chose. Pour Johnny, ce sera compliqué mais Céline Dion, j’espère en effet écrire de nouveau pour elle. J’aime écrire pour quelqu’un de différent de moi. Si c’est pour le faire pour quelqu’un de mon âge, qui me ressemble, autant garder le texte.
Et cette belle collaboration avec Quentin Mosimann, elle aura une suite ?
Nous avons pas mal de projets ensemble. Il sera aussi de nouveau présent sur mon prochain album. Nous allons encore collaborer ensemble un bon moment.
Après « Patients » et « La Vie Scolaire », pensez-vous à la réalisation d’un troisième long-métrage ?
Je travaille sur un scénario en effet. Ce n’est pas pour faire du mystère mais je ne peux pas en dire plus. C’est un tel projet, de longue haleine et sur un thème assez connu. On avance tranquillement.
J’étais fan de l’artiste, je connaissais bien son projet et je définirais cela comme un heureux hasard, tant sur la rencontre que sur les productions. Cela a été une accumulation de bonnes surprises. Mon challenge a été de ne pas dénaturer l’univers de Grand Corps Malade tout en apportant ma touche. J’ai toujours aimé les grandes mélodies et il y avait quelque chose à faire. L’exercice le plus difficile pour lui fut d’écrire sur des musiques que je lui proposais et de trouver l’espace pour slamer.