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Fusion Bomb secoue la scène metal grand-ducale


Fusion Bomb lance un premier album sans concession, technique et puissant, fleurant bon les années 80. (photo DR/Micha)

Fusion Bomb, jeune groupe du Luxembourg, célèbre le thrash metal des «eighties». En témoigne son album « Concrete Jungle », qui sort samedi lors d’un concert à la Rockhal (20h30). Rencontre avec le frontman Miguel Teixeira Sousa et le guitariste Luc «Lanthanoid Lazer-Dazer» Bohr.

Pour vous deux, que représente le thrash metal ?

Luc : C’est une chose fascinante! Il s’est imposé dans les années 80 face au heavy metal, en se montrant plus fort, plus agressif que n’importe quel autre style de musique. Oui, c’est une forme de rébellion qui, de surcroît, conjugue différents arguments : la puissance, le groove, la mélodie… Et franchement, c’est amusant de le jouer. Moi, ça m’éclate! (il rit)

Miguel : Pour moi, c’est un style que j’ai toujours écouté à l’école avec mes potes. Et si j’ai bifurqué à plusieurs reprises, je suis toujours revenu au thrash pour son énergie, sans aucun équivalent. Dans un sens, cette musique, c’est un vrai exutoire.

Fusion Bomb se réfère à l’âge d’or du thrash des années 80. Êtes-vous nostalgiques de cette période que vous n’avez pas connue ?

Luc : C’est vrai, nos principales influences viennent des années 80, mais c’est l’époque qui veut ça… On n’a jamais fait de meilleurs albums qu’en ce temps-là. Au niveau de la création, on est au sommet ! Aujourd’hui encore, quand on écoute ces vieux disques, ça reste brut, massif. Parallèlement, en comparaison, certains groupes du moment sonnent faux. Et je n’aime pas le plastique !

Miguel : C’est clair, on aurait aimé connaître cette scène, cette effervescence, les concerts puissants où l’on ressort secoué, la lèvre en sang… Mais en tant que groupe, il faut savoir vivre à son époque et en ce sens, pour exister, les réseaux sociaux sont très utiles. Si ça se trouve, avec 20 ans de plus, on serait restés de simples spectateurs… Et n’exagérons pas, certains groupes du moment sont excitants, et d’autres, plus anciens, sont moins pertinents avec les années qui passent. J’ai encore écouté récemment Morbid Angel et franchement, le mixage est abominable (il rit).

Comment êtes-vous perçus, ici, au Luxembourg ?

Miguel : C’est un fait mais la scène thrash est maigre au pays. En dehors de Scarlet Anger, Sublind et nous, sans oublier des projets sporadiques, je ne vois pas qui d’autre en est représentatif. Surtout depuis que l’on n’a plus de nouvelles de Scarred… En somme, on est les plus jeunes, genre le groupe du quartier !

C’est quoi, au fait, cette « concrete jungle » ?

Miguel : (Il réfléchit) Mince, je n’ai pas révisé… C’est un voyage vers les aspects les plus ténébreux du monde, inspiré de la nouvelle Heart of Darkness de Joseph Conrad (1899), qui, au passage, a inspiré le film Apocalypse Now. C’est aussi une réflexion sur la société, son aspect oppressant et l’opposition entre individualisme et collectivisme. Doit-on exprimer notre personnalité en marge des groupes quitte à prendre le risque de se déshumaniser ? Telle est la question…

Vous dites lutter contre le faux metal et le thrash « bon marché ». C’est-à-dire ?

Miguel : Il y a plein de groupes sur lesquels on est tombés où l’on ne ressent pas, disons, un véritable engagement. Attention, on ne dit pas que le thrash metal doit être sérieux, mais franchement, se contenter de parler de bières, de pizzas, de filles et de soirées, c’est assez limite, non ?

Luc : C’est une mode qui vient notamment d’Allemagne, avec des formations qui manquent cruellement de créativité. Pour elles, la vie, c’est la fête, le skate-board… Bien sûr, je n’ai rien contre ça, mais textuellement, on peut quand même aller plus loin. Du coup, ça ne sonne pas vraiment comme une rébellion (il rit).

Et la rébellion, ça vous parle?

Miguel : Oui, quand on fait une chanson qui s’intitule You’re a Cancer to This World, c’est qu’on a quand même quelque chose à dire. Mais on sait aussi sortir de la critique sociale et se montrer plus léger. C’est un équilibre à trouver.

« Concrete Jungle » sort samedi. En êtes-vous satisfaits ?

Luc : Je suis arrivé dans le groupe alors que l’album était écrit et c’est franchement du bon boulot. Après, il y a des choses que j’aurais faites autrement, notamment sur certaines parties, trop mélodiques à mon goût. C’est ma seule critique car l’ensemble est hétérogène… et de qualité!

Miguel : Personnellement, je ne me rappelle pas avoir écrit, par le passé, d’aussi bonnes chansons. Cet album est également fidèle à notre approche transversale, qui combine un groove à la Pantera à d’autres choses mélodiques et surtout hétérogènes, comme le fait Exodus. Bref, je suis content !

Vous avez avoué qu’au départ vous ne vous destiniez pas à devenir chanteur. Comment vous en êtes-vous sorti, surtout que le chant, dans le thrash, nécessite quelques aptitudes…

Miguel : Au début, c’étaient seulement des cris. Ce n’était pas contrôlé, mais au fil du temps, j’ai réussi à maîtriser, disons, ce chant « saturé ». Bon, c’est vrai, à chaque répétition, je n’avais plus de voix, mais là, ça va mieux. En cinq jours d’enregistrement – intensifs – de l’album (NDLR : au Holtz Sound Studios à Tuntange), j’ai appris plus de trucs qu’en tournée ou en concert. Comme je n’avais plus de gorge, je me suis mis à boire et à fumer. Il paraît que ça renforce (il rit).

Sur scène, comment se comporte Fusion Bomb. Tout est-il dans le nom ?

Miguel : On essaye d’envoyer la bombe à chaque fois ! Notre batteur fait des grimaces, notre bassiste court partout… Oui, je crois qu’on donne de notre personne.

Luc : C’est la chose la plus importante et excitante. Devant un public, on se doit de représenter notre style, notre philosophie. Faire un show à notre image.

Et quelle est-elle ?

Miguel : (Il rit) On a fait un concert à la Rockhal et la technicienne responsable des lumières nous a dit que l’on avait le look de ses oncles ! C’est à cause de nos jeans serrés, de nos grosses baskets et de nos tee-shirts vintage. Notre batteur, Scoot, met aussi de vieux shorts de tennis ! Ce n’est pas un déguisement, seulement, on reste fidèles à nos racines.

Luc : En plus, je crois que l’on est le seul groupe au Luxembourg dont les membres ont tous les cheveux longs. Eh oui, on assume à 100% !

Entretien avec Grégory Cimatti