Gros festivals et stars internationales sont de plus en plus préoccupés par leur bilan carbone, multipliant les initiatives, entre trouvailles, bonne volonté et, parfois, communication pour se donner bonne conscience.
Trois avions, 270 tonnes de matériel, scène de 800 m2… Les données livrées par la production de Madonna pour son récent concert-évènement à Rio semblent venir d’un autre âge. Un groupe-star comme Coldpay, lui, met en avant une réduction de ses émissions de CO2 de 59 % sur les deux premières années de sa tournée mondiale par rapport à la précédente (2016-2017).
La formation de Chris Martin a, entre autres, compressé son fret ou encore installé des dalles génératrices d’électricité grâce aux mouvements de son public.
Mais Coldplay prend toujours l’avion pour ses tournées XXL, ce qui lui vaut l’étiquette «d’idiots utiles du greenwashing» aux yeux de ses détracteurs. «Ce sont les trois grandes questions, car ça fait quinze ans qu’on est passé au tri des déchets, gourdes et que le zéro plastique progresse : comment viennent les artistes, avec quel matériel, et comment vient le public en festival ?», synthétise Frédéric Hocquard, adjoint à la maire de Paris en charge du tourisme et de la vie nocturne.
«Quasiment pas de matériel»
Cette année, 110 000 festivaliers ont assisté à We Love Green (WLG), événement musical parisien – qui s’est déroulé du 31 mai au 2 juin – en pointe sur les questions environnementales, comme l’indique son nom. La star américaine SZA s’y est rendue avec «quasiment pas de matériel», précise Marianne Hocquard (aucun lien de parenté avec l’adjoint), responsable développement durable à WLG. «On met un parc de matériel à la disposition des artistes sur place», insiste-t-elle.
Rio Loco, festival à Toulouse (80 000 festivaliers cette année mi-juin), joue sur d’autres cordes. «On a une programmation pensée à partir d’une thématique, on incite les artistes à rester plus longtemps sur place», expose son responsable Fabien Lhérisson.
À WLG, des clauses sont aussi intégrées dès la négociation de la venue des artistes. «Comme celle qui limite la puissance énergétique fournie sur telle scène à tel créneau… C’est aussi un gros levier de sensibilisation», détaille Marianne Hocquard.
Jet privé déprogrammé
Les «accès électriques» constituent une piste de travail qui «relève de la puissance publique, dans les endroits où sont installés des festivals au milieu des champs, dans un hippodrome, un bois, à la confluence de deux fleuves, car même le biocarburant pour les groupes électrogènes, ça produit du CO2», établit Frédéric Hocquard. Plus radical, mi-mai, le festival Bon Air à Marseille a déprogrammé cette année le DJ I Hate Models en apprenant qu’il venait en jet privé.
À propos d’avion, l’angle mort de la communication de Coldplay, c’est son public qui prend ce moyen de transport. Comme pour d’autres stars internationales. «On a vu un pic d’arrivées dans les aéroports parisiens pour les concerts de Taylor Swift», note ainsi Frédéric Hocquard.
Les billets des stars en France sont moins chers qu’aux États-Unis et pour le même prix des fans américains peuvent s’offrir un séjour parisien.
En vélo, en train ou en bus
«Le transport du public, c’est 56 % de notre bilan carbone total», avance Marianne Hocquard. We Love Green, comme d’autres festivals, à l’instar des plus modestes Francofolies d’Esch, promeut les mobilités douces (comme privilégier les transports en commun…).
Aménagement et messages autour du vélo, y compris la participation à des convois (comme avec la Fédération française de cyclotourisme), pour venir de loin, ont été accentués cette année. «En 2023, 8 % des festivaliers disaient être venus à vélo, là, c’est 14 %. C’est encourageant, et ce, malgré la météo pluvieuse cette année», commente Marianne Hocquard.
Même stratégie aux renommées Eurockéennes à Belfort, où «un festivalier sur six vient à vélo, ce qui est assez colossal», indique Hervé Castéran, responsable communication de ce rendez-vous, qui a accueilli 125 000 festivaliers l’an dernier (20 000 ont utilisé un train régional l’an passé) et un peu plus cette année (127 000). Enfin, Björk espérait dans une interview qui a circulé en ligne qu’«Elon Musk et ses amis de la tech feraient un jour des bus de tournée électriques».