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[Exposition] La réalité virtuelle débarque dans le monde artistique


"Björk Digital" est une étonnante exposition immersive - et itinérante ", regroupant notamment les projets de réalité virtuelle de l'artiste-chanteuse islandaise.

Grâce à la réalité virtuelle, on peut projeter images, dessins ou toiles dans la troisième dimension et même entrer soi-même dans l’œuvre plutôt que de rester dans la posture du regardant. L’art virtuel crée un espace aux innombrables possibilités.

Partir à la rencontre de soldats en RD Congo, se balader dans la bibliothèque d’Alexandrie ou entrer dans l’univers de Björk… Plusieurs expositions, à Paris comme ailleurs, renouvellent le genre en emmenant le public dans des visites virtuelles grâce à un casque. «Les jeunes sont plus à l’aise avec ces technologies qui font partie de leur environnement. Mais la réalité virtuelle attire et intrigue toutes les générations», estime Marcella Lista, du Centre Pompidou à Paris, où on suit de près l’émergence de ces innovations. Une exposition en lien avec la réalité virtuelle est d’ailleurs prévue en 2018.

À la Bibliothèque nationale de France (BnF), l’exposition «La bibliothèque, la nuit» (jusqu’au 13 août) offre un voyage saisissant de dix grandes bibliothèques, réelles ou imaginaires, comme la bibliothèque mythique d’Alexandrie ou celle installée dans le Nautilus par le capitaine Nemo. Ici fini l’audioguide ou le cartel explicatif, le spectateur, sans quitter son fauteuil, les découvre au moyen de lunettes de réalité virtuelle exploitant une technologie d’immersion vidéo à 360 °.

«The Ennemy», une installation présentée en première mondiale à l’Institut du monde arabe va plus loin encore dans le monde virtuel. L’installation, conçue par Karim Ben Khelifa, photographe-reporter de guerre belgo-tunisien depuis 15 ans, permet de rencontrer virtuellement de véritables combattants des conflits israélo-palestinien, de République démocratique du Congo et du Salvador.

«Spec-acteur au lieu d’être «spectateur»

Équipé d’un casque, d’un sac à dos-PC, le visiteur s’engage pour une expérience évolutive de 50 minutes dans un espace de 300 m², lui permettant d’entendre ces combattants décrire leur vie, dans leur propre langue sous-titrée. «Il y a un côté personnel où on est impliqué dans la démarche, c’est assez nouveau, même si ce côté immersif peut être assez déstabilisant», explique Aurélie Clémente, directrice du département des expositions.

Succès garanti auprès de scolaires de la banlieue parisienne venus tester l’installation : «Ils étaient turbulents. Ils sont rentrés dedans, c’était un bonheur. Ils sont sortis, ils étaient dans l’écoute», se réjouit Karim Ben Khelifa. Le dispositif, qui a nécessité pas moins de trois ans de travail selon la société en charge de la partie réalité virtuelle, Emissive, intègre les dernières avancées de la recherche en neurosciences afin de personnaliser la visite et accroître l’interaction.

«On est plutôt favorable à s’ouvrir à ce type de projet, ça permet de toucher certains sujets d’actualité qu’il est difficile d’aborder autrement», ajoute Aurélie Clémente. Ailleurs dans le monde, la chanteuse islandaise Björk propose une exposition immersive et itinérante intitulée «Björk Digital», déjà montrée à Sydney, Tokyo ou Londres. Visible à Barcelone à partir d’aujourd’hui, elle rassemble des expériences de réalité virtuelle, des projections vidéo et un espace éducatif interactif permettant de plonger dans l’univers de la star.

Pour Philippe Fuchs, professeur de réalité virtuelle à Mines ParisTech, la réalité virtuelle ne se réduit pas à l’utilisation d’un casque, mais nécessite en plus une réelle interactivité. De nombreuses expositions annoncent être en réalité virtuelle, alors qu’il s’agit simplement de vidéo à 360 °, car «c’est plus à la mode, c’est plus vendeur!», dit-il. Lors de la visite d’une exposition classique, «on ne touche à rien, on ne fait qu’observer, regarder, admirer l’œuvre», rappelle-t-il. En revanche, lors d’une visite en réalité virtuelle, le public doit «interagir par rapport à l’œuvre et celle-ci va se transformer, se modifier en fonction de son action. Au lieu d’être spectateur, on est spec-acteur», conclut cet expert.

Le Quotidien/AFP