Le Cercle Cité participe au Mois européen de la photographie à travers l’exposition «Borderlines – Looking for the Clouds», à découvrir gratuitement au Ratskeller jusqu’au 26 juin prochain.
Parmi les 24 expositions proposées au Grand-Duché dans le cadre du Mois européen de la photographie, dont l’édition 2017, porte le titre générique de «Looking for the Clouds» et s’intéresse en grande partie à la thématique des migrants, l’exposition du Cercle Cité est très probablement une de celles qui respecte le plus scrupuleusement le thème principal. Normal, ce sont les deux chevilles ouvrières du Mois de la photographie national, Paul di Felice et Pierre Stiwer, qui en sont directement les commissaires.
Le visiteur peut y découvrir un total de 84 photos : 6 de Balazs Deim, 6 de Dimitris Michalakis, 11 de Martin Kollar, 13 de Patrick Galbats, 18 de Julian Röder et 30 de Florian Rainer. Des photographies qu’on peut regrouper dans la case «photo documentaire», «de reportage» et qui proposent «malgré tout une approche artistique et conceptuelle», assure Paul di Felice. Et elles sont, en plus, présentées au public avec un souci clair de surprendre.
D’autant qu’elles tendent toutes vers un même questionnement général. « »Borderlines » doit se lire comme expression d’une crise qui atteint son paroxysme tout comme une réflexion sur les limites, les frontières – tant dans son sens premier que son expression métaphorique», notent les responsables. «Les réflexes de rejet lors de la crise des réfugiés, le repli sur soi, la résignation ou l’agressivité que le chaos économique engendre dans certains pays, la méfiance généralisée devant l’étranger – d’où nécessité de le surveiller – tous ces aspects sous-tendent les discours des divers acteurs actuels et l’orientent vers une violence encore contenue, mais de plus en plus visible.»
L’ambiance, tendue, de ces années
Dans les quelques mètres carrés du Ratskeller, le visiteur voyage ainsi des camps de réfugiés du Luxembourg, immortalisés par Patrick Galbats en 2016/17 pour sa série «Espace(s)», en Grèce, Israël, Autriche, Hongrie ou encore aux Émirats arabes unis. Pas pour y faire du tourisme ou regarder ses plus beaux monuments, mais au contraire, pour y sentir l’ambiance, tendue, de ces dernières années.
Ainsi, c’est la Grèce des années de crise économique que présente Dimitris Michalakis dans sa série «Burnout», entre manifestations, insécurité, peur, rage, fatalisme… La Hongrie, photographiée ici aussi bien par Patrick Galbats («Hungary«) que par Balazs Deim («Surveillance»), avec d’un côté des détails étonnants, de l’autre l’utilisation excessive de caméras de surveillance – prise à contre-pied ici avec l’utilisation de camera obscuras qui par les temps d’exposition très longs, fixent sur l’image les lieux, mais pas les personnes – est celle de la montée de l’extrémisme et d’une certaine tension sociale. L’Israël, où nous entraîne Martin Kollar, est un pays paranoïaque où chaque déplacement est contrôlé comme cela se faisait auparavant dans le bloc de l’Est. L’Autriche de Florian Rainer («Fluchtwege») est celle qui accueille les réfugiés en 2015, tandis que les Émirats de Julian Röder («World of Warfare») sont ceux qui reçoivent le salon international de la Défense, où de belles hôtesses vendent des armes de destruction massive, comme d’autres font la pub pour des voitures.
Pablo Chimienti
Cercle Cité – Luxembourg. Jusqu’au 26 juin.