À Paris, l’oeuvre du peintre britannique, frémissante de vie et de couleurs, se montre en grand à travers plus de 400 créations réalisées ces 25 dernières années. Sublime.
Des piscines californiennes à la Normandie et l’au-delà : le peintre britannique David Hockney, 87 ans, s’expose en grand à la fondation Vuitton à Paris à partir d’aujourd’hui, comme un concentré de vie frémissante offert au public à l’approche de la mort. «C’est probablement l’exposition la plus importante de sa vie», confie la commissaire générale Suzanne Pagé en citant l’artiste et en racontant combien il s’est investi dans sa conception, en dépit d’une santé déclinante.
Plus de 400 œuvres figuratives aux couleurs éclatantes, dessins au fusain ou à l’encre mais aussi oeuvres numériques (sur iPhone ou iPad), réalisées entre 1955 et 2025, sont exposées, retraçant les 25 dernières années de son travail mais aussi ses débuts avec des oeuvres emblématiques comme les piscines californiennes. Les thèmes sont récurrents : des portraits de proches et des artistes qu’il a fréquentés, des autoportraits et les paysages de Normandie – où il s’est exilé après le Brexit, pendant la crise du Covid et jusqu’en 2023 – ou de son Yorkshire natal.
Peinture transfigurée
«Il reste fidèle à qui il est, il n’y a jamais dérogé et a adopté toutes les techniques avec une habileté extraordinaire», souligne Suzanne Pagé. «La peinture reste sa grande référence», dit-elle encore, et il la transfigure grâce aux nouvelles technologies tout au long du parcours. Un soleil mouvant enveloppe ainsi progressivement une série de paysages : par séquence de quelques minutes ses rayons, des traits jaune vif, s’allongent jusqu’à ce qu’il se couche dans une symphonie d’orange. Avec «une capacité d’émerveillement à restituer la vie», souligne-t-elle.
Et «à se renouveler», ajoute l’écrivaine Catherine Cusset, qui réédite Vie de David Hockney (Gallimard), à l’occasion de l’exposition. Ce roman parle de façon très intime de l’artiste rencontré à plusieurs reprises depuis la première édition en 2018. Il lui a donné sa bénédiction en lui accordant même la reproduction d’une cinquantaine de ses tableaux pour accompagner son texte. «Comme Picasso, il ne fait pas de tableaux, il explore. Il n’est jamais resté enfermé dans le succès, il a toujours suivi son désir, le plaisir lui sert de boussole, il faut que quand il travaille il y ait un frémissement qui est celui de la vie», ajoute-t-elle.
Le monde est vraiment vraiment magnifique si vous le regardez
Exposée au-dessus de l’entrée de la fondation, une phrase accueille le visiteur. Il l’avait confiée en 2021 à Paris à propos du confinement : «Rappelez-vous, jamais ils n’aboliront le printemps». «Jamais la mort n’abolira le printemps», traduit l’écrivaine. «Une leçon de vie élémentaire et merveilleuse», commente de son côté Suzanne Pagé. L’exposition débute par le premier portrait peint par l’artiste, son père (1955), à peine montré et déjà acheté alors qu’il est en formation à Bradford, sa ville natale, avant d’aller étudier à Londres.
Méditation sur la mort
Il voyage ensuite à Berlin, New York puis en Californie où il va connaître le succès avec ses oeuvres autour des piscines – A Bigger Splash (1967), Portrait of an Artist (1972) – dans un état qui symbolise la liberté pour celui qui peut vivre pleinement son homosexualité, toujours revendiquée, mais qui reste alors illégale en Angleterre. Parmi les trésors exposés, d’immenses «dessins photographiques» représentant une foule (d’amis) rassemblée face à un miroir, (Pictured Gathering with Mirror, 2018) ou encore un autoportrait de dos devant des tableaux de fleurs où chaque détail (bouteille d’eau, paquet de cigarettes) prend vie.
Autre découverte : son travail sur l’opéra qu’il a mis en scène, façon exposition immersive, en présentant une création polyphonique de ses dessins de décors et costumes depuis les années 1970. L’exposition se clôt sur trois oeuvres inédites dont un autoportrait très récent, comme une méditation sur la mort et l’au-delà. «Il est très lucide, n’ignore pas qu’il pourrait mourir. Il dit lui-même que ces oeuvres sont probablement des oeuvres spirituelles», conclut Suzanne Pagé.
«David Hockney 25» Jusqu’au 31 août. Fondation Louis Vuitton – Paris.