Depuis plus de 65 ans, elle brille sur les écrans de cinéma. Cet été, Paris lui consacre deux expositions photo. À bientôt 80 ans, Catherine Deneuve, icône parmi les icônes, cultive simplement la liberté de penser… et de jouer !
L’une, Julia Gragnon, photographe et directrice de la Galerie de l’Instant, à Paris, dit se rappeler encore et toujours de «cette voix unique, rassurante, claire et douce, qui me racontait des histoires de dessins animés Disney sur 33 tours». L’autre, Jérôme Godeau, écrivain et historien de l’art, évoque ces images qui «sont des renvois d’émotions, de souvenirs-passions de cinéphiles qui s’entrecroisent et se projettent sur tant de blondeur. La Geneviève des Parapluies, la Séverine de Belle de jour, la Tristana de Luis Buñuel…»
Et, en cet été, Paris fait la fête à Catherine Deneuve avec deux expositions de chaque côté de la Seine, à la Galerie de l’Instant et à l’Hôtel Lutetia. Catherine Deneuve, rive droite, rive gauche… Des photos prises au fil des années par quelques «pointures» du genre, dont Claude Azoulay, David Bailey, Kate Barry, Helmut Newton, Bettina Rheims, Bert Stern ou encore Ellen von Unwerth. Catherine Deneuve, bientôt 80 ans, plus sublime que jamais.
À 13 ans, élevée dans une famille dont, on l’apprendra plus tard, le père n’aura pas été un bon exemple face à l’ennemi en temps de guerre, elle débute au cinéma par une figuration dans Les Collégiennes (André Hunebelle, 1957). Trois ans plus tard, elle suit sa sœur, Françoise Dorléac, dans un casting pour le rôle de sa cadette dans Les Portes claquent de Jacques Poitrenaud. À ce sujet, elle confie : «Ma sœur, elle, avait fait le conservatoire, elle faisait du théâtre et pour moi, c’était elle l’actrice. Je l’ai accompagnée parce que ça m’amusait de jouer sa sœur dans un film, mais je ne pensais vraiment pas à continuer.»
Catherine Deneuve, ça a été, c’est et ce sera toujours une star en liberté !
Pour ne pas être confondue avec sa sœur, elle garde son prénom, mais prend le nom de sa mère. Plus tard, elle avouera une pointe de regret : «Il n’y a rien à faire, Deneuve ne sera jamais mon nom. C’est mon nom d’actrice.» Réunies dans Les Demoiselles de Rochefort (Jacques Demy, 1967), elles chanteront : «Nous sommes deux sœurs jumelles / Nées sous le signe des gémeaux…»
À l’affiche, cet automne, de Bernadette (lire encadré), tenue pour une des plus grandes actrices françaises, Deneuve a été l’égérie de Luis Buñuel et Jacques Demy, et tourné avec nombre des géants mondiaux du 7e art, dont Roman Polanski, Mauro Bolognini, Marco Ferreri, Dino Risi, Hirokazu Kore-eda, Lars von Trier… Ce qui ne l’a pas empêché, depuis quelques années et à de nombreuses reprises, de se glisser dans l’aventure d’un premier film avec un réalisateur totalement débutant…
Et Julia Gragnon d’évoquer «son regard unique, sa blondeur, les fantasmes et autres projections qu’elle inspire…sa relation aux artistes, à la mode, son amitié avec Yves Saint-Laurent»… et de préciser : «Le propos de cette exposition est une invitation à célébrer la beauté, la magie du cinéma et la liberté farouche d’une actrice et d’une femme fascinante, loin de cette image figée et distante qu’elle réfute.»
Icône parmi les icônes, Catherine Deneuve est le plus bel exemple d’une certaine «French touch». Élégance, raffinement, ne négligeant pas une pointe d’humour, voire d’ironie tout en cultivant une discrète attention à l’autre, et aussi la liberté de penser et de jouer… Oui, Catherine Deneuve, ça a été, c’est et ce sera toujours cela. Une star en liberté!
Galerie de l’Instant. Paris. Jusqu’au 1ᵉʳ octobre. / Hôtel Lutetia. Paris. Jusqu’au 8 septembre.
Dans la peau
d’une Première dame
Ce sera, nous assure-t-on, un des grands rendez-vous cinématographiques de l’automne. Le premier film de Léa Domenach, simplement titré Bernadette et qu’elle a coécrit avec Clément Dargent, devait être présenté sous un autre titre : La Tortue… Aux côtés de Denis Podalydès, Laurent Stocker ou encore Michel Vuillermoz, Deneuve ajoute une pierre à sa filmographie vertigineuse. Peut-être la star a-t-elle été convaincue par Léa Domenach après avoir lu son livre, Les Murs blancs, écrit avec son frère Hugo…
Bernadette, c’est Bernadette Chirac, bien sûr. Quand elle arrive à l’Élysée, la Première dame s’attend à obtenir enfin la place qu’elle mérite, elle qui a toujours œuvré dans l’ombre de son mari pour qu’il devienne président. Mise de côté, car jugée trop ringarde, Bernadette décide alors de prendre sa revanche en devenant une figure médiatique incontournable. Ainsi, Denis Podalydès, en conseiller de communication, s’adresse à «Bernadette» Deneuve et lui fait part des résultats d’une «enquête de satisfaction» : «Madame Chirac, comme Claude ne m’a pas donné de budget pour commander un vrai sondage d’opinion, je me suis permis d’en réaliser un moi-même sur le personnel de l’Élysée. Alors, ne vous inquiétez pas, je dois vous prévenir, les résultats ne sont pas bons… Les gens vous trouvent ringarde, froide, austère, acariâtre, à égalité avec revêche…» Donc, opération désobéissance pour la Première dame.
La réalisatrice, qui a tenu à être «entièrement libre pour l’écriture du film», explique s’être «librement inspirée de la vie» de Bernadette Chirac, et précise : «Tout ce que le spectateur verra n’est pas vrai.» Certes, le film est basé sur des faits avérés, des anecdotes et des petites phrases recueillies çà et là, mais il s’autorise de nombreuses libertés pour proposer un portrait plein d’humour et de tendresse de celle qui a longtemps été dans l’ombre de son mari. Et des personnes présentes lors du tournage sont catégoriques : tant pour un relooking par Karl Lagerfeld que pour le lancement de l’opération des Pièces jaunes ou encore sa carrière politique en Corrèze et sa visite officielle avec Hillary Clinton, Catherine Deneuve s’est glissée avec une grâce et un humour dans le personnage de Bernadette Chirac, surnommée «la Tortue» par son mari. Pour sa part, la famille Chirac a fait savoir qu’elle ne cautionne pas le film…