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[Expo] A Luxembourg : libre comme Dubuffet


Après Jean-Michel Basquiat en mai 2016, la galerie Zidoun-Bossuyt poursuit sur ses élans grandiloquents et s'attache à l'aventureux travail de Jean Dubuffet. (© ADAGP, 2017)

Après Jean-Michel Basquiat en mai 2016, la galerie Zidoun-Bossuyt poursuit sur ses élans grandiloquents et s’attache à l’aventureux et prolifique travail de Jean Dubuffet (1901-1985).

Jean Dubuffet, peintre et sculpteur, est surtout réputé pour être le fondateur du mouvement de l’art brut – comprendre l’art des non-initiés, celui réalisé par les enfants, les malades, les handicapés et ceux qui n’ont pas de références culturelles ni artistiques. Fait contre lequel s’insurge le spécialiste Daniel Abadie. «C’est sûr, il était fasciné par cet art, et il en a été le révélateur, mais il n’a jamais pu en faire, pour la raison qu’il était ultracultivé ! Son écriture peut être vue comme naïve, mais elle est en réalité très subtile.»

Voilà ce que s’attache à prouver la galerie Zidoun-Bossuyt, pendant un mois au cœur du Grund, après avoir célébré Jean-Michel Basquiat il y a un an et demi, et qui reprend ses envies de grandeur et ses allures muséales avec un autre représentant de l’art du XXe siècle. Et quel ambassadeur, étalant sa folle créativité sur près de 40 ans, enchaînant les périodes comme seul Picasso a su le faire. De très intéressants prêts – venant, en majorité, du Luxembourg, mais également de Suisse, de France et de Belgique –, témoignent de la liberté d’un artiste qui se voulait autodidacte et anticonventionnel.

C’est vrai, son aisance familiale – ses parents sont négociants aisés en vin – lui a permis d’oser l’aventure artistique sans trop souffrir financièrement de son audace, mais ce matelas sécuritaire n’explique en rien toutes les envies d’un homme, explorant chaque fois de nouvelles pistes toujours inattendues, et dont la philosophie pourrait être «ce qui a été fait n’est plus à faire»…

«Paris-Circus» et ses marionnettes de la ville

De son séjour à Vence, aux toiles terreuses et minimalistes, à ceux parisiens – où on le retrouve en compagnie de certains intellectuels «influençables» de l’époque (comme le poète belge Henri Michaux ou le critique français Jean Paulhan, tous deux essentiels dans l’avancée de son travail) – en passant même par le Sahara, Jean Dubuffet va pousser son sens de l’expérimentation assez loin, tout en gardant cet aspect faussement naïf qui va «lui coller définitivement à la peau».

L’exposition, riche d’une cinquantaine d’œuvres, illustre bien ces différentes étapes, même si manquent à l’appel certaines séries révélatrices de son hétéroclite ouvrage, pour des raisons de «fragilité», explique-t-on à la galerie. Tandis qu’au sous-sol, dessins (dont les très beaux Corps de dames, véritables Vénus préhistoriques) et autres étrangetés (disques, jeu de cartes) se côtoient, la réunion picturale se passe au-dessus, avec notamment Rue Montmartre (1962), de la rare série des «Paris-Circus», avec ses truculentes marionnettes de la ville, tout en vitalité et dérision.

Évidemment, «L’Hourloupe», sa plus longue période (1962-74), dévoile ses détournements d’objets domestiques à travers ces dessins «automatiques». Un style qui va s’étendre à la sculpture et à l’architecture grâce à la découverte du polystyrène expansé. Dubuffet réalise ainsi des œuvres monumentales comme le Groupe de quatre arbres à la Chase Manhattan Bank à New York – dont la maquette est visible. Ses assemblages de feuilles collés, mais aussi ses «Psycho-sites» – quand il met en relation des silhouettes à l’intérieur d’espaces vivement colorés comme ses deux dernières séries («Mires» et «Non-Lieux»), épurées, répondent aussi à l’appel. Autant de démonstrations d’un artiste total et affranchi.

Grégory Cimatti

Galerie Zidoun-Bossuyt – Luxembourg. À partir de jeudi et jusqu’au 4 novembre.

Un commentaire

  1. L’art brut, par définition n’est pas un MOUVEMENT !

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