Il n’a pas la notoriété de Disneyland, mais ses montagnes russes attirent 5 millions de visiteurs par an. Deuxième parc d’attractions en Europe, l’Europa-Park de Rust, dans le sud-ouest de l’Allemagne, célèbre ce week-end 40 ans d’une success-story méconnue.
Ce mastodonte des loisirs a été créé en juillet 1975 par un entrepreneur local qui souhaitait se doter d’une « vitrine grandeur nature » pour les manèges de foires qu’il fabriquait – et fabrique encore.
Depuis, la vitrine a bien grandi: sa superficie a été multipliée par six, sa fréquentation par sept et son nombre de salariés par 70. Quelque 3 500 personnes dont une moitié de Français – travaillent désormais sur le site de Rust, un village tout proche de la frontière française, entre Strasbourg en France et Fribourg en Allemagne.
Les manèges, restaurants, salles de spectacles et autres grands-huit y sont regroupés par quartiers, chacun inspiré par l’architecture, les couleurs et la culture d’une nation européenne: les visiteurs embarquent sur un drakkar viking dans le quartier scandinave aux maisons de bois peint, ou prennent place en Grèce dans un manège aquatique nommé « Poséidon », entouré de ruines antiques.
Vers la Chine ou la Floride
Quelque 90% des attractions ont été fabriquées par Mack Rides, l’entreprise familiale des origines, qui compte parmi les quatre principaux acteurs de ce marché mondial. Europa-Park, vaisseau amiral du groupe, n’est cependant pas le seul débouché: de ses ateliers de Waldkirch, à quelques kilomètres de Rust, les manèges sont majoritairement exportés, souvent sur d’autres continents.
« Nous avons beaucoup de clients en Chine, où se créent de nombreux parcs d’attractions », se félicite le patron de Mack Rides, Christian von Elverfeldt.
Des ateliers de haute précision à Waldkirch sortent des wagonnets aux décors fantaisistes, ainsi que d’énormes tronçons de rails d’acier, futurs éléments d’une montagne russe qui sera vendue plusieurs millions d’euros.
Avant d’assembler leurs manèges « made in Germany » en Floride ou à Dubaï, les équipes techniques des acheteurs séjournent à Europa-Park, où elles sont formées à leur usage. « Nous sommes les seuls au monde à disposer ainsi d’un parc comme vitrine de nos réalisations. C’est à Rust que nous développons nos nouveaux produits. Pour nous, c’est un vrai avantage compétitif », souligne M. von Elverfeldt, dont l’entreprise a vendu plusieurs manèges à Disneyland Paris.
Quarante ans après son ouverture, l’Europa-Park est devenu un géant des loisirs doté de cinq hôtels, 53 restaurants – dont l’un a décroché deux étoiles au Michelin – et plus de 100 attractions pour ses cinq millions de visiteurs annuels, dont un quart de Français.
« Nous, nous gagnons de l’argent ! »
« Nous pourrons grimper jusqu’à sept millions, mais ça devrait être dur d’aller au-delà », estime l’un des dirigeants de l’entreprise familiale, Michael Mack, le petit-fils du fondateur.
Disneyland Paris, ouvert en 1992, est loin devant, avec 14 millions d’entrées l’an dernier (et un pic de 16 millions en 2012).
Mais « on ne peut pas comparer. Disney joue dans une catégorie à part: c’est un parc de niveau mondial », analyse Didier Arino, du cabinet de conseil Protourisme.
« Disney, c’est le numéro Un, mais nous, nous gagnons de l’argent! », observe pour sa part M. Mack, en référence aux difficultés financières d’Euro Disney, l’exploitant français du royaume de Mickey près de Paris, qui a affiché une perte nette de près de 100 millions d’euros en 2014.
Europa-Park, lui, n’est pas coté en Bourse, et la famille Mack se refuse à communiquer ses résultats financiers. Elle se contente d’observer qu’elle n’a « jamais touché un centime de subvention publique » et qu’elle continue, année après année, à investir.
Dernier projet en date: un parc aquatique de 30 hectares, qui sera construit à proximité immédiate d’Europa-Park d’ici deux à trois ans, pour 100 millions d’euros.
« La clef de la réussite pour un parc d’attractions, c’est sa capacité à évoluer, à apporter de la nouveauté », estime M. Arino. « Europa-Park, c’est le triomphe du savoir-faire des entreprises familiales sur les technocrates qui n’ont pas le sens du client », juge l’expert.
AFP