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En Finlande, la vie monastique attire les jeunes


Se lever tôt, travailler dur et observer une stricte discipline : en Finlande, un nombre croissant de jeunes hommes se tournent vers la vie monastique, un attrait pour la religion qui surprend les experts.

En Finlande, autour de 63 % des 5,5 millions d’habitants appartiennent à l’Église évangélique luthérienne et seuls 1 % sont membres de l’Église orthodoxe qui obéit au patriarche de Constantinople. Dans ce pays nordique séculaire et progressiste, la chrétienté et le conservatisme ont gagné du terrain ces dernières années, surtout parmi les jeunes hommes. Longtemps composée de dix moines, la confrérie du monastère de Valamo (sud-est), rare monastère de l’Église orthodoxe présent en Finlande, a quasiment doublé en volume et en compte aujourd’hui 18.

«J’étais d’abord très sceptique vis-à-vis de ce phénomène», relève Kati Tervo Niemela, professeure de théologie pratique à l’Université de l’est de la Finlande. Mais, année après année, les résultats des enquêtes à ce sujet confirment un accroissement de l’intérêt des jeunes Finlandais pour la religion.

À Valamo, un bâtiment d’un blanc éclatant, la journée commence aux aurores. Dès six heures du matin, les moines se lèvent, prient, prennent leur petit-déjeuner et partent nourrir les moutons, créer des bougies et s’occuper des tâches administratives – un programme intact depuis plusieurs centaines d’années. «Je dirais que la pandémie de Covid-19 a été un tournant», raconte l’archimandrite Père Michael.

Les pères de l’Église répondaient très bien aux questions que je me posais

Il reçoit régulièrement des courriels de la part d’hommes âgés de 15 à 25 ans souhaitant discuter de leur foi et, à l’occasion, de leur envie de rejoindre le monastère. «Il y a quelque chose dans notre époque» qui suscite cela, avance Père Michael. «Peut-être est-ce à cause de la période incertaine que nous vivons, les gens recherchent la stabilité, quelque chose sur quoi s’appuyer.»

À l’intérieur d’une vieille église en bois, où icônes et autres peintures religieuses ornent les murs, père Stephen, 23 ans, a «toujours su» qu’il deviendrait un jour moine. «C’est génial», s’enthousiasme le jeune homme qui a grandi dans une famille orthodoxe. Avant d’opter pour une vie monastique il y a deux ans, Stephen était empêtré dans les soucis de la vie quotidienne : étudiant endetté, il s’inquiétait de l’augmentation des coûts et cherchait sa place dans la société. «Ensuite, il y a eu la guerre en Ukraine, ce qui a encore empiré les choses», décrit-il. Rejoindre le monastère «élimine tous ces stress terrestres».

Selon Kati Tervo Niemela, certains jeunes hommes sont particulièrement attirés par des structures religieuses conservatrices, comme l’Église orthodoxe patriarcale. Un choix souvent motivé par leur opposition à l’Église évangélique luthérienne qui bénit un nombre croissant d’unions entre personnes de même sexe, analyse-t-elle. D’autres disent s’inspirer d’influenceurs comme Andrew Tate, une figure controversée pour ses opinions misogynes et son apologie du «mâle alpha». Une glorification croissante du conservatisme chez les jeunes hommes a également été observée dans d’autres pays, fait valoir la professeure. «Ces jeunes hommes trouvent dans le christianisme quelque chose qui les soutient en tant qu’hommes dans une société où ils ont l’impression que la masculinité n’est pas valorisée», note-t-elle.

À l’inverse, les jeunes Finlandaises expriment pour leur part un fort attachement aux valeurs libérales. «Nous avons beaucoup plus d’hommes qui attendent des femmes qu’elles se comportent comme des femmes traditionnelles que de femmes qui veulent jouer ce rôle», constate Kati Tervo Niemela.

Portant une soutane noire, sa longue chevelure nouée recouverte d’une coiffe traditionnelle, le hiérodiacre Raphaël, 29 ans, a rejoint le monastère de Valamo il y a six ans, après avoir obtenu son diplôme de philosophie. «J’ai reçu une éducation très conventionnelle en tant que luthérien en Finlande. Nous allions à l’église une ou deux fois par an, ce qui signifie que nous n’étions pas particulièrement religieux», raconte-t-il. «Au lycée, j’étais même rebelle et je me disais athée.» Mais face aux grandes questions de la vie, c’est dans le mysticisme, les esprits et les anciennes traditions qu’il trouvera le réconfort.

Inspiré par des personnalités comme le youtubeur montréalais Jonathan Pageau, le hiérodiacre s’est beaucoup renseigné en ligne sur l’orthodoxie, dans sa quête vers «le droit chemin». Un monde qui l’a mené vers le monastère de Valamo. «Les pères de l’Église répondaient très bien aux questions que je me posais. L’orthodoxie, en particulier, m’a semblé apporter les réponses les plus cohérentes de toutes les églises chrétiennes», explique Raphaël.

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