Enregistrée par une caméra indiscrète, la reine Elizabeth II a commis un impair rarissime qualifiant de «très impolis» des responsables chinois pour leur comportement lors de la visite en octobre du président Xi Jinping au Royaume-Uni.
Cet impair — qui coïncide avec une autre gaffe diplomatique commise elle, par le Premier ministre David Cameron–, s’est produit mardi lors d’un entretien entre la souveraine, et une responsable de la police londonienne, Lucy D’Orsi, qui décrit les difficultés rencontrées lors du passage de Xi Jinping. Lorsqu’il est indiqué à la reine que Lucy D’Orsi a supervisé la sécurité ce cet évènement, lors de la traditionnelle garden party dans les jardins de Buckingham Palace, elle répond: «Oh, pas de chance!».
«Je ne sais pas si vous l’avez su mais ça a été des moments assez éprouvants pour moi», dit la responsable de la police. Ce à quoi la reine répond par l’affirmative. Poursuivant sa description des événements, la policière rapporte la manière dont des responsables chinois ont quitté une rencontre avec Barbara Woodward, ambassadeur du Royaume-Uni en Chine, en disant que leur visite était terminée.
«Ils ont été très impolis avec l’ambassadeur», déclare alors la reine. Une sortie quelque peu inusuelle de la part d’un chef d’Etat au sujet d’un autre pays et en particulier venant de la monarque britannique, tenue à un strict devoir de réserve. «Ça a été un peu stressant parfois des deux côtés», a reconnu le ministre des Affaires étrangères britanniques Philip Hammond, tout en soulignant, dans une déclaration aux médias britanniques, que ce type de visite d’Etat impliquait «d’importants défis logistiques».
Un porte-parole du palais royal a de son côté refusé de commenter «les conversations privées de la reine». Il a néanmoins insisté sur le fait que la visite de Xi Jinping avait été «un franc succès», l’ensemble des parties ayant «travaillé étroitement ensemble pour s’assurer que tout se passe bien».
« Extraordinairement corrompus »
Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Lu Kang, a également insisté sur le fait que «la visite d’Etat du président Xi Jinping, l’année dernière, a été un grand succès». Lorsque les propos de la reine ont été rapportés par la chaîne télévisée BBC World, l’émission a été interrompue en Chine, a rapporté la chaîne publique britannique. Plus tôt mardi, c’est David Cameron qui a manqué de tact en qualifiant le Nigeria et l’Afghanistan de «peut-être les deux pays les plus corrompus du monde», lors d’une conversation avec la reine saisie par une caméra dans les salons de Buckingham Palace.
«Les dirigeants de plusieurs pays extraordinairement corrompus vont venir en Grande-Bretagne», a-t-il glissé à la reine lors d’une réception pour célébrer son 90e anniversaire. Ces déclarations interviennent alors que le président nigérian Muhammadu Buhari et son homologue afghan Ashraf Ghani vont participer au sommet international anti-corruption organisé à Londres jeudi.
Le dernier classement des pays les plus corrompus de l’ONG anti-corruption Transparency International souligne certes que l’Afghanistan est particulièrement mal classé (166e sur 168) tandis que le Nigeria figure à la 136e place. Mais les propos de M. Cameron ont surpris, au moment où il essaie d’obtenir des dirigeants concernés de signer jeudi «la toute première déclaration mondiale contre la corruption».
Downing Street, tout en refusant de commenter les conversations du Premier ministre avec la reine, a fait remarquer que les présidents afghan et nigérian reconnaissaient eux-mêmes des problèmes de corruption dans leurs pays respectifs dans un ouvrage publié à l’occasion du sommet. Mercredi, le président Buhari a indiqué qu’il préfèrerait, à des excuses, le retour d’actifs frauduleux cachés au Royaume-Uni par des Nigérians.
«Je ne vais pas demander d’excuses à qui que ce soit. Tout ce que je demande c’est le retour des actifs», a-t-il déclaré. «A quoi me serviraient des excuses? Ce dont j’ai besoin, c’est de quelque chose de tangible».
Le Quotidien/AFP