Adonna Ebrahimi est étirée de tout son long sur son tapis de yoga, essayant tant bien que mal de maintenir la position du cobra –et son sérieux– tandis que deux chevreaux jouent les équilibristes sur son dos.
Elle fait du « Goat Yoga », ou « Yoga chèvre », la dernière folie en matière d’exercice physique aux États-Unis. Des yogis de tous âges se ruent à ces cours très populaires où les pratiquants se quittent non seulement avec le traditionnel « namaste » mais aussi avec quelques fous rires. Pratiqués dans des fermes à travers le pays, ces cours se déroulent tandis que des chèvres naines guinéennes –40 à 50 cm au garrot à l’âge adulte– vaquent parmi les tapis. Et un peu partout autour.
« Au début, c’était un peu effrayant parce que je ne savais pas que les chèvres allaient sauter sur mon dos », explique Adonna Ebrahimi, 53 ans, à l’issue de sa première séance de « Goat Yoga » près de Los Angeles. « Puis elles étaient là et on pouvait sentir la chaleur des animaux… On était sur la paille, au soleil, avec les arbres et le ciel bleu autour de nous, et c’était tellement relaxant et paisible », se souvient-elle.
Une vingtaine de personnes et quinze chèvres –dont onze chevreaux– ont participé à ce cours à 15 dollars de l’heure, soit le même prix en moyenne qu’un cours classique. Meridith Lana, le professeur de yoga, encourageait ses élèves à « expirer », « aspirer le nombril jusqu’à la colonne vertébrale » ou encore à « surveiller leur posture », au milieu du bêlement des caprins occupés à sauter sur le dos des humains, à mastiquer leurs cheveux ou leur barbe ou à lécher leur visage. Quelques-uns se sont également laissés aller à satisfaire leurs besoins naturels.
Cadeaux sur le tapis
« Elles sont adorables et amicales », déclare Lana. « Elles mangent vos cheveux, elles vous laissent des cadeaux sur votre tapis mais tout se déroule dans une bonne ambiance. La thérapie que vous recevez ici est inestimable », estime-t-elle. Danette McReynolds, dont la famille est propriétaire des chèvres, explique avoir décidé d’accueillir ces classes de yoga hors du commun afin de récolter des fonds car sa fille de 16 ans et une amie prévoient de présenter les animaux à un salon agricole dans le Wisconsin cet été.
« Nous ne savions pas comment ça allait se passer mais ça a décollé, et nous affichons complet », se réjouit-elle. « Les gens adorent. Ils décompressent, ils câlinent les chèvres et se relaxent ». Le succès est tel que des listes d’attente ont été ouvertes. Un site de l’Oregon, dans le nord-ouest des Etats-Unis, affirme avoir inscrit des centaines de personnes sur la sienne.
Selon la prof de yoga, interagir avec les chèvres représente une expérience similaire à celle de jouer avec un animal domestique, ce qui a été prouvé par des études cliniques comme un exutoire au stress et un moyen d’apaiser les gens. « Le bonheur apporté par les chèvres est fantastique », dit Mme Lana. « Tous les animaux sont thérapeutiques mais il y a quelque chose de tout simplement incroyable avec ces chèvres ».
« Vous pouvez être en posture de l’enfant et, tout d’un coup, vous ne voulez plus vous relever parce qu’il y a une chèvre sur votre dos », poursuit-elle. « S’il y a une chose que ces chèvres vous permettent de faire, c’est d’avoir conscience » de son environnement. Plusieurs de ses élèves ont bien signalé que les chèvres gênaient parfois leurs étirements et positions… tout en estimant qu’elles étaient aussi une distraction bienvenue – qui fait glousser les participants et leur donne envie de revenir.
« Il y a une libération totale de la tension, de la frustration », souligne Judy Waters, qui a suivi un cours avec son mari et plusieurs amis, dont l’une célébrait son anniversaire. « Vous ne pouvez pas vraiment être de mauvaise humeur lorsque vous êtes entouré de chevreaux qui font des bêtises », ajoute-t-elle. Et il y a un bonus, selon elle: « Je n’ai pas pensé une seule fois à l’administration à Washington pendant toute l’heure » du cours, rit-elle. « J’adorerais faire ça chaque semaine si je pouvais ».
Le Quotidien/AFP