La toute nouvelle production austro-luxembourgeoise « Die Nacht der 1000 Stunden » est sortie mercredi sur les écrans du Grand-Duché. Une épopée historico-familiale signée Virgil Widrich.
Le dernier-né du paysage cinématographique luxembourgeois, Die Nacht der 1000 Stunden, produit par Amour Fou, est arrivé cette semaine sur les écrans luxembourgeois. Le réalisateur Virgil Widrich entraîne le spectateur dans un drame au cœur de la capitale autrichienne où le passé vient jouer des tours à une famille et par là même rejouer l’histoire. Virgil Widrich signe ici un film classique et intelligent qui rend un bel hommage à l’art cinématographique.
Porté par une Amira Casar (La Vérité si je mens !, Transylvania, Saint Laurent…) incroyable dans le rôle de Renate, Die Nacht der 1 000 Stunden, du réalisateur autrichien Virgil Widrich, propose, pour ce qui est son premier long métrage, de découvrir un véritable drame familial. Alors qu’un litige autour d’un héritage est en cours au cœur du clan Ullich, la tante décède subitement avant de pouvoir apposer sa signature finale. Quelques minutes plus tard, elle revient à la vie, tout comme toutes les générations de la même famille, nous entraînant dans une véritable partie de Cluedo durant laquelle il va falloir déterrer les plus lourds secrets et découvrir comment le grand-père Hermann a disparu.
Une passion interdite
L’univers est sombre, les personnages omniprésents, chaque détail historique est maîtrisé, tous les éléments sont réunis pour nous emmener dans une véritable épopée historique. Amira Casar, que l’on ne connaissait pas germanophone, est exemplaire dans le rôle de cette égérie des années 30 charmeuse, intelligente, forte, qui va conduire la famille au plus sombre de son histoire, mais aussi vivre une passion interdite.
Virgil Widrich signe, avec Die Nacht der 1 000 Stunden, un film complexe et classique à la fois, dans lequel il peut être difficile de plonger tant il est éloigné des productions actuelles, mais qui vaut la peine de s’y accrocher. Il y a dans son film un peu d’Hitchcock et d’Agatha Christie, mais aussi un profond questionnement de la grande histoire et de notre société contemporaine.
De notre collaboratrice Mylène Carrière
Un film réalisé « à l’ancienne »
« Die Nacht der 1 000 Stunden » a été présenté en avant-première lors du dernier Lux Film Festival, en présence du réalisateur. Le Quotidien a eu la chance de s’entretenir avec Virgil Widrich au sujet des coulisses de son projet hors du commun.
Le temps est toujours présent dans vos films. Comment avez-vous décidé de jouer avec le temps en le remontant dans ce drame familial à huis clos ?
Virgil Widrich : Je n’avais jamais écrit et réalisé un film aussi complexe auparavant, qui réunit autant d’éléments. C’est à la fois un film policier et historique et un drame familial. Il a mis près de neuf ans à voir le jour, de l’écriture à la sortie en salle. J’aime jouer avec le temps et pour ce projet j’avais envie que le temps ne passe pas, que tout devienne le présent. Le processus avec le temps est ici, en fait, le passé qui revient au présent et non pas des personnes du futur qui retournent dans le passé. Et contrairement à ce que l’on voit dans beaucoup de films de science-fiction, ici, les personnes du passé ne sont pas impressionnées par les objets du futur, au contraire, elles préfèrent ce qu’elles avaient avant, elles sont très conservatrices, ce qui est assez proche de ce que l’on vit actuellement.
De l’écriture à la réalisation, vous vous êtes entouré de deux monstres sacrés du cinéma, Jean-Claude Carrière pour l’écriture et Christian Berger pour l’image. Pourquoi les avoir choisis ?
Le point commun entre nous trois est le réalisateur Michael Haneke que je connais très bien. Pour la partie écriture, comme c’est souvent le cas, mon film ne trouvait pas de financements à l’époque car il était trop long. Je savais que Jean-Claude Carrière avait fait des miracles pour le film d’Haneke Le Ruban blanc, dans lequel il avait retravaillé le scénario et coupé plus d’une heure. Haneke nous a présentés, je lui ai parlé de mon script et il a accepté de travailler dessus. Notre collaboration s’est tellement bien passée que nous avons écrit un second film ensemble qui est actuellement en production. Pour Christian Berger, à vrai dire, je le connais depuis plus de 30 ans et j’avais besoin d’un expert comme lui sur la lumière pour réaliser ce que je souhaitais faire. C’est un ambassadeur dans ce domaine, il a une connaissance hors du commun, il est très ouvert aux nouvelles technologies et il se déplace avec une équipe extrêmement pointue et particulièrement douée.
Tout le film a été en réalité filmé dans une seule pièce en jouant avec des décors projetés. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur ce processus ?
J’ai tout de suite pensé réaliser ce film « à l’ancienne », en utilisant des projections plutôt qu’un écran vert pour planter le décor. Cette technique, qui ne date pas d’hier, mais plutôt des débuts du cinéma, m’a permis une liberté incroyable. Nous avons travaillé les décors comme un peintre, chaque élément dont nous rêvions pouvait être réalisé à travers ces projections. Le truchement de la perspective qu’implique cette technique accentue l’atmosphère quasi fantastique du film, mais peu de spectateurs le voient au premier regard.
Recueilli par M. C.