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Dheepan, la Palme d’or sort en salles


Jacques Audiard a fait appel à des acteurs non professionnels pour plonger dans la vie de ces réfugiés srilankais dans une banlieue française.

Palme d’or à Cannes, le septième et dernier film de Jacques Audiard sort en salles ce mercredi. Il raconte l’exil d’un Srilankais dans une banlieue française. Au programme : fausse famille et gangs.

Des mots définitifs, dits et répétés pendant la tournée promo ces jours-ci : « La Palme, c’est un événement important mais qui ne change rien pour moi. » Et d’autres, encore : « Ma vie de metteur en scène et ma vie tout court, peut-être qu’elles ont changé avec cette Palme, mais je ne m’en suis pas du tout aperçu. J’ai l’impression que le job est fait. Je n’ai pas le sentiment de mériter… » En mai dernier, le public des professionnels du cinéma et les «people» invités présents dans le Palais des festivals étaient debout pour applaudir Jacques Audiard – ce jour-là, il devenait le septième réalisateur français à recevoir la Palme d’or du festival de Cannes pour son nouveau film, Dheepan . Cannes, Audiard connaît : dans le passé, il y avait présenté déjà Un prophète, avec Niels Arestrup et Tahar Rahim, et De rouille et d’os, avec Marion Cotillard, – sans succès…

La question lui a été posée : avec cette Palme, se sent-il membre de la «famille du ciné» française? Réponse toute en revers lifté : « C’est peut-être la notion de famille ou de club. On pourrait peut-être même décliner jusqu’à chapelle… Mais je ne veux pas en faire partie, même si je me sens très français dans le cinéma que je fais. »

Une banlieue française ravagée par les gangs

Avec Dheepan , Jacques Audiard s’aventure, à 63 ans, dans les méandres des malheurs du monde. Et prend le pari fou d’intéresser le spectateur au sort d’un exilé politique clandestin srilankais, venu en France pour fuir la guerre civile de son pays en se fabriquant une fausse famille et devant affronter un autre conflit. Celui d’une banlieue ravagée par des gangs, d’une banlieue parisienne où il va trouver un travail de concierge. Dheepan, amour, violence…

Dans un récent entretien, le réalisateur a raconté la genèse de son film : « J’ai mis en route ce projet juste après Un prophète , il y a six ans. À l’époque, les problèmes des migrants étaient moins aigus mais assimilables aux drames actuels. Le sujet reste politique. Au départ, ce sont pourtant les marchands de fleurs qui vous abordent le soir au restaurant qui m’intéressaient. On ne les regarde pas ou à peine. Ces gens-là ont des vies insensées de personnes déplacées. Ils n’ont pas de visage, pas de papiers. Pour moi, Dheepan raconte l’épopée de trois destins. Le Sri Lanka a été une zone de guerre infernale. Les Anglais étaient plus informés; nous, les Français, on n’a rien compris… »

Certains ont voulu voir dans le film de Jacques Audiard une dimension, une portée, une pensée politique. « Ça ne m’intéresse pas énormément , confie le réalisateur. En revanche, il y a une dimension politique dans la formulation d’un projet comme celui-là. Ainsi, à un moment donné va se poser la question du prime time à la télévision. J’ai l’impression que c’est à ce moment qu’intervient le politique. » Mieux : quand Audiard raconte son nouveau film, il explique ce qu’il était à l’origine, « puis, le film est devenu un documentaire informant sur certains aspects de la société : un foyer, une cité… À la fin, l’origine du film réapparaît ». Quelque chose comme un remake des Straw Dogs de Sam Peckinpah, avec son héros seul face aux agresseurs.

Homme de paris et de défis, Jacques Audiard n’a pas tourné Dheepan en français et, pour les rôles principaux, il a retenu des acteurs non professionnels – Kalieaswari Srinivasan et, pour interpréter Dheepan, Antonythasan Jesuthasan, auteur de romans au Sri Lanka et réfugié politique en France…

Réalisateur ne souhaitant pas se cantonner dans un seul genre, Audiard a annoncé que son prochain film sera un western – une adaptation de The Sisters Brothers , un roman du Canadien Patrick deWitt.

AFP / S.A.

Dheepan, de Jacques Audiard