Le Mudam présente jusqu’au 22 septembre, dans et hors ses murs, «Privileged Points» de l’artiste iranienne Nairy Baghramian.
Elle ne sont que trois, mais elle sont monumentales. Nairy Baghramian présente trois de ses Privileged Points, des sculptures en bronze de très grande taille qui dessinent des cercle ouverts et irréguliers dialoguant avec l’espace environnant et avec les visiteurs. Ces derniers peuvent se laisser entourer par la forme, la matière et la couleur de chaque œuvre et ainsi profiter d’un «point privilégié» pour admirer le travail de l’artiste, mais aussi le monde qui l’entoure, que ce soit le grand hall du Mudam ou le parc Dräi Eechelen, avec, au bout, une vue magnifique et imprenable sur la vieille ville.
C’est en 2011 que l’artiste iranienne Nairy Baghramian – «une des artistes les plus demandées par les musées partout dans le monde», selon la commissaire et directrice du Mudam, Suzanne Cotter – a commencé à travailler sur son projet «Privileged Points». Un projet de sculptures, au départ, de taille moyenne qui pouvaient s’accrocher au mur. Depuis, ces œuvres ont grandi, évolué, pour devenir aujourd’hui des œuvres monumentales de plus de cinq mètres de diamètre.
C’est le cas des trois pièces présentées en ce moment par le Mudam. Une dans le grand hall du bâtiment dessiné par Ieoh Ming Pei, les deux autres – preuve de la volonté du musée de conceptualiser l’art dans l’espace public – en extérieur dans le parc qui entoure le musée, du côté de la forteresse.
La première, achetée par le musée l’an dernier, fait désormais partie de sa collection. Ses «deux sculptures sœurs», comme les appelle la commissaire et qui complètent l’exposition, se trouvent là de manière temporaire. Une donnée importante pour l’artiste pour qui ses œuvres, ont une «idée de temporalité en elles, comme si c’était une performance» et qu’elles savaient qu’elles «ne sont pas là pour toujours».
D’ailleurs, si les trois Privileged Points sont réalisés en bronze, leur forme et leur couleur – une jaune, une vert-jaune et une gris-vert, choisies spécialement pour Luxembourg lors de voyages préparatoires – leur donnent une dimension organique. Surtout avec leurs nombreuses excroissances volontaires qui ressemblent à des gouttes qui font croire «que les œuvres fondent et qu’elles vont disparaître», assume l’artiste.
Des œuvres pour s’asseoir
Il n’en sera rien, évidemment. Jusqu’au 22 septembre, au contraire, les trois œuvres vont vivre leur vie. Proposer, dixit Suzanne Cotter, leur «langage sculptural, corporel, social culturel…» et surtout vivre une interaction évolutive aussi bien avec l’espace qu’avec les visiteurs. «À la base de l’œuvre, on trouve une réflexion sur la sculpture même. Qu’est-ce que la sculpture peut être aujourd’hui au XXIe siècle? Comment on interagit avec une sculpture dans l’espace? Dans un espace d’exposition formel comme un musée ou dans le monde quotidien? Quelles fonctions peuvent avoir ces objets sculpturaux?», interroge la responsable des lieux.
Des lieux d’ailleurs, «idéaux pour mes sculptures, reprend pour sa part l’artiste. Dans l’entrée du bâtiment, on dirait une bienvenue monumentale au musée». Elle poursuit : «À l’extérieur, le visiteur et l’œuvre dans son horizontalité deviennent une seule et même pièce.» Un ensemble face à la verticalité de la vieille ville au loin. D’ailleurs, la forme, la taille et la rigidité de ces Privileged Points, au moins les deux présentés en extérieur, font que «les gens peuvent s’asseoir dessus», note Nairy Baghramian, pas du tout inquiète, au contraire plutôt heureuse de cette perspective. Bref, à chacun de s’approprier ses œuvres comme il l’entend!
Pablo Chimienti