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Des danseurs au « Service » du Mudam


Le musée qui enrichit son début de saison 2019 avec cinq "Services" chorégraphiques créés par le danseur et chorégraphe Adam Linder. (©Allie Foraker)

Le Mudam accueille pendant quatre semaines le danseur et chorégraphe australien Adam Linder. Il y présentera ses cinq «Services», des créations imaginées pour interagir avec l’art plastique.

De la danse au Mudam, ce n’est évidemment pas une première – rien que l’an dernier, le musée du Kirchberg recevait Anne Teresa De Keersmaeker– mais cela reste encore surprenant. Ainsi, l’institution se sent comme obligée de s’expliquer encore et toujours : «On tient à regarder, à présenter et à ouvrir l’art contemporain dans toutes ses formes au plus grand public», indique ainsi la directrice du Mudam, Suzanne Cotter. Et parmi les arts contemporains, on retrouve, bien évidemment, la danse.

Voilà donc le musée qui enrichit son début de saison 2019 avec «l’exposition des cinq Services chorégraphiques créés par le danseur et chorégraphe Adam Linder», précisent les responsables dans un communiqué. Adam Linder, que la directrice des lieux n’hésite pas à présenter comme «indiscutablement l’un des danseurs chorégraphes les plus intéressants de notre temps». Et ça tombe bien, «il crée des œuvres pour les théâtres, mais aussi pour des contextes hors scène, principalement en dialogue avec les arts plastiques», souligne Suzanne Cotter, qui a déjà travaillé avec le chorégraphe australien du temps où elle dirigeait le musée d’Art contemporain de Serralves, à Porto.

La proposition «Adam Linder : Full Service» est donc une manière pour l’institution du Kirchberg d’afficher son «ambition d’ouverture à travers la pluridisciplinarité de ses choix artistiques», mais aussi une manière pour le Mudam d’être un précurseur, à la pointe de la nouveauté.

Réflexions et interprétations

En effet, si chacune des cinq créations proposées par Adam Linder a déjà été présentée individuellement de par le monde, cette proposition multiple, ce «Full Service» grand-ducal, est «une première européenne» qui arrive quelques mois seulement après la création mondiale, qui s’est tenue en septembre dernier, à San Francisco. L’Australien et ses danseurs occupent donc la salle ouest du niveau -1 du bâtiment de Ieoh Ming Pei. Un espace volontairement intime, où la lumière naturelle n’arrive pas. Jusqu’au 3 mars inclus, du mercredi au dimanche, cette «white box» aux angles pas vraiment droits, cet espace dont le vide est uniquement cassé par une colonne et un mur dans le fond, va donc accueillir ce projet «radical» selon Suzanne Cotter, «expérimental» selon Anna Loporcaro, co-commissaire de l’exposition.

Ainsi, pendant quatre semaines, les «Services» vont se suivre et se superposer. Les deux premiers, Some Cleaning et Some Proximity, sont déjà visibles. Le premier met en scène un performeur qui, chorégraphiquement, vient nettoyer, rafraîchir et remettre en ordre un espace de manière aussi bien physique que symbolique.

Le second s’articule autour d’un critique d’art qui élabore en direct ses réflexions critiques sur le lieu et l’instant, pendant que deux danseurs «interprètent» ses écrits à travers leurs corps. Ce deuxième service demeurera à l’affiche la semaine prochaine et la suivante, en parallèle, respectivement avec le «Service 3», Some Riding, et le «Service 4 », Some Strands of Support. Dans le 3, deux danseurs récitent des essais de Catherine Dammanand et Sarah Lehrer-Graiwer, sur les notions d’incarnation et de performance, tandis que dans le 4, deux danseurs interagissent avec un objet vertical, statue ou autre, dans des mouvements oscillatoires faisant penser à un étonnant rituel.

Interactivité

La dernière semaine, du 27 février au 3 mars, place au «Service 5», Dare to Keep Kids off Naturalism. Une création plus vaste, avec quatre danseurs, pour laquelle «j’ai beaucoup réfléchi à l’histoire des performances, tout particulièrement dans le contexte des arts visuels», note Adam Linder. Ainsi, si les quatre premiers services ont un côté fonctionnel et traitent d’aspects quotidiens, ce dernier se veut encore plus réfléchi. «Je voulais presque me répondre à moi-même», reprend le chorégraphe, qui a imaginé huit scénarios qui remettent en cause la relation entre sensibilités théâtrales et espace d’exposition.

Ainsi, de 12h à 18h, du jeudi au dimanche, de 16h à 21h les mercredis, les danseurs, qui interprètent également un rôle, qui parlent, vont évoluer au milieu voire autour des spectateurs. Des spectateurs qui sauront tout des conditions signées entre le musée et le chorégraphe : durée des prestations, nombre de personnes concernées, horaires, tarifs, etc., des reproductions des cinq contrats des «Services» étant volontairement affichées dans la salle.

Pablo Chimienti