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[Critique album] La joyeuse évasion de Bananagun


Avec Bananagun, attendez-vous à découvrir une grosse bonne d’exotisme ! (photo Facebook)

Alors qu’il faudra sûrement cet été éviter les longs périples et se contenter des campings locaux, écouter The True Story of Bananagun est un bon moyen de s’évader (en musique) sur les terres africaines ou au cœur de la luxuriante forêt brésilienne.

BananagunEn route, donc, avec Bananagun, sympathique quintette aux racines australiennes (Melbourne) mais à l’esprit vagabond. Plus qu’une carte postale, la pochette de ce premier disque est une bonne illustration de ses penchants : chemises bariolées, chapeau de paille, ombrelle et sourires espiègles… Tout invite ici à la décontraction. Et l’excursion offerte se fait en barque, parce qu’il est important de profiter du voyage. Quatre garçons et une fille qui, dans un élan ramenant à la fin des années 60, sont adeptes de la formule «paix, amour et fleurs» et ses principes : non-violence, acceptation de soi, optimisme et ode à beauté de la nature.

Une onde positive qui, plutôt que de s’appuyer sur un folk-rock de circonstance, brasse large. Chez eux, en effet, on entend à la fois le psychédélisme anglais (et local, cf. King Gizzard & The Lizard Wizard), l’afrobeat fiévreux de Fela Kuti, le garage américain à la The Monks et le tropicalisme aventureux, genre Os Mutantes.

En somme, une grosse dose d’exotisme qui s’accompagne aussi de folles percussions et de sifflets d’oiseaux, un peu comme le fait déjà le groupe français Cannibale (Born Bad Records), qui, planqué dans un hameau en Normandie, concocte un son à la moiteur tropicale.

Une philosophie que partage Nick Van Bakel, fondateur de Bananagun, qui s’est également échappé de la ville pour vivre son utopie en lisière de forêt. Prêchant pour la collectivité, tel un «hobbit», dit-il, c’est là-bas qu’il a convié ses amis pour de longues sessions nocturnes musicales, libres, sur lesquelles sont nées les onze chansons du disque. Comme dans une longue improvisation, les instruments s’entremêlent et le rythme s’affole. Les tambours martèlent, les saxophones se répondent, les guitares glissent, les voix se parsèment en écho, tandis que les grillons et les perroquets se cachent dans le décor.

Pendant quarante minutes, cette balade en pleine jungle, ou plutôt cette «fête spirituelle», comme ils aiment définir l’expérience, repose sur cette spontanéité rafraîchissante qui file sans retenue. D’ailleurs, l’humeur se veut aussi légère, la musique de Bananagun ne partageant pas la puissance politique de ses inspirations (en dehors de l’entêtant People Talk Too Much), ressemblant plutôt à des mantras loufoques sous LSD.

Pourquoi donc prendre la vie au sérieux ? Nick Van Bakel donne une piste de réflexion : «C’est comme une lutte non violente ! Ou un mec qui fait un braquage avec une banane, et non une arme.» Autant d’astuces qui permettent à sa bande d’éviter d’être cataloguée «revival» et de s’affranchir du vernis «hippies», pour mieux distiller, à tire-d’aile, sa joie de vivre et ses envies rassembleuses. Essayer, donc, ces deux prochains mois, d’accompagner vos apéritifs avec les titres comme Freak Machine, Out of Reach ou Mushroom Bomb : votre voisin en caravane viendra sûrement trinquer.

Grégory Cimatti