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Compétition serrée pour les Oscars


Les préparatifs ont commencé en grande pompe à l’intérieur et autour du Dolby Theatre de Los Angeles pour la 94e cérémonie des Oscars, qui aura lieu ce dimanche soir.

CODA, The Power of the Dog ou Belfast meilleur film? Et l’audience sera-t-elle enfin de retour? Hollywood retenait son souffle avant le coup d’envoi de la 94e cérémonie de remise des Oscars, qui mettra fin au suspense ce dimanche soir.

Western sombre et psychologique sur la masculinité toxique, The Power of the Dog faisait jusqu’alors la course en tête dans les pronostics pour l’Oscar du meilleur long métrage, ce qui constituerait une victoire historique pour le géant Netflix, encore jamais sacré dans cette catégorie phare.

Mais la compétition s’est intensifiée ces dernières semaines et un postulant est revenu au grand galop : CODA, comédie dramatique pleine d’émotions et d’optimisme qui a remporté l’un après l’autre tous les prix décernés par les syndicats professionnels de l’industrie du cinéma américaine.

Le remake américain du succès français La Famille Bélier (Éric Lartigau, 2014) – 7,5 millions d’entrées dans l’Hexagone et un César du meilleur espoir féminin pour la chanteuse et actrice Louane – met en scène une famille de pêcheurs sourds dont la fille cadette chante dans une chorale. Le titre est l’acronyme de l’expression «child of deaf adults», ou enfant entendant de parents sourds.

Les experts gardent aussi un œil sur Belfast, film en noir et blanc de Kenneth Branagh inspiré par l’enfance nord-irlandaise du cinéaste, qui tient encore la distance. «C’est une course entre deux ou trois chevaux», résume Clayton Davis, spécialiste des prix cinématographiques pour le magazine de référence Variety. Il a noté une «forte dynamique» en faveur de CODA. «Ces deux dernières années ont été très difficiles pour tout le monde. Et CODA est positif, réconfortant. Je crois que les votants sont d’humeur à se sentir bien», dit-il.

«C’est une course très serrée», confirme Scott Feinberg, éditorialiste au magazine The Hollywood Reporter. Si beaucoup ont chanté les louanges de The Power of the Dog, le film de Jane Campion a déplu à d’autres, qui lui reprochent notamment sa froideur clinique et son manque d’émotions. «Ce n’est pas la tasse de thé de tout le monde», analyse Scott Feinberg.

Cela peut s’avérer un handicap avec l’étrange mode de scrutin préférentiel à plusieurs tours utilisé dans la catégorie du meilleur long métrage, qui a tendance à privilégier les films les plus consensuels. La compétition «n’a jamais été aussi ouverte», a déclaré sous couvert de l’anonymat l’un des votants de l’Académie des arts et sciences du cinéma, qui décerne les Oscars.

Will Smith et Jessica Chastain favoris

Autre atout dans la manche de CODA, il s’agit d’un film indépendant à petit budget (15 millions de dollars, contre 35 millions pour The Power of the Dog et plus de 40 millions pour Belfast) perçu cette année comme l’outsider et qui pourrait, à ce titre, s’attirer la sympathie des votants. «Certains membres de l’Académie auxquels je parle sont encore réticents à voter pour un film Netflix dans la catégorie du meilleur long métrage», explique ce même votant, relevant avec malice que CODA est diffusé par Apple TV+, une autre plateforme de vidéo à la demande.

Chez les acteurs, le grand favori est cette année est le toujours très populaire Will Smith, qui joue le père des championnes Serena et Venus Williams dans King Richard. L’une des vedettes de CODA, Troy Kotsur, tient quant à lui la corde pour l’Oscar du meilleur second rôle masculin. L’acteur sourd, qui incarne le père aimant mais parfois démuni de la protagoniste, a fait un tabac dans les différents prix cinématographiques cette saison.

La partie est bien plus disputée côté actrices. Pour Scott Feinberg, «n’importe laquelle des cinq candidates pourrait vraiment gagner» cette année, même si Jessica Chastain, méconnaissable en télévangéliste dans The Eyes of Tammy Faye, semble «la plus probable».

Clayton Davis reconnaît qu’il s’agit du pari le plus sûr mais relève que Penélope Cruz a aussi le vent en poupe et pourrait créer la surprise avec sa performance dans Madres paralelas, de Pedro Almodovar. Ariana DeBose devrait l’emporter pour le second rôle féminin avec le remake de West Side Story par Steven Spielberg, mais ce dernier aura fort à faire pour avoir le dessus sur Jane Campion, estiment les experts.

Retour au Dolby Theatre

En nombre absolu d’Oscars, c’est le «space opera» Dune qui devrait être vainqueur ce dimanche soir grâce à ses nominations dans de multiples catégories techniques. Le film de Denis Villeneuve est le deuxième film à avoir glané le plus de nominations (10), après The Power of the Dog (12).

Mais si les statuettes des meilleurs effets spéciaux, de la meilleure musique (composée par Hans Zimmer) et des maquillages semblent déjà dans la poche pour Dune, la bataille pour la photographie, les costumes et les décors va être principalement disputée avec West Side Story, adversaire redoutable.

Après deux ans de restrictions sanitaires et une édition 2021 qui s’était déroulée dans l’intimité d’une salle de réception de l’Union Station, la cérémonie des Oscars retrouve son traditionnel Dolby Theatre sur le Walk of Fame d’Hollywood. Les organisateurs et le diffuseur, la chaîne ABC, espèrent qu’ils retrouveront par la même occasion leur audience, en chute libre ces dernières années. L’édition 2021 n’avait attiré que 10 millions de téléspectateurs, une baisse de 56 % par rapport à l’année précédente qui avait déjà enregistré son niveau le plus bas de l’histoire.

Pour attirer les fans, les organisateurs ont lancé cette année un «prix des fans», appelés à voter sur les réseaux sociaux. Il s’agit pour les Oscars de «voir comment ils peuvent atteindre une nouvelle audience, cette génération TikTok», estime Clayton Davis.

La reine de la pop Beyoncé et sa jeune dauphine, Billie Eilish, viendront aussi à la pêche aux téléspectateurs sur la scène des Oscars, où elles sont en lice respectivement pour leur chanson de King Richard et du dernier James Bond, No Time to Die. Mais si l’audience stagne, «voire chute encore un peu plus, alors ils auront vraiment un gros problème», avertit Scott Feinberg.

Les principales nominations

MEILLEUR FILM

Belfast, de Kenneth Branagh

CODA, de Sian Heder

Don’t Look Up, d’Adam McKay

Drive My Car, de Ryusuke Hamaguchi

Dune, de Denis Villeneuve

King Richard, de Reinaldo Marcus Green

Licorice Pizza, de Paul Thomas Anderson

Nightmare Alley, de Guillermo Del Toro

The Power of the Dog, de Jane Campion

West Side Story, de Steven Spielberg

MEILLEURE RÉALISATION

Kenneth Branagh (Belfast)

Ryusuke Hamaguchi (Drive My Car)

Paul Thomas Anderson (Licorice Pizza)

Jane Campion (The Power of the Dog)

Steven Spielberg (West Side Story)

MEILLEUR ACTEUR

Javier Bardem (Being the Ricardos)

Benedict Cumberbatch (The Power of the Dog)

Andrew Garfield (tick, tick…BOOM!)

Will Smith (King Richard)

Denzel Washington (The Tragedy of Macbeth)

MEILLEURE ACTRICE

Jessica Chastain (The Eyes of Tammy Faye)

Olivia Colman (The Lost Daughter)

Penélope Cruz (Madres paralelas)

Nicole Kidman (Being the Ricardos)

Kristen Stewart (Spencer)

MEILLEUR ACTEUR DANS UN SECOND RÔLE

Ciáran Hinds (Belfast)

Troy Kotsur (CODA)

Jesse Plemons (The Power of the Dog)

JK Simmons (Being the Ricardos)

Kodi Smit-McPhee (The Power of the Dog)

MEILLEURE ACTRICE DANS UN SECOND RÔLE

Jessie Buckley (The Lost Daughter)

Ariana DeBose (West Side Story)

Judi Dench (Belfast)

Kirsten Dunst (The Power of the Dog)

Aunjanue Ellis (King Richard)

MEILLEUR FILM INTERNATIONAL

Drive My Car, de Ryusuke Hamaguchi (Japon)

Flee, de Jonas Poher Rasmussen (Danemark)

È stata la mano di Dio, de Paolo Sorrentino (Italie)

Lunana : A Yak in the Classroom, de Pawo Choyning Dorji (Bhoutan)

The Worst Person in the World, de Joachim Trier (Norvège)

MEILLEUR FILM D’ANIMATION

Encanto, de Jared Bush, Byron Howard et Charise Castro Smith

Flee, de Jonas Poher Rasmussen

Luca, d’Enrico Casarosa

The Mitchells vs. the Machines, de Mike Rianda

Raya and the Last Dragon, de Don Hall et Carlos López Estrada

MEILLEUR DOCUMENTAIRE

Ascension, de Jessica Kingdon

Attica, de Traci Curry et Stanley Nelson

Flee, de Jonas Poher Rasmussen

Summer of Soul, de Questlove

Writing with Fire, de Sushmit Ghosh et Rintu Thomas

MEILLEUR SCÉNARIO ORIGINAL

Belfast (Kenneth Branagh)

Don’t Look Up (Adam McKay)

King Richard (Zach Baylin)

Licorice Pizza (Paul Thomas Anderson)

The Worst Person in the World (Joachim Trier et Eskil Vogt)

MEILLEUR SCÉNARIO ADAPTÉ

CODA (Sian Heder)

Drive My Car (Ryusuke Hamaguchi et Takamasa Oe)

Dune (Jon Spaihts, Denis Villeneuve et Eric Roth)

The Lost Daughter (Maggie Gyllenhaal)

The Power of the Dog (Jane Campion)