Cocaine Bear
d’Elizabeth Banks
avec Ray Liotta, Keri Russell, O’Shea Jackson Jr…
Genre comédie / horreur
Durée 1 h 35
Sérieusement, qu’est-ce qui leur prend avec les ours? La semaine dernière, déjà, le gentil ourson glouton et mignon de chez Disney subissait un sacré lifting, fruit des envies cauchemardesques du réalisateur Rhys Frake-Waterfield, qui va faire de lui et de son pote Porcinet deux dangereux psychopathes (Winnie-the-Pooh : Blood and Honey). À peine le temps d’encaisser la mutation qu’Elizabeth Banks en rajoute une couche. Pour son quatrième film derrière la caméra (après notamment Charlie’s Angels en 2019), l’actrice, elle aussi, sort des sentiers battus : sa bête ne sera pas accro au miel, mais à la poudre blanche. «Ne donnez pas de coke à un ours!», dit l’affiche du film. Quand on voit ce que l’animal, sobre, peut infliger à Leonardo Di Caprio dans The Revenant, l’avertissement se tient.
Une idée saugrenue qui n’est pas tombée du ciel, ou presque. Elle s’inspire d’un fait divers survenu en 1985, lorsqu’un trafiquant de drogue, se croyant suivi par la police, balance sa cargaison depuis l’avion avant de s’écraser au sol à Knoxville (dans le Tennessee), trop chargé pour que son parachute ne s’ouvre. Plus loin, autour de la carcasse de l’appareil, neuf sacs de voyage, tous remplis de cocaïne. Le contenu du dixième, lui, sera retrouvé trois mois plus tard au cœur de la forêt nationale de Chattahoochee (Géorgie), dans l’estomac d’un ours qui n’a pas survécu au festin estimé à 20 millions de dollars. Ce qui lui a valu le sympathique surnom de «Pablo Eskobear»… «J’ai voulu que ce film soit en quelque sorte l’histoire de sa vengeance», raconte la réalisatrice dans les notes du film.
Que serait-il arrivé si l’animal avait survécu? Voilà tout l’objet de ce Cocaine Bear qui, pour assouvir cette revanche, va réunir toute une faune un peu bébête en guise de proies faciles : un flic, des criminels qui cherchent à récupérer la drogue, des randonneurs transis, des délinquants du coin, des gardes forestiers, des ambulanciers, sans oublier deux enfants (les plus débrouillards du panel) qui ont mal choisi le lieu et le moment pour faire l’école buissonnière. Car dans les fourrés rode un prédateur de 200 kilos, totalement dépendant à la coco (de la 100 % colombienne!), ce qui le met un peu sur les nerfs et le conduit à attaquer tout ce qui bouge. Inutile de faire le mort pour s’en sortir. Avec lui, on l’est rapidement…
Prenant ses distances et de grandes libertés avec l’histoire vraie (malgré des images d’archives en préambule), Elizabeth Banks fait dans le lâcher-prise, avec un film qui n’atteint jamais des sommets d’intelligence, mais qui reste fidèle, de bout en bout, à son ADN : celui d’un divertissement qui tâche, avec une bonne dose de gore. L’hommage aux séries B à tendance horrifique, avec ses figures ridicules et un peu dingues (qui finissent souvent les pieds devant), est évident. Celui aux années 1980 un peu moins, en dehors de rares détails (la ceinture de Rocky portée par l’un des fugueurs) et d’une musique qui alterne entre hard-rock kitsch et pop ultra-synthétique.
Mais, et c’est bien dommage, on sent que la réalisatrice n’a pas été au bout de son geste. Certes, elle a soigné les scènes d’action et son casting, avec l’une des dernières apparitions de Ray Liotta (Les Affranchis) avant sa mort en mai 2022. Mais l’histoire prend un temps infini pour trouver le bon ton et la bonne dynamique, surtout en termes d’humour, pourtant essentiel au genre. Au final, la vedette reste l’ours, dont on guette la moindre apparition, qu’il s’amuse à jouer avec un papillon ou à lacérer de ses griffes ceux qui cherchent à le priver de sa dose. Pop-corn en main, le public aura (en partie) ce qu’il est venu chercher : du fun et des membres arrachés! Précision d’importance tout de même : aucun animal n’a été blessé ni drogué durant le tournage.
Ne donnez pas de coke à un ours!